Intervention de Catherine Procaccia

Réunion du 2 décembre 2010 à 15h00
Loi de finances pour 2011 — Travail et emploi

Photo de Catherine ProcacciaCatherine Procaccia :

Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la mission « Travail et emploi » constitue l’un des principaux budgets d’intervention de l’État. Au sein de celle-ci, deux programmes sont plus spécifiquement dédiés à l’emploi, le programme 102, Accès et retour à l’emploi, et 103, Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi.

Au total, ils sont en augmentation de 7, 52 % pour les autorisations d’engagement et de 1, 22 % pour les crédits de paiement.

L’effort de l’État en faveur de l’emploi est donc confirmé, malgré le contexte de contraintes budgétaires ; il s’agit de prendre le relais du « plan de relance » qui a protégé notre économie.

Plan de relance, fonds d’investissement social, plan d’urgence pour l’emploi des jeunes, plan « Agir pour la jeunesse », depuis deux ans, le Gouvernement a ainsi tenté de préserver nos compatriotes du choc de la crise. Cette détermination a été payante, car les outils mobilisés en faveur de la politique de l’emploi ont atténué la violence du choc avant de permettre, aujourd’hui, de stabiliser la situation.

Selon les derniers chiffres publiés par la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, l’activité économique a accéléré au deuxième trimestre, donnant des espoirs de sortie de crise. Ainsi, 46 000 postes ont été créés et le taux de chômage, en baisse de 0, 2 point par rapport au trimestre précédent, s’est établi à 9, 3 %.

La mise en œuvre des différentes mesures de lutte contre le chômage semble donc produire ses effets et il faut, selon nous, continuer ces efforts.

À l’occasion de l’examen de ce projet de budget, je souhaite faire plusieurs remarques.

J’aborderai, tout d’abord, les publics visés. Afin d’aider les publics les plus éloignés de l’emploi, 340 000 nouveaux contrats aidés non marchands et 50 000 nouveaux contrats aidés marchands sont financés pour 2011, moyennant un coût de 2, 1 milliards d’euros, contre 1, 7 milliard en 2010.

Je tiens aussi à souligner l’effort en direction des entreprises pour le financement de l’aide à l’embauche des seniors.

L’accès à l’emploi des jeunes demeure une priorité gouvernementale, concrétisée par des crédits importants alloués aux contrats d’insertion dans la vie sociale, au fonds pour l’insertion professionnelle des jeunes, aux actions de parrainage, aux écoles de la deuxième chance, entre autres.

Ces dispositifs s’adressent tout particulièrement aux jeunes non qualifiés ou résidant dans des zones urbaines sensibles, qui ne sont pas pris en charge par d’autres dispositifs.

Vous comprendrez cependant, mes chers collègues, que je veuille dire quelques mots sur le service public de l’emploi, puisque j’en fus le rapporteur au Sénat.

Un peu plus de dix-huit mois après sa création et dans un contexte très difficile, Pôle emploi fonctionne, certes parfois avec difficulté dans certains bassins d’emplois, mais en maintenant son effort de prise en charge et d’accompagnement des chômeurs. Tout comme se maintient, d’ailleurs, la subvention de l’État, à hauteur de 1, 36 milliard d’euros.

Selon une grande consultation auprès de 500 000 demandeurs d’emploi, rendue publique le mois dernier, 66 % des personnes interrogées sont satisfaites des services de Pôle emploi. Les demandeurs d’emploi estiment que 69 % des démarches sont plus simples qu’avant la fusion et 67 % d’entre eux les jugent également plus rapides. C’est donc que le but de simplification que nous avions assigné à Pôle emploi est en grande partie atteint.

Vous avez déclaré, monsieur le ministre, vouloir améliorer le dispositif en vous fondant sur les résultats de la consultation des demandeurs d’emploi, afin de ne pas en rester au stade de la réflexion interne.

Pourriez-vous nous dire quelles sont vos pistes de travail, mais aussi nous parler de l’évolution annoncée des effectifs, alors que la diminution du nombre de chômeurs n’est peut-être pas pérenne ?

