On ne compte plus les rapports – à commencer par celui de la commission d’enquête du Sénat sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires en France, publié en 2000 et intitulé « Prisons : une humiliation pour la République » – témoignant que la prison demeure un lieu où l’accès aux soins et la protection de la santé et de la dignité de la personne détenue, notamment malade, handicapée ou en fin de vie, ne sont pas assurés.
Les objectifs inscrits dans la loi du 18 janvier 1994 plaçant les soins en milieu pénitentiaire sous la responsabilité du ministère de la justice sont très loin d’être atteints, en particulier en matière d’équivalence entre les soins prodigués au sein des prisons et ceux qui sont dispensés à l’extérieur.
Les conditions d’hygiène sont souvent déplorables, ce qui facilite la propagation des maladies infectieuses. Quand le secret médical n’est pas bafoué, c’est la loi qui impose au personnel médical de passer outre et de prévenir le directeur de l’établissement pénitentiaire en cas de comportement dangereux du patient. Les extractions des détenus malades sont organisées dans une perspective uniquement sécuritaire, quand elles ne sont pas tout simplement annulées. Nombre de détenus présentent des conduites addictives et sont dépendants de la drogue et de l’alcool. Enfin, ils sont de plus en plus souvent atteints de troubles mentaux et ne sont pas à leur place, pour la plupart, dans un établissement pénitentiaire. Les moyens actuels ne permettent pas un suivi adapté. Pourtant, l’univers carcéral ne doit pas être un lieu où l’état de santé des personnes s’aggrave par manque de soins !
Dans son avis du 19 janvier 2006 sur la préservation de la santé, l’accès aux soins et les droits de l’homme, la Commission nationale consultative des droits de l’homme déclarait :
« Il n’est pas admissible qu’une personne obligée de payer sa dette à la société par une peine de prison puisse se voir également assujettie à une limitation de l’accès à la santé, et notamment de l’accès à des actions préventives que justifie une vulnérabilité particulière. La détérioration de la santé d’un détenu est un déni de droit, et se paie par l’alourdissement des obligations pesant le moment venu sur la société. Les conditions à réaliser pour rendre effectif le droit à la santé en prison reposent sur un ensemble de mesures concrètes qui ont été parfaitement recensées. Le problème est de passer à l’acte. »
Nous attendons que le Gouvernement passe à l’acte ! Le problème de la santé en milieu carcéral est loin d’être réglé, et il ne le sera guère plus si le projet de loi pénitentiaire en cours de navette est un jour finalement adopté, car ses dispositions restent bien en deçà des besoins et des exigences dictées par les règles pénitentiaires européennes, dont l’application est, de surcroît, gelée par la garde des sceaux.
C’est pourquoi le plan stratégique régional de santé doit intégrer la problématique de la santé des personnes détenues et de l’accès aux soins en milieu carcéral.