Je ne souscris pas à cette analyse.
En premier lieu, il ne s’agit pas de poser en principe général et absolu la vente des outillages publics des ports. En effet, ce principe connaît quatre exceptions, exposées à l’article L. 103-2 du code des ports maritimes. Il ne saurait donc être question d’objectif « zéro outillage public ». Au cas par cas, le projet stratégique pourra, à titre exceptionnel et après accord de l’autorité administrative compétente, permettre au port d’exercer, directement ou indirectement, l’exploitation des outillages. Je crois important de le relever, car nous rencontrerons probablement des situations où il sera nécessaire qu’il en soit ainsi.
En deuxième lieu, la protection du patrimoine de l’État est assurée par le III de l’article 7 du projet de loi. En effet, ce paragraphe dispose : « Une commission composée de personnalités indépendantes veille au bon déroulement et à la transparence de la procédure fixée au I et émet un avis sur l’évaluation des biens et des droits réels avant leur cession. Sa composition et ses modalités de fonctionnement sont fixées par décret en Conseil d’État. » Il ne peut donc être question de vendre à vil prix des outillages qui ont parfois coûté à nos ports la bagatelle de plusieurs millions d’euros. Des hauts fonctionnaires, issus probablement du Conseil d’État ou de la Cour des comptes et accompagnés d’experts spécialisés selon la nature de la machine à vendre, veilleront à ce qu’un « juste prix » soit proposé par les candidats.
En troisième lieu, le projet de loi accorde, me semble-t-il, un rôle très important à la négociation sociale. En effet, en application anticipée de l’article 9 du projet de loi, un accord-cadre fait d’ores et déjà l’objet négociation à l’échelon national afin de déterminer les modalités selon lesquelles les contrats de travail des salariés des ports se poursuivent avec les entreprises de manutention. À l’échelon local, conformément à l’article 8 du texte, la détermination des critères servant à établir la liste du personnel transféré, puis la mise en œuvre de cette liste se font en étroite collaboration entre le directoire et les syndicats de salariés.
En dernier lieu, le transfert des salariés du port s’accompagnera de la poursuite de l’intégralité des clauses contractuelles. En outre, il est fait une application volontaire, à l’article 11 du projet de loi, de l’article L. 2261-14 du code du travail, qui impose des négociations dans l’entreprise d’accueil pour harmoniser, d’une part, les conventions et accords dont bénéficiaient les salariés entrants et, d’autre part, les accords et conventions concernant les salariés en place. Enfin, il convient de rappeler qu’un mouvement de convergence s’opère peu à peu entre la convention collective des ports et celle des industries de la manutention.
Par conséquent, il serait très inopportun de ne pas discuter ce projet de loi, contrairement à ce qu’affirment nos collègues du groupe CRC.
Peut-être toutes ces explications, monsieur Bret, vous convaincront-elles de retirer cette motion et de nous éviter ainsi un scrutin !