Il faut bien distinguer ces trois domaines d'intervention. Ils ne doivent en aucun cas être attribués à un même organisme, qui risquerait, sinon, de devenir une dictature technocratique indépendante de l'État, mais dépendante du pouvoir nucléaire. Les pouvoirs de contrôle, d'édiction des règlements et d'information du public doivent être séparés, afin, précisément, de garantir la transparence, la sécurité et la démocratie.
S'agissant d'abord du pouvoir de contrôle, la création de la Haute autorité de sûreté nucléaire pourrait, en théorie, apparaître comme un progrès. Cet organe sera en effet plus indépendant que les actuels services de la direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, la DGSNR, et les autres structures compétentes sur le nucléaire. Il pourra ainsi, aux termes de l'article 2 decies, contrôler les installations nucléaires de base, les INB, sans être soumis aux pressions des autres services ou ministères.
Encore faudrait-il que sa composition ne soit pas le reflet du pouvoir nucléaire ! Or on nous dit que les cinq membres seront désignés uniquement en fonction de leurs compétences nucléaires, alors que le pouvoir de contrôle ne peut, à mon sens, échapper à l'autorité politique de ministres responsables.
Ensuite, transférer le pouvoir d'édicter des règlements et le pouvoir de contrôle à une même autorité ne nous paraît pas une bonne solution. Il faut en contraire dissocier ces deux fonctions. C'est bien au ministère de préparer les décrets après les consultations d'usage, notamment celle de la Haute autorité de sûreté nucléaire, que nous avions nous-mêmes réclamée. Mais le prescripteur ne peut pas être le contrôleur.
Enfin, si la Haute autorité est chargée du contrôle, elle ne peut en aucun cas contrôler l'information divulguée. Dans une telle hypothèse, elle serait, là encore, juge et partie.
Madame la ministre, mes chers collègues, vous vous doutez bien que le projet de loi, même amendé avec sagesse par notre collègue M. Sido, rapporteur, qui a vu les dangers du texte initial sur les missions de la Haute autorité, aurait du mal à recueillir notre assentiment, ne serait-ce qu'en raison de la composition de cette Haute autorité, qui n'assure en aucun cas l'indépendance. Et pourtant, comme l'a rappelé M. Piras, nos objectifs étaient communs.
Mais je ne désespère pas que nos débats nous permettent d'améliorer le texte - je fais allusion aux amendements de MM. les rapporteurs -, tant il est nécessaire de créer un cadre juridique pour les INB et le stockage des déchets.
À cet instant, je fais encore confiance à la sagesse de notre assemblée.