Je veux aussi évoquer les maisons de l’emploi. Je me permets ici de rappeler ma position en tant que rapporteur du texte sur la fusion ANPE-UNEDIC, qui n’est pas forcément en complète adéquation avec celle d’un certain nombre de mes collègues, très attachés à cet outil de proximité. Certains se sont exprimés sur ce sujet juste avant moi.

Si certaines maisons de l’emploi complètent utilement l’action de Pôle emploi, elles n’ont ni la vocation ni la compétence pour s’y substituer. En outre, si certaines sont effectivement très opérationnelles, d’autres ont une activité très limitée. La loi que nous avions votée stipule clairement que ce sont celles qui « respectent les missions qui leur sont attribuées » qui « bénéficient d’une aide de l’État selon un cahier des charges » défini en Conseil d’État. Cette aide est fixée à 53 millions d’euros en crédits de paiement, au lieu de 95 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2010.

J’approuve donc le Gouvernement qui veut rationaliser l’ensemble de ses dépenses, d’autant que l’Assemblée nationale a généreusement abondé leurs crédits de 10 millions d’euros supplémentaires !

Monsieur le ministre, je pense que mes collègues aimeraient, comme moi, savoir comment vous entendez approcher l’écart de performance entre chacune des maisons de l’emploi et mieux mesurer leur rapport efficacité-coût, en tenant compte, naturellement, de la situation hétérogène des bassins d’emplois.

Enfin, s’agissant du transfert des personnels de l’Association pour la formation professionnelle des adultes, l’AFPA, même si je présidais la commission spéciale du Sénat chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, je n’ai pas le souvenir que nous ayons évoqué l’hypothèse d’un transfert de personnes plutôt que de salaires. J’ai donc relu le texte de loi : hormis le transfert des biens, rien n’y figure sur ce point ! Pouvez-vous m’expliquer, monsieur le ministre, ce qui amène les services de l’État à penser que 900 personnes peuvent être transférées et rémunérées, sans difficulté pour Pôle emploi ?

Je voudrais aussi évoquer la volonté gouvernementale de réaliser des économies avec la disparition de certains dispositifs d’exonération. Cette démarche est louable, mais je m’inquiète, comme d’autres, de ses conséquences sur les services à la personne.

L’article 90 du projet de loi de finances supprime en effet l’abattement de 15 points de cotisation patronale pour les particuliers employeurs déclarant leurs salariés à domicile au régime réel.

Cette mesure me contrarie pour plusieurs raisons.

D’une part, les bénéficiaires risquent de préférer désormais le régime forfaitaire au régime réel, ce qui aura des conséquences sur la couverture sociale et les droits à pension des salariés concernés, qui sont très souvent des femmes. L’an passé, j’avais dénoncé le système de déductibilité fiscale de certains emplois à domicile comme celui du coach sportif. Mon exemple a fait florès. Mais ce type de mesure ne concerne que les emplois au réel, auxquels on ne veut pas mettre fin !

En revanche, nous devons penser aux femmes qui n’ont pas d’autre choix que de faire garder leurs enfants à domicile, en garde directe ou partagée, ainsi qu’à celles qui n’ont pas accès à une crèche ou à l’école maternelle avant que leurs enfants aient atteint l’âge de trois ans, voire trois ans et demi s’ils sont nés au premier semestre. Pour ces mères, la garde à domicile ou partagée est souvent la seule solution, particulièrement pour les femmes isolées. Certes, la déductibilité fiscale demeure. C’est heureux car, avec sa disparition, nous aurions vu des emplois maintenant déclarés rebasculer dans le travail « au noir ».

J’approuve donc les amendements déposés par notre rapporteur, ainsi que celui de Marie-Thérèse Hermange, qui sont très modérés.

Je vous proposerai un amendement, allant un peu moins loin, qui sera donc moins coûteux pour l’État, mais qui ne concerne que les gardes d’enfants.

Il est clair que l’article 90 donnera lieu à un échange intéressant.

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