Étant donné que 90 % des femmes retraitées bénéficient actuellement de la MDA, et que celle-ci pèse pour 20 % du montant de leurs pensions, ce n’est pas une réforme anodine que vous mettez en place. Il s’agit en effet d’une baisse potentiellement catastrophique des revenus de ces personnes.
Et ne me dites pas que cette réforme ne concerne que la deuxième année de majoration, et qu’elle relève par ailleurs d’un accord entre les parents ; cela ne change rien au fond et, de surcroît, ce n’est qu’un premier pas vers la suppression de la MDA. Nous commençons à connaître votre façon de procéder.
Alors, puisque la question est bien l’évolution des inégalités hommes-femmes, j’illustrerai mon propos par quelques chiffres.
En termes de salaires, et alors qu’elles réussissent mieux leurs études que les hommes, les femmes perçoivent en moyenne 27 % de moins que ces derniers. Résultats : 87 % des smicards sont des smicardes ! Et si l’écart des salaires avait tendance à reculer depuis les années soixante-dix, les études de l’INSEE prouvent que ce rattrapage s’est interrompu dès le milieu des années quatre-vingt-dix. Voilà donc plus de quinze ans que l’inégalité salariale se maintient au même niveau.
Cette discrimination fondamentale est aggravée par le travail partiel. Effectué à 80 % par des femmes, et le plus souvent subi, le travail à temps partiel est un monopole féminin. En France, près d’une femme sur trois travaille à temps partiel, contre un homme sur vingt. Tout aussi significatif : 78 % des emplois non qualifiés sont également occupés par des femmes. Même si les emplois des secteurs que l’on appelle pudiquement « sous tension » sont souvent occupés par des travailleurs immigrés, ne nous y trompons pas, ce sont bien les femmes qui constituent toujours notre principale main-d’œuvre bon marché, exploitable et corvéable à l’excès.
Logiquement, ces inégalités au niveau des salaires se répercutent sur les retraites. Selon un rapport de mai 2008 du Conseil d’orientation des retraites, le COR, « les pensions des hommes sont deux fois plus élevées que celles des femmes pour les générations actuelles de retraités ». Selon les simulations, pour la génération née entre 1965 et 1974, qui partira prochainement en retraite, la différence devrait tomber à 40 %. Aujourd’hui, un tiers des femmes vivant avec moins de 600 euros par mois sont des retraitées et, comme le rappelle le dernier rapport du Secours catholique, tous les indicateurs démontrent une féminisation de la pauvreté.
Enfin, pour conclure, je citerai un dernier chiffre, qui explique largement la discrimination systématisée dont les femmes sont victimes, même dans notre pays. Élever un enfant, fabriquer un individu, cela prend du temps, beaucoup de temps. Or, en France, les femmes consacrent trois fois plus de temps que les hommes à l’éducation des enfants. Rendez-vous compte, mes chers collègues, trois fois plus de temps…
Quand la parité aura été atteinte sur ce point, quand les hommes et les femmes recevront le même salaire pour une tâche équivalente, quand il y aura vraiment égalité entre les hommes et les femmes, alors oui, on pourra réformer la majoration de la durée d’assurance vieillesse et partager ces trimestres de compensation.
Ces propos vous ont été tenus par des sénatrices sur toutes les travées de cette assemblée. Hélas ! madame, monsieur les ministres, ce jour faste n’est pas pour demain. Votre attitude autiste face à ce problème et le vote de votre majorité nous le confirment. Le groupe socialiste voit donc ici une raison supplémentaire pour s’opposer à ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.