Intervention de Dominique Bussereau

Réunion du 20 mai 2008 à 16h00
Réforme portuaire — Discussion générale

Dominique Bussereau, secrétaire d’État :

Elles le souhaiteront ! Je n’ai jamais vu de collectivités locales se désintéresser de leur port, qu’il s’agisse d’un port d’État ou d’un port géré par elles-mêmes !

Le deuxième volet de ce projet de loi concerne la modernisation de la gouvernance des grands ports maritimes. Le système actuel est vieux de plus de quarante ans. Nous proposons de le remplacer, sur le modèle de nos entreprises, par un conseil de surveillance, un directoire et un conseil de développement. Je vais vous dire un mot de la composition de chacun, votre rapporteur ayant émis un certain nombre de propositions que nous examinerons avec tout l’intérêt qu’elles méritent.

Le projet de loi prévoit un conseil de surveillance comprenant seize membres, dont cinq représentants de l’État, quatre représentants des collectivités locales – nous souhaitons que leur place soit renforcée –, trois représentants des salariés de l’établissement et quatre personnalités qualifiées. Cette composition traduit la volonté du Gouvernement de réaffirmer le poids des collectivités locales, qui investissent dans ces ports très importants pour leur développement, ainsi que celui de l’État, qui doit exercer pleinement son rôle puisqu’il s’agit d’établissements publics nationaux.

Je me souviens à ce propos d’une remarque amusante d’Alain Juppé – mais que Jean-Marc Ayrault, Michel Delebarre, ou d’autres encore auraient pu prononcer : « Ce que je reproche à nos ports, ce n’est pas d’être des ports, c’est d’être des ports autonomes. » Ils sont en effet tellement autonomes par rapport aux collectivités sur les territoires desquelles ils travaillent qu’ils n’entendent pratiquement pas leurs voix !

Le directoire, quant à lui, comptera deux à quatre membres selon les ports. Il me paraît important que des membres de ce directoire puissent venir du monde de l’entreprise et – pourquoi pas ? – d’autres ports européens afin d’apporter leur expérience de réussite et d’enrichir nos pratiques.

Enfin, dans l’esprit du Grenelle de l’environnement, ces instances s’appuieront sur les avis d’un conseil de développement associant l’ensemble des parties prenantes du territoire : les acteurs économiques, les collectivités, les représentants des salariés, les personnalités qualifiées – dont les associations de défense de l’environnement – et tous les acteurs du transport terrestre… Ce conseil permettra de prendre en compte les aspects économiques, sociaux et environnementaux du développement des ports.

Ce système de gouvernance rendra, à notre avis, les établissements portuaires plus réactifs et tracera une distinction claire entre les missions de contrôle et la gestion courante de l’établissement.

Les projets stratégiques dont j’ai parlé tout à l’heure seront adoptés par le conseil de surveillance, après avis obligatoire du conseil de développement. Ce projet donnera ensuite lieu à l’établissement d’un contrat avec l’État et les collectivités locales – commune, intercommunalité, département, région – si celles-ci le souhaitent, bien évidemment !

Je précise enfin que ce projet stratégique devra, dans certains cas, se conformer aux grandes orientations d’un document cadre établi par un conseil de coordination. En effet, le projet de loi prévoit des dispositions permettant de coordonner le développement des ports d’une même façade maritime ou d’un même axe fluvial.

Prenons l’exemple de l’ouest atlantique : Nantes, La Rochelle, Bordeaux, au lieu de se faire concurrence, monsieur le sénateur Branger, devront travailler ensemble pour avoir une politique commerciale commune et, pourquoi pas, avec les collectivités locales si celles-ci souhaitent s’y associer. Michel Delebarre a en effet émis cette idée – qui me paraît bonne – devant le groupe de développement portuaire de l’Assemblée nationale.

Il en va de même pour l’axe de la Seine : Le Havre, Rouen et le port autonome fluvial de Paris devront, d’une manière ou d’une autre, s’associer. Ou encore, selon l’idée de Michel Delebarre que je trouve excellente, le port de Dunkerque sera amené à collaborer avec le port fluvial de Lille. Il faut que nous encouragions ces coopérations, voire que nous les rendions obligatoires, pour une meilleure politique commerciale et une meilleure gestion des investissements.

Soyons clairs, mesdames, messieurs les sénateurs, nous ne reprenons pas les lubies de certains rapports : ne voyez pas dans notre démarche une volonté de fusion des ports dictée depuis Paris ! Vous le savez mieux que quiconque, chaque port a son histoire et ses modes de développement, sur lesquels nous n’interviendrons pas – Rouen n’est pas Le Havre, et réciproquement. Nous voulons seulement mettre en cohérence l’action de nos établissements publics en faveur de la politique portuaire de l’État.

J’en viens maintenant au troisième grand volet de ce projet de loi : la réorganisation et la rationalisation de la manutention.

Nos ports pâtissent de l’absence de commandement unique et de coordination, pour la même opération de chargement ou de déchargement, entre les dockers et les portiqueurs. Aussi voulons-nous mettre en place des opérateurs de terminaux intégrés – comme cela a déjà été expérimenté à Dunkerque ou à Port 2000 – ayant autorité sur l’ensemble de la main d’œuvre et des outils, à l’exemple de tous les grands ports européens. Le développement des ports espagnols a commencé le jour où les Espagnols ont mis en œuvre cette réforme.

Les sept grands ports maritimes bénéficiant du plan de relance devront donc transférer les outillages qu’ils possèdent à des opérateurs, dans les deux ans qui suivront l’adoption de leur projet stratégique. Vous le voyez, nous accordons le temps nécessaire pour que les choses se fassent intelligemment, port par port, sans aucun esprit de système.

La mise en œuvre de ces transferts privilégiera les opérateurs économiques locaux – il ne s’agit pas de remplacer un monopole public par un grand monopole privé –…

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