Les retraites chapeaux, dont bénéficient à vie les dirigeants des grandes entreprises françaises, ne doivent pas survivre à la réforme des retraites, puisque vous semblez plaider pour plus d’équité.
Le Gouvernement était, au mois de juin dernier, tenté d’inclure le sujet dans son projet de réforme, estimant judicieux que les grands patrons donnent aux Français « l’exemple des efforts à faire ».
Déjà, en 2003, lors de la précédente réforme des retraites, M. Fillon, alors ministre des affaires sociales, avait proposé d’abroger ces retraites chapeaux.
Devenu Premier ministre, M. Fillon a défendu le principe d’une « taxation confiscatoire », une voie retenue dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 : le doublement de la cotisation patronale et un prélèvement additionnel de 30 % sur les sommes excédant 276 960 euros. Pour lui, un mécanisme qui consiste à faire financer par une entreprise les retraites de quelques hauts dirigeants n’est « pas acceptable ».
Nous vous demandons s’il est acceptable que, à la suite de la crise financière, les entreprises privées aient été subventionnées par le Fonds stratégique d’investissement, exclusivement alimenté par des fonds publics, à hauteur de 21 milliards d’euros, sans qu’aucun suivi de l’utilisation de ces aides soit mis en œuvre, ainsi que l’a dénoncé la Cour des comptes. Cela n’a pas empêché les 680 000 licenciements intervenus en 2009 !
Nous vous demandons s’il est acceptable que les salariés paient cette réforme, alors que l’aggravation conjoncturelle du déficit du régime général, de 26, 8 milliards d’euros, et de celui de la Caisse nationale d’assurance vieillesse et du Fonds de solidarité vieillesse, de 9, 3 milliards d’euros, résulte essentiellement de la crise.
Nous vous demandons s’il est acceptable que les salariés, déjà durement touchés par la crise, supportent 85 % du poids de cette réforme, alors que, selon les estimations les plus récentes du Gouvernement, datées d’août 2009, 761 cadres dirigeants d’entreprises, en France, bénéficient et continueront à bénéficier des régimes d’exception que sont les retraites chapeaux.
Il s’agit d’un dispositif dont le nombre des bénéficiaires est étendu : il concerne deux millions de personnes environ !
Dans une étude publiée au début de 2010, le cabinet de conseil Hewitt précise que la quasi-totalité des entreprises françaises du CAC 40 possèdent des systèmes de retraites chapeaux. Je ne citerai que deux exemples : la rente attribuée à Henri Proglio, dans le cadre de ses anciennes fonctions chez Veolia, estimée à 650 000 euros, et la rente à vie de Lindsay Owen-Jones, l’ex-PDG de L’Oréal, de 3, 4 millions d’euros annuels.
Cette année encore, selon InvestorSight, autre cabinet de conseil en communication financière, vingt retraites chapeaux ont été soumises au vote des actionnaires lors des assemblées générales du printemps.