Intervention de Jean-Patrick Courtois

Réunion du 13 septembre 2006 à 15h00
Prévention de la délinquance — Discussion générale

Photo de Jean-Patrick CourtoisJean-Patrick Courtois :

La généralisation à toutes les villes de plus de 10 000 habitants des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance que nous avions adoptés dans la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, la LOPSI, répond à ce besoin.

L'accompagnement parental lui permettra également, en cas de troubles de voisinage, de défaut de surveillance ou d'assiduité scolaire, de proposer aux parents un stage ou une mesure de réparation ainsi que toute mesure utile pour rétablir l'équilibre de la famille.

Le rappel à l'ordre - dois-je préciser qu'il est déjà pratiqué sur l'ensemble de notre territoire sans assise légale avec néanmoins tout le succès qu'il mérite ? - lui permettra également, dans le cadre du conseil pour les droits et devoirs des familles, d'apporter une première réponse préventive à un mineur tout au début de la chaîne de la délinquance, sans attendre que ce mineur devienne justiciable pour des faits bien plus graves, des mois ou des années plus tard.

Certains prétendent, paraît-il - mais peut-être s'agit-il de propos déformés -, que ce texte tendrait à faire du maire une sorte de shérif à l'échelle de sa commune : il deviendrait un caudillo détenant le pouvoir de police, le pouvoir de sanction, le pouvoir de coercition de ses travailleurs sociaux.

Comment, dans une assemblée comme la nôtre, pourrait-on laisser dire de telles choses ? Nous savons mieux que quiconque que les maires n'ont d'autre objectif que d'améliorer la qualité de la vie dans leur cité.

Ces allégations sont totalement absurdes et infondées. Le pouvoir du maire demeurera à chaque fois encadré.

En matière d'allocations familiales, pour ne prendre que cet exemple, le maire n'aura d'autre pouvoir que celui de saisir le juge des enfants sur la mise sous tutelle des allocations familiales. Peut-on raisonnablement parler de dérive autocratique locale au sujet d'un pouvoir de saisine ?

En ce qui concerne maintenant la délinquance des mineurs, mon collègue Jean-Claude Carle s'étant déjà longuement exprimé sur le sujet, je me bornerai à un constat.

Cette délinquance a augmenté de 80 % en dix ans. En 2005, près de 200 000 mineurs ont été mis en cause dans des affaires judiciaires. De plus, cette délinquance se caractérise surtout par des actes d'une violence dont les limites sont sans cesse repoussées.

L'éducation et la prévention sont naturellement le fondement de toute politique pénale des mineurs. Néanmoins, le cadre de l'ordonnance de 1945 repose sur des constats d'une autre époque, où la délinquance était d'une autre nature.

Il était essentiel de revoir le cadre législatif pour apporter des réponses graduées en maintenant la sanction éducative au centre du dispositif.

Tout d'abord, l'extension de la composition pénale aux mineurs dès treize ans sera particulièrement adaptée à la petite délinquance. Elle permettra au parquet, en contrepartie de l'abandon des poursuites, de proposer à un délinquant qui reconnaît les faits de se conformer à certaines obligations éducatives.

De la même manière, il était absolument essentiel de raccourcir les délais de jugement.

Effectivement, bien souvent, la machine judiciaire ne se met en route que trop tardivement, alors que le mineur est déjà en perte totale de repères.

Il pouvait, dans certains cas de figure, être arrêté plus d'une dizaine de fois avant d'être jugé pour le premier de ses délits ! Tout cela contribuait à entretenir un fort sentiment d'impunité chez ces mineurs, et il était temps d'y remédier.

C'est ce qui est proposé au travers de la procédure de jugement à délai rapproché applicable aux mineurs de plus de seize ans, lorsque la peine encourue est supérieure ou égale à trois ans.

Enfin, le projet de loi prévoit toute une série de mesures opportunes en matière d'assistance éducative.

Premièrement, il prévoit la modification du contrôle judiciaire pour les mineurs afin de pouvoir les placer sous contrôle si la peine encourue est supérieure ou égale à sept ans.

Deuxièmement, il prévoit un avertissement solennel pour les mineurs dès dix ans en en prévoyant qu'il ait lieu dans l'enceinte même du palais de justice et en présence des parents.

Troisièmement, il prévoit la mesure de placement éloigné du lieu de résidence habituelle dès dix ans, qui donne au juge la possibilité d'ordonner son éloignement, pour une durée maximum d'un mois, et son placement dans une institution ou un établissement où sera mis en oeuvre un travail psychologique, éducatif et social en lien avec l'infraction commise.

Quatrièmement, il prévoit l'exécution de travaux scolaires dès dix ans afin de redonner le goût de l'étude en imposant au jeune mineur l'exécution de travaux scolaires adaptés à son niveau.

Cinquièmement, il prévoit le placement dans un internat dès dix ans pour une durée correspondant à une année scolaire afin de ne pas interrompre le cursus, tout en apparaissant comme une sanction.

Sixièmement, enfin, il prévoit la mesure d'activité de jour dès treize ans, mesure éducative reposant essentiellement sur l'importance de la socialisation du mineur en milieu de travail, centrée sur l'activité assignée aux mineurs et structurée sur un accueil à la journée.

Toutes ces mesures sont particulièrement utiles parce que l'ordonnance de 1945 pèche gravement par son inadaptation à la réalité contemporaine.

Entre la totale impunité des mineurs et l'arsenal de sanctions pénales qui peuvent leur être infligées - même si elles ne le sont en fait presque jamais, parce qu'elles sont trop lourdes -, il existe un désert ! Notre société doit pouvoir intervenir à la source du problème, de la manière la plus adaptée qui soit, afin de répondre de manière adéquate et graduée aux premières manifestations de comportements délictueux de nos enfants.

Avec pragmatisme, c'est ce que les auteurs de ce projet de loi ambitionnent, et nous partageons leurs vues.

C'est pourquoi notre groupe adoptera le texte du projet de loi qui sera issu de nos travaux.

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