Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 10 septembre 2010 à 15h00
Orientation et programmation pour la performance de la sécurité intérieure — Article 32

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

En 2002, Nicolas Sarkozy se déclarait déjà décidé à traiter le prétendu « problème des Roms » et la première LOPSI qu’il nous avait soumise en tant que ministre de l’intérieur contenait les outils nécessaires à la mise en œuvre de cet édifiant projet.

Ce faisant, il avait déjà décidé de se servir de la peur et de la haine de l’autre, de l’étranger, pour fédérer ses partisans. Il avait ainsi déclaré : « Comment se fait-il que l’on voie dans certains de ces campements tant de si belles voitures, alors qu’il y a si peu de gens qui travaillent ? ».

En 2002, la politique de la droite flattait la bassesse de nos concitoyens, tandis que la xénophobie était de retour sur le devant de la scène politique. Aujourd’hui, huit ans plus tard, rien n’a changé. Les Roms sont à nouveau les boucs émissaires de M. Sarkozy. Plus exactement, ils sont encore et toujours ses boucs émissaires.

Cette population fragile est, quand on connaît son histoire, la plus facile à utiliser pour fertiliser le terreau xénophobe. La peur irraisonnée que cette population suscite ne date pas d’hier. Comme le rappelait hier matin un hebdomadaire, Flaubert dénonçait déjà il y a un siècle et demi la haine des bourgeois contre les bohémiens…

Le Président de la République utilise donc une vieille recette pour détourner l’opinion des vrais problèmes, faire oublier la crise et, surtout, camoufler les dernières révélations concernant l’un de ses ministres. M. Sarkozy jette les Roms en pâture à une population exsangue, tandis que ses ministres orchestrent les évacuations de camps.

Pour aider les plus réfractaires à adhérer à son odieuse politique d’expulsion, le Gouvernement la rend plus acceptable en proposant une « aide au retour humanitaire » d’un montant de 300 euros par adulte et 100 euros par enfant expulsé. De quelle mansuétude ce gouvernement ne ferait-il pas preuve pour récolter plus de partisans ? On se le demande !

En outre, le Gouvernement justifie sa position en brandissant des statistiques tronquées. Vous-même, monsieur le ministre, n’avez-vous pas annoncé que la délinquance de nationalité roumaine à Paris était en hausse de 138 % en 2009 et de 259 % en dix-huit mois, et ce alors même qu’aucune source ne permet d’établir de telles statistiques et que les études du CNRS relatives à la délinquance des étrangers démontrent qu’il est vraisemblable que la délinquance roumaine serait au contraire en baisse ?

Puisque l’arsenal répressif existant est un peu « léger » à votre goût, vous nous invitez à légiférer et à faciliter encore l’expulsion des campements illicites.

Cette attitude choque le peuple de France, comme en témoignent les manifestations du 4 septembre dernier. Mais elle choque également nos voisins. Le Parlement européen a ainsi adopté hier matin une résolution destinée à s’opposer aux expulsions des campements.

Nous soutenons la démarche des différents groupes de gauche représentés au Parlement européen : ils enjoignent la Commission européenne à prendre ses responsabilités et à condamner tous les États membres qui prennent pour cibles des minorités culturelles, en violant les traités et les dispositions communautaires. Les Roms doivent enfin être traités comme des citoyens européens !

Le Parlement européen a pris cette honorable décision hier, mais vous n’ignorez pas que l’ONU montre également la France du doigt. Je trouve désolant, pour ne pas dire plus, que la patrie des droits de l’Homme soit atteinte d’un tel mal. Il est vraiment temps de l’en guérir !

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