Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a souhaité se saisir pour avis des dispositions de cette proposition de loi de notre collègue Xavier Pintat, dont nous apprécions d’ailleurs l’initiative. En effet, le texte répond à de nombreux besoins de nos concitoyens. Relatif à la couverture du territoire, notamment dans le domaine de la télévision numérique terrestre, la TNT, il fait suite au rapport de notre collègue Bruno Retailleau.
Je commencerai par rappeler que la loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur a fixé pour les chaînes de la TNT un objectif de couverture de 100 % de la population, sans préjudice des modes de diffusion utilisés – réseau hertzien, satellite, ADSL ou câble –, cet objectif étant porté à 95 % de la population pour la seule diffusion par la voie hertzienne terrestre.
Conformément à l’article 96-2 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le Conseil supérieur de l’audiovisuel a fixé en janvier 2007, donc très récemment, le calendrier du passage au numérique. Il a notamment arrêté un schéma d’extension de la couverture de la TNT entre 2008 et 2011 pour les chaînes historiques, d’une part, et pour les nouveaux entrants, d’autre part, ce schéma ayant été validé par le Premier ministre.
La TNT va donc progressivement couvrir le territoire jusqu’à la fin de l’année 2011. C’est un grand chantier que nous avons devant nous ! Pour notre commission, il est majeur, car il permettra d’offrir à tous les Français de nouveaux programmes de télévision. Ces programmes seront, nous l’espérons tous, de meilleure qualité, mais aussi plus diversifiés. Nous savons également que cette couverture est un facteur non négligeable d’attractivité du territoire.
Pour donner davantage d’ambition géographique à la TNT, le CSA a en outre fixé un taux de couverture de la TNT par voie hertzienne par département. En effet, si le taux de couverture de la population par la TNT atteignait 87 % à la fin de l’année 2008, des variations importantes existent encore selon les zones géographiques. On observe, par exemple, une couverture inférieure à 60 % de la population pour la Franche-Comté ou pour la partie alpine de la région Rhône-Alpes.
L’objectif est donc d’assurer une couverture harmonieuse de la TNT sur l’ensemble du territoire national, tout en tenant compte, bien entendu, des contraintes économiques des chaînes de télévision, qui doivent supporter le coût des émetteurs.
Ce taux d’obligation de couverture a été fixé de manière très ambitieuse. Pour les chaînes historiques, il atteint 91 % de la population de chaque département et, pour les nouveaux entrants, 85 % de la population de chaque département. Toutefois, il s’agit là d’approximations et les méthodes de calcul du CSA pour déterminer la couverture du territoire sont en fait beaucoup plus complexes.
En application de l’article 115 de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, le CSA a publié, le 23 décembre 2008, une liste des zones qui devront être couvertes par la TNT au plus tard le 30 novembre 2011. Au final, sont concernées 1 626 zones pour les chaînes historiques en clair et 1 423 zones pour Canal Plus et les nouveaux entrants de la TNT.
Cet équilibre défini par le CSA est satisfaisant à plusieurs égards. D’abord, le nombre de personnes ayant accès à la télévision par la voie hertzienne augmente globalement. Ensuite, des zones auparavant non desservies en analogique le seront prochainement en numérique. Enfin, on assure une équité territoriale pertinente, alors qu’il était impossible pour le législateur de fixer un taux minimal de couverture par département du fait des très nombreuses incertitudes techniques entourant le passage à la TNT.
Toutefois, et c’est l’une des raisons de notre débat d’aujourd’hui, il ne faut pas se voiler la face : des zones d’ombre subsistent et certaines zones, auparavant desservies en analogique, ne le seront plus en numérique. Cela suscite, nous le savons, l’émotion tant des élus locaux que d’un certain nombre de nos concitoyens.
Pour résoudre ces difficultés, le législateur a été doublement actif.
