Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 10 septembre 2010 à 9h30
Orientation et programmation pour la performance de la sécurité intérieure — Article 24 bis

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

Cet amendement concerne le couvre-feu pour les mineurs.

En lieu et place d’une réforme globale de l’ordonnance de 1945, qui est d’ailleurs prévue dans un futur indéterminé, le Gouvernement et la majorité ont décidé de distiller un certain nombre de modifications, de pur affichage, visant à stigmatiser un peu plus l’enfance en danger.

L’article 24 bis confère au préfet la faculté de prendre une mesure de « couvre-feu » à l’encontre des mineurs de treize ans.

Cette mesure aurait pour effet de restreindre la liberté d’aller et venir de ces mineurs entre vingt-trois heures et six heures s’ils ne sont pas accompagnés de leurs parents sous prétexte de risque d’atteinte à leur santé, leur sécurité ou leur moralité.

L’article introduit deux types de mesures : soit un couvre-feu de portée générale, qui est déjà possible en vertu du pouvoir de police du maire, soit un couvre-feu individuel, prononcé à l’encontre d’un mineur de treize ans ayant déjà fait l’objet de mesures ou de sanctions éducatives et dont les parents ont signé un contrat de responsabilité parentale.

Ma première remarque est très simple : une telle mesure relève non pas du préfet, mais du domaine de l’assistance éducative et donc de la compétence du juge des enfants.

Cette disposition traduit une approche autoritaire du suivi éducatif et témoigne d’un renoncement à la prise en charge préventive des mineurs en détresse au profit d’un renforcement de la répression. En effet, au lieu d’aider les parents, le texte vise à les sanctionner pour le non-respect du couvre-feu.

Nous refusons cette approche sécuritaire, qui condamne sans comprendre et qui stigmatise ainsi sans aucune approche éducative.

Tout cela relève de l’assistance éducative, qui est une liberté fondamentale et qui, en vertu de la Constitution, doit être protégée par le juge !

Ce mélange des genres est intolérable dans une société qui se dit démocratique : on ne peut pas transférer, mot pour mot, les compétences d’un juge – une autorité judiciaire – à une autorité administrative – donc politique – sans violer la Constitution !

Les choses deviennent encore plus graves si les parents de l’enfant sont injoignables ou s’ils refusent d’accueillir l’enfant : dans ce cas, ce dernier est remis au service de l’aide à l’enfance sur décision préfectorale, sans même l’avis du juge des enfants.

Il s’agit d’une véritable ordonnance de placement provisoire, qui est normalement de la compétence du président du conseil général et répond à une procédure très stricte et contradictoire.

Le dispositif proposé viole donc triplement la Constitution. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons sa suppression et demandons le retour à l’autorité judiciaire.

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