Intervention de Nicolas About

Réunion du 11 décembre 2006 à 22h00
Loi de finances pour 2007 — Articles additionnels après l'article 40 undecies

Photo de Nicolas AboutNicolas About :

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, l'amendement que je vous présente a pour objet de proposer une perspective de réforme à la fois raisonnable et crédible des systèmes de retraite spéciaux.

J'ai en effet l'intime conviction que nous ne pouvons plus continuer à faire l'impasse sur cette question taboue, pour des motifs divers, je pense, notamment, à la crainte de mouvements sociaux dans les grandes entreprises publiques.

À la veille des échéances électorales, il est, je crois, nécessaire que le Parlement réfléchisse à l'avenir de ces régimes, ne serait-ce que dans le souci d'éclairer nos concitoyens.

Le constat est connu de tous, ce qui ne veut pas dire qu'il soit reconnu par tous.

Dans son rapport de septembre 2006, la Cour des comptes l'a rappelé : les systèmes de retraite spéciaux sont à la fois coûteux, très avantageux pour leurs bénéficiaires et financés essentiellement par les contribuables, les usagers et les autres assurés sociaux. La Cour les qualifie d'ailleurs de « régimes rétributifs » pour mieux souligner le poids de ces spécificités.

Or leurs perspectives financières sont insoutenables. Pour la RATP, par exemple, le Conseil d'orientation des retraites prévoit un triplement du montant des retraites à servir à l'horizon 2050. Comment peut-on raisonnablement envisager de financer une telle augmentation ?

Je plaide donc pour une réelle volonté politique de réforme, une réforme juste, respectueuse des droits acquis, mais également équitable pour les générations futures. La seule solution qui me paraisse envisageable en pratique consiste à mettre en extinction progressive, pour l'avenir - et pour l'avenir seulement - la branche vieillesse de tous ces régimes spéciaux.

Le présent amendement vise, en conséquence, à affilier au régime général toutes les personnes qui seront embauchées à partir du 1er janvier 2008 par EDF ou GDF, par l'Opéra de Paris, par la Banque de France ainsi que par la RATP et la SNCF, notamment.

Rien n'interdira, bien sûr, à ces différents régimes de mettre en place un complément de retraite, sous forme d'un système additionnel par capitalisation. C'est d'ailleurs ce que font de nombreuses entreprises du secteur privé, par exemple dans l'industrie pétrolière. Mais ce qui changera surtout, c'est que ce supplément sera financé sur les ressources propres des entreprises publiques, en toute transparence, et sans qu'il soit fait appel, comme c'est le cas aujourd'hui, à la solidarité nationale.

Pour prendre une image, il s'agit non pas de remettre en cause des situations acquises, mais simplement de « fermer le robinet » des régimes spéciaux, et de le faire vite, car la pratique montre qu'il faut soixante ans, et parfois même quatre-vingts ans, pour placer totalement en extinction un système de retraite.

Nous devons être lucides et convenir que la prochaine réforme des retraites ne peut en aucune manière éviter de traiter la question des assurés sociaux des régimes spéciaux.

Cette réforme a été reportée par deux fois, en 1993 et en 2003 ; nous devons désormais nous y atteler.

Lors du débat sur la mission « Régimes sociaux et de retraite », le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, Dominique Leclerc, a d'ailleurs très bien montré que les ressortissants de certains de ces régimes sont plus longtemps en retraite qu'en activité !

Or qui finance cette générosité à crédit, sinon les jeunes générations ? Et je n'insisterai pas sur les cotisations des salariés, qui ne représentent que 7 % du financement des prestations de retraite versées aux agents de la SNCF et 13 % à la RATP. Dans ces conditions, est-il encore possible de parler de système par répartition ?

Les dépenses à venir sont colossales : 108 milliards d'euros d'engagements de retraite pour la SNCF, 21 milliards d'euros pour la RATP, 9 milliards d'euros pour la Banque de France, 25 milliards d'euros pour les mines, 38 milliards d'euros pour les marins, plus de 90 milliards d'euros pour les industries électriques et gazières !

Pour toutes ces raisons, la mise en extinction des régimes spéciaux est une impérieuse nécessité. Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter cet amendement. Ce sera d'ailleurs, à ma connaissance, la première fois que cette question sera soumise au vote du Parlement depuis 1945.

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