…car il ne peut y avoir d’aménagement du territoire sans développement du numérique. Votre présence, monsieur le ministre, est donc symbolique.
Nous sommes tous pleinement conscients, mes chers collègues, de l’importance du numérique tant dans le domaine économique – la Commission européenne a rappelé que le déploiement du très haut débit créerait un million d’emplois et 0, 6 % de croissance annuelle supplémentaire –, qu’en termes de culture et de savoir, de développement durable, de qualité de vie et d’aménagement du territoire ; les élus ruraux que nous sommes sont particulièrement attachés à ce dernier aspect.
L’impact du numérique sur les territoires est en effet considérable. Un territoire rural peu favorisé pourra, grâce au numérique, être en situation d’accueillir des activités économiques et touristiques, ainsi que de nouveaux habitants. Au contraire, s’il ne bénéficie pas du numérique, il verra se réduire encore sa population et son activité. Ainsi, l’arrivée du numérique peut inverser un déclin, tandis que son absence peut l’accélérer.
Aujourd’hui, chacun le reconnaît, l’accès au haut débit, c'est-à-dire aux 512 kilobits par seconde, ne correspond plus aux besoins des utilisateurs. Le seuil minimal généralement admis comme nécessaire se situe autour de 2 mégabits : c’est d’ailleurs ce seuil que le gouvernement britannique s’est engagé à atteindre, dans le cadre d’un service universel qui sera mis en place en 2012.
Dans ces conditions, le rapporteur a raison de le souligner, « le déploiement du très haut débit sur l’ensemble du territoire n’est pas un luxe. C’est le seul moyen pour que les entreprises et les particuliers puissent bénéficier de nouveaux usages d’internet […] et que les territoires puissent préserver leur attractivité ».
La question qui se pose est celle du coût. En effet, cela a été dit, la couverture du territoire en haut débit représente des montants considérables : on parle de 40 milliards d’euros ! On sait bien que les opérateurs n’investiront que dans les zones rentables, c’est-à-dire les zones denses. On risque donc d’assister à une nouvelle fracture numérique qui laisserait de côté 80 % du territoire et 60 % de la population. Ce n’est pas acceptable et il faudra que la puissance publique, plus précisément l’État, intervienne financièrement. On évalue à environ 10 milliards d’euros les fonds nécessaires.
La création du fonds d’aménagement numérique des territoires est une bonne chose, car on ne peut pas, une nouvelle fois, laisser les collectivités territoriales financer l’ensemble de cet investissement en très haut débit.
La question est de savoir comment alimenter ce fonds. Il me semble que l’État devra le faire au moyen du grand emprunt national – cela me paraît particulièrement approprié, le numérique étant, par essence, un secteur d’avenir –, mais aussi en mobilisant des financements européens et une partie du produit de la vente des fréquences numériques.
La commission a choisi d’exclure une participation des opérateurs, contrairement à ce que prévoyait le texte initial de la proposition de loi. En ce qui me concerne, je ne suis absolument pas hostile à ce que les opérateurs contribuent au financement de la couverture numérique du territoire, à condition que l’on cesse de leur demander de payer pour tout et n’importe quoi. Pour parler clairement, je préférerais qu’ils financent la couverture numérique du territoire plutôt que la suppression de la publicité à la télévision. Je rappelle que la taxe de 0, 9 % instituée à cette fin permettrait de raccorder à la fibre optique 380 000 foyers supplémentaires chaque année. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement visant à supprimer ce prélèvement, mais prévoyant en contrepartie un abondement du fonds par les opérateurs. Il ne serait pas non plus anormal que les départements densément peuplés, qui n’auront pas à financer le très haut débit et sont d’ailleurs souvent économiquement favorisés, puissent alimenter le fonds au titre de la solidarité territoriale.