Ma question s’adresse à notre ancienne collègue Valérie Létard et porte sur la situation des caisses d’allocations familiales et leurs moyens de fonctionnement pour remplir leurs missions de service public et de justice sociale auprès des usagers.
Depuis plusieurs mois, les allocataires subissent des retards inadmissibles dans le traitement de leurs dossiers entraînant souvent un paiement retardé des prestations dues, qui ajoute encore aux difficultés sociales quotidiennes que nombre d’entre eux rencontrent.
Plusieurs de mes collègues de différents départements ont déjà interpellé le Gouvernement sur ces retards de traitement des demandes de nos concitoyens.
La CAF de Rouen, par exemple, fréquentée quotidiennement par huit cents à neuf cents personnes, a dû fermer l’accueil du public un jour par semaine pour traiter ses dossiers en attente.
Dans le Val-de-Marne, pour tenter de résorber ses 230 000 dossiers en attente, la CAF a fermé ses guichets au public durant trois semaines, du 6 au 27 avril dernier.
En effet, à la situation déjà insatisfaisante, c’est-à-dire 136 000 pièces non traitées, soit un retard de deux mois, se sont ajoutés, en janvier, les ratés de la transmission automatique des ressources des familles par le biais des fichiers des impôts, engorgeant davantage encore, de façon dramatique, l’ensemble des services.
Aujourd’hui, l’accueil du public est partiellement remis en place avec une ouverture de trois jours sur cinq seulement. Cependant, il reste encore 110 000 dossiers en attente, ce qui équivaut à onze jours de retard, alors que, dans les prochains jours, la CAF du Val-de-Marne devra, à l’instar des autres CAF, faire face à la mise en œuvre du revenu de solidarité active, soit environ 80 000 dossiers pour le département, dont 50 000 demandes supplémentaires non encore connues de ses services.
Aussi, les files d’attente ne décroissent pas ; les conditions d’accueil sont déplorables pour les usagers, comme pour les personnels, dont certains se voient demander d’effectuer des heures supplémentaires chaque jour.
Nul doute que la suppression à l’échelon national de 10 000 postes en deux ans participe de cette situation et constitue, de mon point de vue, une limite évidente de la révision générale des politiques publiques, chère au Gouvernement, que l’on devrait plutôt appeler dans ce cas, « réduction » générale des politiques publiques.
Dès octobre 2008, les personnels de la caisse nationale et leurs représentants syndicaux avaient alerté sur les dangers de la réorganisation imposée par leur direction et sur les effets que cette réorganisation ne manquerait pas d’avoir, dans ces conditions, sur la dégradation du service rendu aux familles et le travail des personnels. Ils dénonçaient, notamment, le manque d’effectifs récurrent depuis plusieurs années. Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales confirme cette situation tendue, ajoutant que de nombreux salariés sont arrivés à saturation.
Dans un département comptant 325 000 allocataires, avec 8 000 dossiers nouveaux chaque jour, les 109 recrutements en remplacement des départs à la retraite et les 22 prévus pour la mise en place du RSA ne suffiront pas pour traiter les dossiers existants et faire face à l’accroissement des tâches imposées par les nouveaux dispositifs.
La législation étant complexe, avec plus de 15 000 textes réglementaires, les personnels recrutés doivent être formés pendant un an avant de pouvoir être en poste dans les services, ce qui est normal. Aujourd'hui, trente d’entre eux sont encore en formation et, sur les derniers recrutements, 79 sont réellement en activité, dont 15 depuis hier, lundi 25 mai.
Pourtant, l’organisme de tutelle des CAF affichait, pour 2007, 40 millions d’euros d’excédent budgétaire. Ce qui veut dire que les moyens existent pour répondre à la demande immédiate de moyens exceptionnels afin de faire face à la situation actuelle et pour doter les CAF des emplois pérennes nécessaires à une gestion moderne et efficace, respectueuse des allocataires et des personnels.
À la veille de la mise en place imminente du revenu de solidarité active, quels moyens le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre d’urgence pour que toutes les CAF, notamment celle du Val-de-Marne, puissent fonctionner correctement et rendre, dans de bonnes conditions, le service public que les usagers sont en droit d’en attendre ?