Madame la présidente, je défendrai en même temps les amendements n° 158 et 159.
L’article 24 bis prévoit la possibilité pour le préfet de prendre des mesures dites de « couvre-feu » individuelles à l’égard des mineurs exposés, par leur présence sur la voie publique, à un risque manifeste pour leur santé, leur sécurité, leur éducation ou leur moralité, en restreignant leur liberté d’aller et venir entre vingt-trois heures et six heures. Cette formulation trop générale contribue à stigmatiser certains mineurs et ne traite en rien le problème éducatif.
Tout d’abord, ces dispositions organisent le transfert à l’autorité administrative d’une compétence qui était jusque-là dévolue au juge des enfants, en reprenant mot pour mot les conditions de l’assistance éducative. Qui plus est, la liberté d’aller et venir étant une liberté fondamentale, il semble tout à fait anormal que la qualification de ces atteintes échappe au juge chargé par la Constitution d’en garantir l’exercice.
Ensuite, si les parents du mineur ne peuvent être contactés ou refusent d’accueillir l’enfant à leur domicile, celui-ci est remis au service d’aide sociale à l’enfance sur décision préfectorale, avec simple avis du procureur de la République.
Cet article autorise donc l’administration, et non plus le conseil général, à prendre une véritable ordonnance de placement provisoire, sans garantie du respect de la procédure contradictoire pour les familles, contrairement à ce qui est imposé aux magistrats du parquet lorsqu’ils disposent de compétences similaires.
En cas de non-respect de la mesure de couvre-feu, le texte condamne également les parents à une amende contraventionnelle, alors que le code civil impose au juge de rechercher l’adhésion des familles.
L’intitulé de ce chapitre, qui fait référence à la « prévention de la délinquance », est un leurre dans la mesure où l’article 24 bis traduit bel et bien une vision autoritaire du suivi des familles, que l’on sait inopérante. Celui-ci n’a pour seul objet que de transformer une mesure de protection en une mesure de sanction éducative pour stigmatiser une hypothétique population délinquante. Il est donc purement démagogique.
C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article 24 bis.