Intervention de Frédéric Mitterrand

Réunion du 2 décembre 2010 à 15h00
Loi de finances pour 2011 — Compte spécial : avances à l'audiovisuel public

Frédéric Mitterrand, ministre :

Madame Morin-Desailly, l’extension de cette mesure dépend aujourd’hui de la décision que le Parlement prendra dans sa grande sagesse, compte tenu des contraintes imposées par le budget triennal de l’État.

Sachez que le Gouvernement aborde cette question sereinement, avec pragmatisme, sans dogmatisme. En effet, indépendamment de la question du moratoire, d’importants changements ont d’ores et déjà vu le jour. Un virage éditorial a été amorcé, favorisant une offre culturelle plus dense et plus créative. La création d’une entreprise unique a, par ailleurs, permis de conjuguer les forces et de mutualiser les compétences.

Au-delà de la réunion juridique, le nouveau président-directeur général du groupe France Télévisions entend désormais proposer une organisation moins centralisée et renforcer l’identité éditoriale des chaînes : il s’agit non pas d’une remise en cause de la loi, mais bien d’un aménagement au service de la qualité et de la diversité, fort bien accueilli par les producteurs et les créateurs, qui s’y retrouvent bien mieux que dans l’organisation précédente.

Dans le cadre de cette ambition modernisatrice, plus de 100 millions d'euros seront consacrés au passage à la TNT en vue de l’extinction progressive de la diffusion analogique des chaînes de télévision à la fin de l’année 2011. C’est une véritable « révolution de l’image », équivalente au passage à la couleur, une révolution que mon ministère entend accompagner fortement, sans négliger les Français les plus modestes et les plus fragiles ; je pense notamment aux personnes âgées et aux foyers isolés. J’ai moi-même suivi le processus d’installation de la télévision numérique terrestre dans plusieurs régions.

Je porte également une attention particulière à l’outre-mer, de manière à y protéger les chaînes privées locales, qui jouent un rôle considérable dans le lien social. À cette fin, un fonds d’aide spécial a été institué.

Les dotations pour 2011 destinées aux organismes de l’audiovisuel public autres que France Télévisions – l’INA, Radio France, Arte et Audiovisuel extérieur de la France –- sont en progression. Elles permettent de financer leurs orientations stratégiques tout en respectant les contrats d’objectifs et de moyens signés avec l’État.

En ce qui concerne Audiovisuel extérieur de la France, vous l’avez souligné, monsieur Kergueris, les synergies commencent à porter leurs fruits. J’en veux pour preuve le lancement de France 24 en langue arabe, 24 heures sur 24, qui s’est appuyé sur l’expertise de radio Monte Carlo Doualiya, dont on a rappelé que le grand retour est programmé. Autre illustration de cette stratégie concertée : RFI déménagera à la fin de l’année 2011 pour se rapprocher de France 24.

Je souhaite également rassurer tous ceux d’entre vous qui m’ont interrogé sur le contrat d’objectifs et de moyens d’Audiovisuel extérieur de la France : celui-ci devrait être finalisé et transmis au Parlement avant la fin de cette année.

Monsieur Duvernois, s’agissant de l’exercice conjoint de la tutelle de l’audiovisuel extérieur de la France entre le ministère de la culture et de la communication et le ministère des affaires étrangères, croyez bien que la Rue de Valois pèse de tout son poids et joue tout son rôle dans cette cotutelle.

Je n’oublie pas la place très particulière que les radios associatives occupent dans le paysage radiophonique français. Le Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, dont les aides profitent à plus de 600 radios, bénéficiera de 29 millions d’euros, soit 2 millions d’euros de plus qu’en 2009.

Mesdames, messieurs les sénateurs, qu’il s’agisse de la lecture, de la musique ou des médias, c’est bien à une véritable révolution des pratiques culturelles que l’on assiste aujourd’hui. L’individualisation et l’atomisation des pratiques en ligne du lecteur, de l’auditeur, du spectateur, sa solitude, son manque de repères parfois, s’accompagnent également d’une liberté nouvelle, celle de pouvoir accéder à des contenus de tous horizons, venus du monde entier.

Pour agir dans un environnement aussi instable, aussi mouvant, à l’évolution aussi rapide, la politique du ministère de la culture et de la communication doit éviter tout dogmatisme : nous devons faire du sur-mesure, nous devons agir au cas par cas, nous devons écouter.

Cette transformation en profondeur de nos modes d’action en est encore à ses débuts. II s’agit de faire en sorte que nous puissions mieux nous approprier notre futur, en préservant et en valorisant notre patrimoine, en favorisant toujours plus la création artistique et nos médias dans un contexte concurrentiel sur lequel il faut anticiper. Pour cela, il faut être capable de faire preuve d’ambition et il faut savoir se donner les moyens de se projeter dans vingt ou trente ans.

Comme le disait récemment l’historien Pascal Ory, le « pessimisme culturel est éternel » : ce n’est pas lui qui m’anime au ministère de la culture et de la communication, bien au contraire. Pour servir notre création, nos médias et nos industries culturelles, l’heure est aujourd’hui à la prospective, à l’écoute et à l’inventivité.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion