Intervention de Philippe Bas

Réunion du 14 février 2007 à 15h00
Protection juridique des majeurs — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Philippe Bas, ministre délégué :

C'est précisément pour lui éviter d'avoir à supporter de telles charges que M. le garde des sceaux et moi-même, après nous être particulièrement appesantis sur ce point, avons inscrit dans le projet de loi que, par exception, le département ne paiera pas les frais de tutelle pour les prestations qu'il sert aux allocataires. Et puisqu'il ne les paiera pas, c'est l'État qui assumera cette charge. D'où cette évaluation, non démentie, selon laquelle, sur le plan national, le montant total annuel des économies ainsi réalisées par les départements s'élèvera, en 2009, à 73 millions d'euros.

Certes, à côté de cette économie, les départements devront faire face à une certaine dépense, mais il s'agit d'une implication nécessaire de la réforme. Lorsqu'on agit par le truchement de l'action sociale là où la justice intervenait auparavant, par le biais de mesures judiciaires, c'est la collectivité responsable de l'action sociale qui doit assumer cette action.

Nous espérons que la charge sera réelle puisque nous voulons éviter que la justice n'intervienne dans un certain nombre de cas où cela n'est pas nécessaire, préférant, quant à nous, l'intervention de l'action sociale des départements. C'est donc le solde entre cette charge et cette économie - charge hypothétique, économie certaine - qui conduira, pour les départements, soit à une neutralité financière, comme nous pouvons le penser à travers nos évaluations, soit, si nous nous sommes trompés, à un gain ou une dépense. Et parce que nous voulons en avoir le coeur net et que nous ne nous contentons pas de projections, compte tenu des aléas inhérents à celles-ci comme à toute projection, nous avons prévu une clause de revoyure, de manière que l'État et les départements puissent suivre année après année les effets financiers de la réforme.

Il s'agit là d'un point sur lequel beaucoup d'entre vous ont exprimé des inquiétudes et à propos duquel je tenais à apporter un certain nombre de précisions.

Mme Mathon-Poinat a évoqué l'insuffisance du nombre de contrôles. Je partage cette opinion et c'est la raison pour laquelle le projet de loi prévoit le développement de ces contrôles. Cette mesure était tout à fait indispensable.

Monsieur Détraigne, je crois avoir répondu à la préoccupation que vous avez formulée concernant les transferts de charges.

Vous suggérez d'instituer un diplôme national pour les mandataires. Il s'agit d'une question très délicate. En effet, si notre objectif est, certes, de professionnaliser, il reste que les origines professionnelles des mandataires sont aujourd'hui très variées, et nous ne voulons pas mettre fin à cette variété. Autant le certificat de compétence que nous instituons nous paraît utile et adapté, autant la mise en place d'une véritable profession de mandataire avec un cursus universitaire spécifique nous semble excessive.

Monsieur Fouché, je suis d'accord avec vous : il était essentiel que les personnes soient au coeur de la réforme. À cet égard, la désignation d'un proche comme tuteur, ainsi que vous l'avez fort bien dit, prend en compte un certain nombre d'évolutions sociales de manière positive.

Je voudrais maintenant répondre à M. Vasselle au sujet de la sécurité sociale.

En l'absence de réforme, la sécurité sociale débourserait, en 2008, 174 millions d'euros pour la prise en charge des frais de tutelle, pour les prestations qu'elle sert, qu'il s'agisse de l'allocation aux adultes handicapés, des pensions de retraite ou des prestations familiales, la même règle, que j'ai rappelée tout à l'heure, s'appliquant à tous les financeurs.

Enfin, je m'adresserai à M. About qui nous a abondamment entretenus d'une question très grave, celle du droit de vote.

Vous avez dit, monsieur About, que nos régimes de tutelle ont le souci protéger les personnes et que cette aspiration de devait pas emporter, comme si cela allait de soi, privation de l'exercice de droits civiques et, en particulier, du droit de vote.

La règle, aujourd'hui, est la suivante : toute personne handicapée mentale placée sous tutelle est effectivement privée de son droit de vote. Cependant, le juge peut la relever de cette privation L'expérience nous en offre d'ailleurs de nombreux exemples. C'est ainsi qu'une personne trisomique peut se prononcer sur les choix politiques fondamentaux. En effet, nous ne sommes plus au temps du suffrage censitaire et on ne vérifie pas les qualifications intellectuelles de chacun de nos compatriotes avant de lui reconnaître le droit de vote.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion