Intervention de François Autain

Réunion du 17 novembre 2005 à 15h00
Financement de la sécurité sociale pour 2006 — Article additionnel avant l'article 30

Photo de François AutainFrançois Autain :

Nous avons déposé cet amendement parce que nous estimons qu'il serait utile de suspendre, du moins d'infléchir, le plan « Hôpital 2007 » avant qu'il ait fait trop de dégâts.

Nous avons toujours été opposés à la philosophie qui inspire ce plan « Hôpital 2007 ». Nous en avons donné les raisons à l'occasion des différents débats sur les projets de loi de financement de la sécurité sociale. Selon nous, ce plan a pour objet, ni plus ni moins, de transformer l'hôpital en une unité de production et d'industrialisation de soins où la rentabilité à tout prix est de règle. Il existe donc un risque grave pour le respect de l'éthique médicale.

Ce plan comporte trois volets.

Après le volet investissement, il y a le volet gouvernance, que je préfère appeler « gestion opérationnelle économique ». J'aurais aimé qu'elle fasse l'objet d'un large débat au Parlement. Le Gouvernement en a décidé autrement puisqu'il s'en est remis aux ordonnances.

Cette nouvelle gestion supprime le service hospitalier affecté à une spécialité, qui est animé et exercé par une équipe médicale homogène assurant une cohérence médicale et thérapeutique et lui substitue un pôle qui agrège des activités, en dehors de toute logique médicale, comme la maternité, la chirurgie orthopédique, la néphrologie, la chirurgie endocrinienne, la chirurgie gynécologie et l'urologie. Le seul point commun de toutes ces spécialités à l'intérieur du pôle est la salle d'opération. Il y a donc un véritable problème.

Le dernier volet, qui consiste en la tarification à l'activité, consacre la transformation de l'hôpital en une petite entreprise qui doit être rentable à tout prix, même si cela doit se faire au prix de licenciements et, si besoin est, du dépôt de bilan de certains pôles ou hôpitaux. On comprend, dans ces conditions, que l'archaïque service hospitalier, centré sur la mise en oeuvre de soins de qualité et d'une écoute du malade, autour d'une équipe médicale homogène, soit disqualifié et sacrifié pour satisfaire à cette logique de la rentabilité.

Où est passée la notion de service publique, de prise en charge globale du malade dans sa diversité ? Où est passée la recherche de la qualité des soins ? La philosophie de la rentabilité du chiffre, de la sélection paraît d'autant plus folle qu'elle fait appel à une échelle erronée.

En effet, les groupes homogènes de séjour sont des constructions purement artificielles : chaque malade étant unique, l'homogénéité médicale dépasse de loin ces 500 cas de figures. Tous les médecins savent qu'il existe une trentaine de spécialités et que chacune d'elle comporte 50 à 100 pathologies différentes. Or, c'est au minimum 2000 catégories qui seraient nécessaires. Ces groupes homogènes sont donc en réalité profondément hétérogènes, surtout si des pathologies associées coexistent, et ils ne donnent que l'image déformée de la réalité complexe de la pratique clinique à l'hôpital.

A vouloir simplifier ce qui est complexe, faire rentrer coûte que coûte le multiple dans l'unique, on aboutit à des situations absurdes situées à l'opposé de l'objectif visé.

Au lieu de couvrir l'ensemble des risques liés aux différentes pathologies, on les sélectionne pour ne retenir que les plus rentables. Au lieu de limiter la pratique médicale aux actes utiles et nécessaires, on multiplie artificiellement leur nombre. Enfin, les codages au GHS, ou groupe homogène de séjour, autorisent toutes les manipulations.

Il est très drôle de constater que, dans cette affaire, nous suivons l'exemple des Etats-Unis, comme l'indiquait tout à l'heure M. Fischer. Or il y a longtemps qu'ils y ont renoncé. Le contrôle de l'utilité des dépenses est maintenant fondé sur des visites sur site à l'hôpital et des activités médicales comportant l'analyse des dossiers de malades tirés au sort, pour juger non la qualité des soins mais la pertinence des dépenses engagées.

L'une des conclusions les plus claires est que la direction des hôpitaux doit être confiée aux professionnels, médecins et infirmières, et non à des personnels administratifs.

Le PMSI, le programme de médicalisation des systèmes d'information, qui a été obtenu à des prix prohibitifs...

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