Intervention de Serge Lepeltier

Réunion du 6 avril 2005 à 22h00
Eau et milieux aquatiques — Article additionnel avant l'article 5

Serge Lepeltier, ministre :

Je comprends bien l'argumentation de M. le rapporteur, mais je vais tenter d'apporter quelques éclaircissements.

Il y a un risque à mélanger une liste de cours d'eau au sens général avec les exigences de la politique agricole commune concernant les bandes enherbées.

Comme l'a précisé M. le rapporteur, la définition des cours d'eau a été construite par la jurisprudence, adaptée depuis plusieurs siècles en fonction de la diversité des situations que l'on peut rencontrer, qu'il s'agisse d'un cours d'eau au régime méditerranéen à sec l'été ou d'une source importante donnant naissance à un cours d'eau. Tout cela est extrêmement compliqué.

La qualification juridique de cours d'eau, distinct d'un simple canal ou d'une ravine, est importante pour les propriétaires, puisqu'elle emporte des obligations relatives notamment à l'entretien des cours d'eau. Elle entraîne également l'obligation de contrôle par l'administration des ouvrages intéressant le libre écoulement des eaux.

Cependant, vous avez raison, monsieur le rapporteur, cette définition n'est pas suffisamment connue sur le plan local. C'est la raison pour laquelle j'ai adressé aux préfets, le 2 mars dernier, une circulaire pour leur rappeler cette définition des cours d'eau et les inviter à harmoniser la position des différents services de l'Etat et de ses établissements publics. Je leur ai également demandé de mettre en oeuvre toute la concertation qui s'avérerait nécessaire avec les différents acteurs, en particulier avec la profession agricole.

Enfin, j'ai engagé avec mes collègues des ministères de l'intérieur, de l'agriculture, de l'équipement et de l'industrie une réflexion pour réformer les services chargés de la police de l'eau afin de regrouper les services actuellement éclatés et en assurer la cohérence.

Il existe en effet un risque d'inadéquation entre la jurisprudence résultant de la tradition et la liste des cours d'eau établie par le préfet, liste qui risque d'être attaquée. Cette situation sera très compliquée et pourra être à l'origine de contentieux du fait de l'existence de certains droits juridiques.

Parallèlement, dans le cadre de la politique agricole commune, il est prévu de mettre en place des bandes enherbées le long des cours d'eau ou le long des axes hydrauliques importants pour lutter contre les pollutions diffuses. Je parle volontairement d'axes hydrauliques, et pas seulement de cours d'eau, parce que l'intérêt de bandes enherbées pour lutter contre les pollutions diffuses n'est pas lié à la qualification juridique d'un cours d'eau. La mise en place de bandes enherbées le long d'un canal peut ainsi se révéler efficace sans que ce canal ait obligatoirement le statut juridique de cours d'eau.

Dans tous les cas, les agriculteurs qui sont concernés par la conditionnalité des aides de la PAC doivent savoir précisément à quoi s'en tenir. Pour éviter toute confusion entre la définition du cours d'eau qui va être inévitablement donnée par cette liste et les obligations liées à la PAC, il me semblerait judicieux que les préfets précisent, après concertation locale, la définition des axes hydrauliques nécessitant la mise en place de bandes enherbées.

Même si je comprends les motivations des auteurs de l'amendement, je ne suis pas favorable à l'insertion d'une telle qualification juridique dans la loi, qui risquerait d'entraîner une confusion.

C'est la raison pour laquelle je vous proposerai plutôt d'attendre la deuxième lecture de ce texte afin que nous fassions entre-temps une étude juridique de tout cela. Nous pourrons ainsi apporter une réponse sur ce risque de confusion qui existe entre la définition du cours d'eau et les obligations des agriculteurs liées à la PAC.

A ce stade, monsieur le sénateur, je vous invite donc à retirer votre amendement.

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