Intervention de Marcel Rainaud

Réunion du 3 novembre 2009 à 9h30
Questions orales — Décentralisation et finances locales

Photo de Marcel RainaudMarcel Rainaud :

Madame la secrétaire d'État, comme nombre de mes collègues parlementaires et membres d’exécutifs locaux, je suis inquiet après avoir entendu les déclarations du Chef de l’État sur l’avenir de l’organisation territoriale.

Jusqu’à présent, la décentralisation a représenté un formidable mouvement.

Elle a donné plus de liberté aux territoires pour s’administrer eux-mêmes.

Elle a permis l’éclosion d’une démocratie locale vivante, louée unanimement, y compris par ceux qui, au début, en étaient les détracteurs.

Elle a rendu possible l’instauration d’un dialogue, riche et constructif, entre des élus de proximité porteurs de projets et une population attachée à la souveraineté que la décentralisation lui a apportée.

Aujourd’hui, le contexte dans lequel se déroule le débat sur l’organisation territoriale et la fiscalité marque une rupture avec l’esprit de la décentralisation.

Ici même, il a été affirmé que le maintien de l’autonomie financière des collectivités territoriales constituait l’un des principes dont le Gouvernement garantirait le respect. Nous devons être inflexibles sur la question.

Or force est de constater que cet engagement est d'ores et déjà bafoué. Il suffit, pour s’en convaincre, d’examiner les sommes dues par l’État aux collectivités.

Pour le département de l’Aude, sur l’année 2008, les charges non compensées par l’État sont de 10 millions d’euros au titre du RMI, de 4, 8 millions d’euros au titre de la prestation de compensation du handicap, de 24 millions d’euros pour l’APA, de 2, 4 millions d’euros pour les personnels TOS des collèges ; et je n’évoque même pas la situation des personnels routiers ! Cela représente, au total, plus de 41 millions d’euros de charges non compensées sur 2008.

C’est autant d’argent qui ne sera pas injecté dans l’économie audoise, par le biais d’investissements directs ou d’aides aux collectivités. Ce sont autant de coupes qui seront opérées dans les programmes d’équipements, pourtant ô combien nécessaires, dans l’aide apportée aux communes et aux associations, notamment pour la culture et le sport.

Quand la commande privée marque le pas, l’économie de proximité a besoin d’une commande publique dynamique. C’est la raison pour laquelle nombre de collectivités territoriales ont contractualisé avec l’État pour bénéficier du remboursement anticipé de la TVA.

Est-il besoin de rappeler, ici, que 75 % de l’investissement public est réalisé par les collectivités territoriales ? Notre économie est trop dépendante de l’investissement public, en particulier en termes d’emplois, pour que nous assistions sans rien faire à cette lente asphyxie financière des collectivités locales.

La discussion, au Sénat, sur la réforme de l’organisation territoriale ou de la fiscalité locale ne saurait s’engager sans que l’État accepte de reconnaître ses dettes à l’égard des collectivités.

Au regard de la situation extrêmement délicate du budget de l’État, nous pourrions accepter de faire le deuil des années passées, et ce depuis 2004. Mais nous attendons que le Gouvernement prenne l'engagement qu’à compter de ce jour le remboursement des dépenses réelles devienne la règle, une fois pour toutes. Il s’agit d’une mesure vitale, pour rendre nos budgets locaux réalisables et pour sauvegarder le dynamisme économique de nos territoires.

Madame la secrétaire d'État, quelles initiatives le Gouvernement entend-il prendre pour remédier à cette situation ?

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