Intervention de Patricia Schillinger

Réunion du 27 juin 2005 à 15h00
Services à la personne et mesures en faveur de la cohésion sociale — Article 1er

Photo de Patricia SchillingerPatricia Schillinger :

Cet amendement pose sous un nouvel angle la question des objectifs assignés à ce projet de loi.

Nous avons dit notre inquiétude sur l'organisation du secteur, que ce soit sur la structure de l'offre ou sur la structure territoriale.

Nous abordons maintenant un autre aspect, l'emploi, qui est fondamental au moins à deux titres : le nombre de créations d'emplois qu'il est réaliste d'envisager et les caractéristiques de ces emplois ; au travers de ces caractéristiques se pose la question de savoir si le projet de loi est de nature à induire une amélioration de la qualité des services aux personnes.

S'agissant tout d'abord du nombre d'emplois, il est d'ores et déjà évident que les 500 000 emplois qui nous sont annoncés seront pour beaucoup des emplois à temps partiel. Si l'on peut imaginer et espérer que, dans le cadre des entreprises et des associations, la durée du travail pourra approcher le temps plein, le gré à gré que le projet de loi facilite pour toutes les catégories de services ira en sens inverse. Nous allons donc vers un développement du travail à temps partiel, qui touchera le plus souvent des femmes peu qualifiées.

En ce qui concerne les salaires, ils demeurent très faibles dans ces secteurs d'activité, comme pour les assistantes maternelles, dont le salaire net est de 542 euros par mois ; on dépasse rarement 1 000 euros par mois.

Quant à la professionnalisation, elle montre encore de réelles carences malgré les efforts consentis par les grandes organisations associatives. Il est vrai, et c'est un effet pervers supplémentaire du temps partiel et éclaté, qu'il est très difficile de réunir des salariés, ne serait-ce que quelques heures, pour les informer et pour les former. Bien qu'il semble procurer une plus grande disponibilité, le temps partiel est en fait, dans ces secteurs, un facteur de disponibilité faible et aléatoire. C'est encore plus vrai si l'on inclut dans le temps global le temps où le salarié est pris par les transports entre deux prestations.

Les filières de formation initiale et continue pour le secteur des services à la personne sont encore à l'état embryonnaire. Je rappelle en outre que moins de 6 000 personnes ont eu accès à la validation des acquis de l'expérience depuis l'instauration de ce dispositif.

On comprend, dans ces conditions, la faible attractivité de ce secteur, qui représente pourtant - et le Gouvernement l'a bien vu - un vrai gisement d'emplois en raison de la demande exponentielle de services aux personnes.

Mais, madame la ministre, si vous ne donnez que des salaires faibles pour des emplois pénibles et précaires aux horaires impraticables, vous aurez les plus grandes difficultés à recruter et à créer des emplois. A moins, bien entendu, que vous n'utilisiez les mesures coercitives contre les chômeurs édictées dans la loi de programmation pour la cohésion sociale ! Mais il est douteux que cela soit réellement opportun quand il s'agit de services aux publics les plus fragiles.

Les échos qui nous reviennent montrent cependant que c'est de ce secteur que les officines privées auxquelles l'ANPE sous-traite maintenant, moyennant finances, des contingents de chômeurs attendent les profits les plus rapides. Que ce soit du point de vue des salariés ou de celui des personnes fragiles, cela ne laisse pas d'être inquiétant !

Ces emplois mal rémunérés, pénibles et précaires, aux horaires anarchiques, ce sont bien aujourd'hui, trop souvent, les emplois de services, surtout dans le cadre du gré à gré.

Il est clair que le moyen de remédier à cette situation, c'est de développer des formations qualifiantes obligatoires, tant initiales que continues. Or, à l'heure actuelle, l'accès à la formation n'est pas obligatoire et les salariées ne touchent aucune rémunération à ce titre.

On peut sans doute imaginer un progrès dans le cadre du DIF, le droit individuel à la formation, mais ce droit ne peut s'exercer qu'au prorata du temps de travail ; nous sommes donc renvoyés au problème du temps partiel et de la précarité.

La question de la qualité des services va donc continuer de se poser, mais avec encore plus d'acuité.

C'est pourquoi nous proposons, par cet amendement, que les critères de qualité, qui ne sont que mentionnés au deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 129-1, soient précisés en ce qui concerne les salariés. C'est en effet d'eux, de leurs qualités et de leur dévouement que dépendra la qualité du service.

Nous demandons par conséquent que l'agrément soit conditionné à la garantie qu'un nombre d'embauches suffisant sera effectué pour le nombre de prestations à réaliser, que les salariés bénéficieront des formations nécessaires et qu'ils pourront envisager, s'ils le souhaitent, une évolution de leur carrière. Les modalités de ces principes généraux sont bien sûr du ressort de la négociation collective, mais il est important de préciser ces conditions fondamentales de l'agrément.

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