Intervention de Monique Cerisier-ben Guiga

Réunion du 2 octobre 2007 à 22h15
Immigration intégration et asile — Article 1er

Photo de Monique Cerisier-ben GuigaMonique Cerisier-ben Guiga :

L'article 1er ajoute une condition supplémentaire au regroupement familial : la connaissance de la langue française et des valeurs de la République, préalablement au départ de la famille du migrant.

Certes, les 1, 4 million de Français établis à l'étranger reconnaissent qu'il est plus facile de s'installer dans un pays quand on en connaît la langue et les usages. C'est une question de bon sens ! Mais, en pratique, la plupart d'entre eux sont arrivés sans parler un mot de la langue du pays. Ils l'ont apprise sur place en prenant des cours ou en faisant des « petits boulots ». Je pense notamment aux communautés françaises d'Europe du Nord : le danois, le finnois, le néerlandais, le suédois ne sont guère parlés hors des pays qui sont le berceau de ces langues. Voilà des hommes et des femmes qui, pour la plupart d'entre eux, se trouvaient exactement dans la même situation que celle que connaît l'étranger qui arrive en France sans avoir appris auparavant le français.

Dès lors, pourquoi imposer, monsieur le ministre, cette condition supplémentaire, qui fait double emploi avec le contrat d'accueil et d'intégration, le CAI ? Après toute la guimauve qui enrobe le début de la page 33 du rapport de M. Mariani, on trouve la vraie raison, dont je vais vous donner lecture, mes chers collègues :

« Par ailleurs, dans le cadre de la formation linguistique préalable à l'étranger, l'autorité administrative disposera d'un outil très efficace pour s'assurer du suivi effectif des cours de français puisque, en l'absence de présentation du justificatif d'assiduité, le visa long séjour nécessaire à l'entrée en France ne sera pas délivré. Il n'existe pas de dispositif aussi efficace permettant de s'assurer du suivi des formations dispensées, en France, dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration. »

Il s'agit non pas de faire en sorte que les arrivants soient mieux préparés, mais bel et bien de prévoir une mesure de coercition pour leur faire apprendre le français de force.

Nous qui connaissons les lenteurs de l'ANAEM, l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations, des consulats, de la sous-direction de la circulation des étrangers à Nantes, nous savons fort bien que l'objectif est de retarder encore un peu plus la venue des membres de la famille du migrant.

Au final, ces femmes et ces enfants arriveront sur notre sol trois au quatre ans plus tard. Ainsi, les enfants n'auront pu aller à l'école maternelle ou n'auront pu suivre les premières années de classe primaire ; ils rencontreront donc plus de problèmes d'adaptation.

Plus on s'établit jeune dans un pays, plus on a de chances, non pas de s'y intégrer - il ne faut pas raconter d'histoires ! -, mais de s'adapter à sa langue, à ses moeurs, à ses us et coutumes. C'est bien plus facile que lorsque la personne a déjà pu affirmer sa personnalité.

J'irai même plus loin. Que dirait le Gouvernement français si la Chine, le Japon, par exemple, imposaient aux épouses des cadres expatriés d'apprendre le mandarin ou le japonais pour rejoindre leurs époux ?

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