Je souhaite en préambule dire quelques mots de l’amendement n° 394 rectifié du Gouvernement.
J’évoquerai tout d’abord la méthode.
L’article 32 quater du projet de loi, que nous examinerons tout à l’heure, vise à modifier le premier alinéa de l’article 78-2 du code de procédure pénale. Notre amendement, qui tend également à modifier l’article 78-2 du code de procédure pénale, aurait dû être examiné à ce moment-là. Le Gouvernement a cependant choisi de court-circuiter le débat en imposant une modification de l’article 78-2 à l’article 24 vicies.
Nous lui avons demandé de déplacer son amendement à l’article 32 quater, qui porte sur la disposition qu’il souhaite modifier et que nous voulons supprimer, mais il a refusé. Nous avons donc dû nous adapter à ses desiderata et déplacer notre amendement afin qu’il fasse l’objet d’une discussion commune avec celui du Gouvernement.
Cette méthode est peu respectueuse du Parlement. Elle a permis au Gouvernement de court-circuiter à sa guise notre travail. En voulant faire adopter des dispositions de manière anticipée, il nous prive du débat tel que nous l’avions organisé. Je tenais à apporter cette précision avant de défendre mon amendement.
Ensuite, en ce qui concerne le fond, nous sommes là devant un véritable problème d’interprétation de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne concernant l’article 78-2, alinéa 8 du code de procédure pénale.
Comme à son habitude, nous l’avons vu pour la garde à vue, le Gouvernement cherche à minimiser les conséquences des décisions des juridictions européennes en essayant de « sauver les meubles ».
Je vous le dis de manière très claire : le huitième alinéa de l’article 78-2 est contraire au code frontières Schengen.
Selon un arrêt en date du 22 juin 2010 de la Cour de justice de l’Union européenne, rendu sur le fondement d’une question préjudicielle posée par la Cour de cassation, l’article 67, paragraphe 2 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ainsi que les articles 20 et 21 du code frontières Schengen s’opposent à ce que les autorités françaises puissent contrôler l’identité de toute personne au-delà des frontières françaises, et ce « indépendamment du comportement de celle-ci et de circonstances particulières établissant un risque d’atteinte à l’ordre public […] ».
Selon la Cour de justice, ces contrôles présentent un effet équivalant à celui des vérifications aux frontières prohibées par l’article 21 a) du code frontières Schengen.
La décision de la Cour de justice est claire, et les gesticulations du Gouvernement ne changeront rien au principe posé. Ce n’est pas avec un amendement rédigé à la va-vite qu’il rétablira la légalité de cet article.
L’Europe est un espace sans frontières intérieures, mais qui respecte la souveraineté des États de l’espace Schengen. Si la France souhaite maintenir des contrôles aux frontières, il lui appartient donc d’améliorer les dispositifs de coordination en matière de police et de justice.
Sans aménagement tendant à encadrer les contrôles sur le territoire d’un État tiers et pour nous conformer au code frontières Schengen, nous proposons de supprimer le huitième alinéa de l’article 78-2 du code de procédure pénale.