Intervention de Bernard Vera

Réunion du 11 décembre 2006 à 15h00
Loi de finances pour 2007 — Article additionnel avant l'article 40

Photo de Bernard VeraBernard Vera :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il s'agit d'un amendement de fond, tendant à proposer la suppression du dispositif du bouclier fiscal voté dans le cadre de la seconde partie de la loi de finances pour 2006 et qui consiste à masquer, sous des apparences de prise en compte d'un prétendu « ras le bol » des contribuables, une réforme fiscale qui ne dit pas son nom.

Or l'objet de cette réforme fiscale est bien connu : parvenir coûte que coûte à réduire le produit de l'impôt de solidarité sur la fortune, l'ISF.

Comment faire croire qu'un plafonnement de la contribution fiscale à 60 % du revenu fiscal de référence, quand on a décidé de réduire à 40 % le taux maximal d'imposition sur le revenu, permettra à quelques personnes âgées nécessiteuses de voir disparaître de leurs obligations fiscales le poids exorbitant des impôts locaux ?

C'est le fameux pâté d'alouette, dont la recette est : un cheval, une alouette ! L'alouette, ce sont les quelques dizaines ou centaines d'euros qui seraient rendus à quelques contribuables modestes. Le cheval, c'est la réfaction importante sur le total de l'impôt sur le revenu, de la taxe d'habitation, de la taxe foncière sur les propriétés bâties, et de l'ISF qui frappe quelques familles très fortunées.

Ce sont ces contribuables qui bénéficieront de manière sensible et déterminante des effets du bouclier fiscal.

Nous avons quelque peine à comprendre qu'il nous faille faire droit, dans le corpus légal même du droit fiscal français, à la priorité selon laquelle, passée une certaine limite, l'impôt dû ne serait plus supportable.

Combien de personnes seront-elles concernées par ces 400 millions de remise d'impôt ? Selon les estimations, il serait question de 93 000 personnes, ce qui situe le gain moyen à environ 4 300 euros par foyer fiscal.

À la vérité, il faudrait plutôt s'interroger sur le gain médian, puisqu'il y a fort à parier que 80 % ou plus des personnes concernées ne toucheront in fine que le remboursement de leurs impositions locales, soit, d'après une estimation rapide, 1 500 euros par foyer.

Cela signifie que 100 millions à 120 millions d'euros de bouclier fiscal seront ainsi remboursés et que 20 % des ménages bénéficiaires toucheront donc 280 millions à 300 millions d'euros de remboursement. En ce cas, la moyenne du retour sur imposition se situe à plus de 15 000 euros minimum, voire davantage si l'on prend en compte les conséquences réelles du dispositif qui nous est soumis dans quelques cas bien spécifiques.

D'ailleurs, la presse ne s'y est pas trompée, puisque l'édition de fin de semaine d'un quotidien économique a pu titrer récemment : « Utiliser le bouclier fiscal pour réduire l'ISF » !

Ledit bouclier fiscal n'aura finalement de sens que pour des patrimoines atteignant environ 90 millions d'euros.

Le droit fiscal ne peut selon nous évoluer sur des cas d'espèce et il ne doit pas faire de l'exploitation de situations extrêmement marginales la règle imposée à tous.

C'est pourtant ce qui se passe avec ces articles du code général des impôts dont nous ne cessons de nous demander ce qu'ils viennent faire dans notre législation.

Nous ne pouvons donc, mes chers collègues, que vous inviter à adopter cet amendement.

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