D’une part, l’article 102 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication a prévu la mise en place d’un accompagnement social du passage au numérique via un fonds d’aide, afin que tous les citoyens puissent s’équiper et recevoir la TNT. Ce dispositif s’applique aux téléspectateurs dégrevés de contribution à l’audiovisuel public, l’ancienne redevance, et sous condition de ressources. Mais, comme vous le savez, ce fonds est également géré par le groupement d’intérêt public France Télé numérique, qui a fait l’objet de nombreux débats dans cette assemblée au cours de l’hiver dernier.
D’autre part, la loi de 2007 et celle de 2009 ont permis le développement de deux offres satellitaires gratuites pour les zones d’ombre, qui réunissent l’ensemble des chaînes de la TNT. Ces deux offres, TNTSat et Fransat des groupes Canalsat et Eutelsat, permettent la réception de la TNT sans abonnement ni frais de location d’un terminal de réception, avec un investissement initial relativement modéré, que l’on estime aujourd’hui à un maximum de 250 euros.
Une faiblesse subsiste néanmoins. Elle est liée au choix du CSA d’imposer un taux départemental, qui souffre d’absence de base juridique. Or il semblerait, comme l’a rappelé Bruno Retailleau, que plusieurs chaînes aient contesté devant le juge la légalité des listes définies par le CSA.
C’est pourquoi la commission de l’économie a introduit avant l’article 1er deux articles, les articles 1erA et 1erB. Ceux-ci visent à conforter la légalité des listes actuelles, en confiant explicitement au CSA le soin de définir une couverture minimale par département. Graver dans le marbre législatif ce choix du régulateur nous paraît constituer une excellente initiative !
En revanche, il serait dangereux de vouloir augmenter davantage le nombre de sites TNT. Outre le coût extrêmement élevé que cela représenterait pour les chaînes de télévision, notamment pour France Télévisions, la mise en service d’émetteurs supplémentaires, au-delà de ceux qui sont prévus pour l’instant, risquerait de décaler de nombreux mois le calendrier d’extension de la TNT.
Nous savons que le réseau hertzien ne couvrira jamais l’ensemble du territoire. L’État doit donc apporter des solutions à ces inégalités territoriales : le soutien à l’achat d’une parabole et aux solutions alternatives que constituent le câble et l’ADSL est, à cet égard, une nécessité.
C’est la raison pour laquelle nous sommes également satisfaits par l’article 1erD, qui impose au Gouvernement de rendre un rapport sur le soutien financier qui pourrait être apporté aux personnes résidant dans les zones d’ombre. Il apparaît en effet que le fonds de soutien géré par le GIP s’adresse uniquement aux personnes dégrevées de redevance. Dans les zones d’ombre, il pourrait s’avérer utile d’élargir le public concerné, afin de respecter l’égalité de tous nos concitoyens devant l’arrivée de la TNT.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, la commission de la culture, de l’éducation et la communication a donné un avis favorable à l’adoption de la présente proposition de loi.
Toutefois, des interrogations relatives à la couverture de la TNT demeurent. Je voudrais donc, madame le secrétaire d’État, évoquer deux questions qui se posent au sein de notre commission et au-delà, j’imagine, sur l’ensemble des travées de cette assemblée.
La première question concerne le décret d’application de l’article 102 de la loi de 1986 qui n’est pas encore publié. Il était prévu que le soutien financier aux personnes dégrevées de redevance serait technologiquement neutre. Il serait donc logique que les achats de paraboles dans les zones d’ombre soient subventionnés pour ces personnes. Madame la secrétaire d'État, pourriez-vous nous le confirmer et nous donner des indications sur le délai dans lequel ce décret sera publié ?
Ma seconde question est connexe à la première. Madame la secrétaire d'État, vous aviez évoqué en commission l’idée de soutenir davantage les populations situées en zones d’ombre, ce qui constituerait un engagement de l’État en faveur de l’équité territoriale et de l’égalité de tous face à l’arrivée de la TNT. Selon vous, quelles formes ce soutien pourrait-il prendre ?
Nous soutenons les conclusions de la commission de l’économie et nous apprécions le travail de notre collègue Xavier Pintat. Nous sommes maintenant dans l’attente des réponses que le Gouvernement voudra bien nous apporter.