Intervention de Bernard Saugey

Réunion du 29 mars 2011 à 14h30
Simplification et amélioration de la qualité du droit — Discussion d'une proposition de loi en deuxième lecture

Photo de Bernard SaugeyBernard Saugey, rapporteur :

Vous en parlerez dans quelques instants, mon cher collègue !

Je me réjouis de l’abandon, par l’Assemblée nationale, de la réforme consistante du droit de préemption qu’elle avait promue. Ce sujet fera l’objet d’un texte spécifique, pour pouvoir, le cas échéant, être examiné par le Parlement de manière approfondie et sereine. L’Assemblée nationale s’est ralliée à ce point de vue.

Nos collègues députés ont souscrit aux innovations introduites par le Sénat pour clarifier le droit applicable aux élections se déroulant à l’étranger. Sur l’initiative de notre collègue Richard Yung, nous avons précisé que les personnes élues à l’étranger pourraient obtenir communication et copie des listes électorales. Nous avons aussi ouvert la voie à l’organisation d’une véritable campagne électorale à l’étranger, en permettant aux candidats aux élections hors du territoire national de mener des actions de propagande électorale.

Je me félicite du choix du Gouvernement, qui s’était initialement opposé à l’intégration de ces dispositions au sein de la présente proposition de loi, de finalement les approuver.

La commission des lois a naturellement maintenu les suppressions effectuées à l’Assemblée nationale par coordination avec l’adoption, dans d’autres textes, des dispositions concernées.

En revanche, le texte, tel qu’il nous revient de l’Assemblée nationale, comporte encore plusieurs pierres d’achoppement.

Il s’agit, en premier lieu, de rétablissements allant au-delà de la simplification.

Sans préjuger de leur bien-fondé, le Sénat, rappelons-le, a considéré que certaines dispositions excédaient l’objet affiché par l’intitulé de la proposition de loi et méritaient un examen particulier. En conséquence, sur l’initiative de la commission des lois, il les a supprimées.

C’est ainsi le cas de l’article 29 concernant la CNIL ou des articles 29 bis à 29 nonies, relatifs au régime des fichiers de police.

À la demande du Gouvernement, l’Assemblée nationale a repris la règle abrogeant automatiquement, au bout de cinq ans, toute disposition législative instituant la remise périodique d’un rapport au Parlement par le Gouvernement. Nous l’avions formellement rejetée, au motif qu’elle portait atteinte à la mission de contrôle et d’évaluation du Parlement, reconnue par la Constitution, et qu’elle constituerait une « prime » aux administrations récalcitrantes à réaliser les rapports demandés par les assemblées.

L’Assemblée nationale a rétabli l’article 8, qui instaure une procédure préalable de « consultation ouverte » permettant de recueillir les observations de toutes les personnes concernées par l’édiction d’un acte réglementaire.

En première lecture, notre assemblée avait estimé que ce dispositif visait à « court-circuiter » des commissions que le pouvoir réglementaire n’osait pas supprimer ou réformer et discréditait les autres.

Au nombre des suppressions non justifiées figure celle de l’article 1er A, adopté par le Sénat sur l’initiative de notre collègue Alima Boumediene-Thiery : il prévoit l’inscription sur l’acte de décès, le cas échéant, de l’identité de la personne à laquelle le défunt était lié par un pacte civil de solidarité.

Il en est de même de celles de l’article 6 bis A, dû à notre collègue Jean-Pierre Sueur, relatif à la copropriété partagée – certains parleraient de « time share » – et de l’article 28 ter A de notre collègue Joëlle Garriaud-Maylam sur le droit au compte des Français de l’étranger.

De la réforme du régime des groupements d’intérêt public, les GIP, reste en discussion un assouplissement proposé par le Sénat et refusé par l’Assemblée nationale : la faculté, pour les collectivités territoriales, de recourir à un GIP pour exercer en commun des activités qui peuvent être confiées à un groupement de collectivités territoriales.

Il me faut, à présent, évoquer des dispositions nouvelles introduites en deuxième lecture sur l’initiative du Gouvernement, même si elles peuvent être comprises comme des mesures de simplification et de clarification.

Il s’agit, en particulier, de la transposition d’une directive sur les obligations comptables des sociétés qui établissent des comptes consolidés et de plusieurs modifications de la procédure de sauvegarde des entreprises, notamment de la sauvegarde financière accélérée, créée il y a moins de six mois sur l’initiative du président de notre commission, Jean-Jacques Hyest.

Sur ce dernier point, en accord avec M. Hyest, je vous proposerai une meilleure rédaction, plus lisible et plus opérante, que celle qui a été insérée dans le texte sur l’initiative du Gouvernement.

Pour l’essentiel, la commission des lois a confirmé les positions arrêtées lors de la première lecture pour contester l’insertion de plusieurs articles dans la présente proposition de loi.

Avant de conclure, je voudrais attirer une nouvelle fois l’attention du Gouvernement sur certaines pratiques qui ne sont pas de bonne méthode législative : l’adoption, dans l’urgence de l’actualité, de dispositifs insuffisamment réfléchis et évalués oblige trop souvent le Parlement à les corriger, parfois quelques courtes semaines après leur adoption. §La deuxième lecture du projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité nous apportera bientôt une illustration de ce fait.

Cette désinvolture à l’égard de la valeur de la norme est-elle due au « crédit excessif » que les Français lui accordent, selon la réflexion figurant dans le dernier rapport du Médiateur de la République ? Comme le souligne en effet cruellement celui-ci, « alors que la loi devrait être un élément de stabilité et de pondération, paradoxalement, par la superposition de textes, elle devient un véritable facteur d’instabilité ». Mes chers collègues, il nous appartient d’y remédier afin de rendre à la loi toute sa force régulatrice.

Pour l’heure, sous le bénéfice de l’ensemble de ces observations, la commission des lois soumet à la délibération du Sénat le texte qu’elle a établi.

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