Intervention de Thierry Foucaud

Réunion du 23 juin 2011 à 22h00
Loi de finances rectificative pour 2011 — Article 24

Photo de Thierry FoucaudThierry Foucaud :

Si M. le ministre daignait nous répondre un peu plus souvent, nous aborderions le débat d’une autre manière !

La présence de cet article est pour le moins étonnante, à ce stade de la discussion.

Car enfin, mettre en place un dispositif qui tend à faire du produit de la condamnation de l’État pour non-respect de ses obligations, une source de financement, cela mérite réflexion !

Pour autant, la vraie question posée par les problématiques du logement social dans notre pays, c’est celle de l’insuffisance des constructions neuves, une insuffisance renforcée, d’ailleurs, par la réforme de l’épargne populaire et singulièrement du livret A.

Le livret d’épargne favori des Français, le livret A, a quitté il y a maintenant deux ans l’escarcelle de La Banque postale, de la Caisse d’épargne et du Crédit Mutuel.

Le livret A ayant été « libéralisé » dans le cadre de la loi de modernisation de l’économie, ce changement de statut n’a pas été sans conséquences.

Hier, l’ensemble des dépôts des Français étaient gérés par la Caisse des dépôts et consignations. L’établissement public avait ensuite la charge de prêter cet argent aux organismes de logements sociaux, pour les aider à mener à bien leurs projets de construction, d’achat et de rénovation. Aujourd’hui, une part croissante des dépôts échappe à toute centralisation.

Une telle situation était prévisible et nous vous avions alertés sur cette question à l’époque.

Pourtant, aujourd’hui, et au regard de la crise du logement que traverse notre pays, nous ne pouvons plus nous permettre ce mauvais usage de l’épargne populaire.

En effet, les besoins en logements ne sont pas moins importants qu’en 2009 et, parallèlement, cette ressource n’est pas négligeable, puisque les dépôts cumulés représentaient une manne de près 204, 3 milliards d’euros en avril dernier, soit le niveau le plus élevé jamais observé depuis le lancement du livret, il y a près de deux cents ans, et plus de 260 milliards d’euros s’il on ajoute les dépôts des livrets ex-CODEVI !

Au total, compte tenu des normes mises en œuvre, ce sont 80 milliards d’euros qui échappent à toute centralisation et qui restent dans les mains des collecteurs – en fait, les collecteurs autres que les réseaux historiques de La Poste et des Caisses d’épargne.

Le Gouvernement, au travers d’un décret récent, vient d’ailleurs de donner une chance supplémentaire à la dispersion de cette collecte, en fixant à 65 % le taux de centralisation, et cela en contrepartie, évidemment, d’une légère réduction du taux de rémunération de la collecte et des réseaux collecteurs. Cette mesure, bien entendu, frappera surtout ceux-là mêmes qui se sont vu imposer les obligations les plus fortes, à savoir les réseaux historiques.

Concrètement, alors que l’on détermine dans cet article la manière dont on va utiliser les quelques centaines de milliers d’euros que représentent les astreintes de l’État au regard du droit au logement opposable, on laisse filer dans les doigts des banquiers des milliards d’euros – de l’ordre de 10 à 12 milliards, tout de même ! – dont nous aurions bien besoin pour mener une véritable politique du logement social.

Nous rejetons cette politique de Gribouille et de dilapidation de l’épargne populaire, d’autant que la survie du service postal de proximité est, pour une bonne partie, liée à la rémunération de La Poste pour la collecte du livret A.

Telles sont les observations que nous souhaitions vous livrer, mes chers collègues, à ce stade de la discussion.

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