Intervention de Michel Billout

Réunion du 17 juillet 2007 à 17h00
Dialogue social et continuité du service public dans les transports terrestres — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Michel BilloutMichel Billout :

Est-il utile, dès lors, de rendre contraignante la signature de tels accords alors même que l'intelligence des partenaires sociaux permet d'aboutir au même résultat par le dialogue ? Les amendements de la commission vont même obliger la SNCF et la RATP à signer de nouveaux accords. N'est-ce pas particulièrement contre-productif ?

Par ailleurs, si l'objectif est réellement de garantir la concertation avant toute grève, plutôt que d'allonger la période de concertation en instaurant une sorte de « préavis du préavis », il serait opportun de commencer par faire respecter les lois qui existent déjà, notamment celle du 19 octobre 1982, dans laquelle le principe de négociation pendant le préavis de grève est posé.

Pourtant, dans les faits, cette loi est peu respectée par les entreprises elles-mêmes. Or, dans ses amendements, la commission propose que la négociation préalable ne se fasse qu'avec les organisations syndicales ayant notifié leur intention de déposer un préavis : on peut légitiment s'interroger sur l'intérêt pour le dialogue social d'une telle mesure !

Concernant le « plan de transport adapté » et le « plan d'information des usagers » créés à l'article 4, les organisations syndicales sont simplement consultées, sans avoir la possibilité de faire des propositions alternatives sur ces plans, qui sont élaborés par la direction de l'entreprise et approuvés par les autorités organisatrices : curieuse vision du dialogue social !

Le principe de l'élaboration d'un « accord collectif de prévisibilité du service » applicable en cas de grève ou d'autres perturbations prévisibles du trafic est posé à l'article 5. Cet accord doit être le fruit des négociations entre l'entreprise et les organisations syndicales. Pourtant, il est immédiatement précisé que, si la négociation n'aboutit pas avant le 1er janvier 2008, l'accord sera conclu de manière unilatérale par la seule direction de l'entreprise ! Autant dire que cette disposition ne poussera pas franchement les directions des entreprises à négocier avec les syndicats et qu'elle tourne donc également le dos au principe de dialogue social.

Pour finir, comment ne pas se rendre compte que la prévisibilité du trafic en temps de grève repose principalement sur la relation de confiance entre les syndicats et l'entreprise ? Cette confiance est elle-même conditionnée par le respect des libertés syndicales.

À l'inverse, le mécanisme de déclaration individuelle stigmatise les grévistes et détériore largement les liens de confiance. Elle permet la constitution de fichiers, au moment même où la CNIL s'inquiète des très nombreuses dérives portant atteinte aux libertés des citoyens. Cette loi sera donc, de ce point de vue également, inefficace voire dangereuse.

En outre, les réformes proposées par ce texte ne sauraient cacher le besoin urgent de nouvelles dispositions en faveur d'une meilleure démocratie sociale que demandent, notamment, les syndicats.

De grandes réflexions sont à mener sur les questions de représentativité syndicale, sur la notion même d'accord majoritaire ainsi que sur la modernisation des droits des salariés. Faut-il vraiment souligner que les conflits sociaux sont souvent la conséquence du refus de prise en compte des revendications syndicales ?

Par ailleurs, un certain nombre de conflits dépassent le niveau de l'entreprise. L'obligation faite de négocier au sein même de l'entreprise ne vaut pas pour l'ensemble des conflits, notamment lorsque les revendications sont nationales. Ainsi, Anne-Marie Idrac soulignait, dans un entretien du 13 avril 2007 publié dans le journal Le Monde, que, pour l'année précédente, la moitié des jours de grève étaient imputables au CPE, le contrat première embauche.

Cette loi nourrit donc en elle-même les causes de son futur échec.

J'aborderai maintenant le sujet de la continuité du service public et des usagers.

Pour justifier ces nouvelles mesures, M. Sarkozy s'appuie sur l'exaspération des usagers, due aux conditions dans lesquelles ils sont transportés, et qui attendent un service public efficace. Dans ce sens, un sondage CSA de mars dernier fait le constat que les transports en commun arrivent en troisième position parmi les problèmes qu'il convient de résoudre en priorité. Mais pensez-vous réellement, monsieur le ministre, que la qualité de service pourra se trouver renforcée par cette loi alors que celle-ci ne traite que de la continuité du service public ?

Certes, un amendement de la commission spéciale tend à élargir le champ d'application de ce texte à des perturbations prévisibles trente-six heures auparavant, mais même avec cet élargissement, les principaux facteurs de discontinuité du service ne sont pas traités.

En effet, pour les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, le seul objectif digne d'intérêt est de garantir la continuité du service public des transports chaque jour de l'année, ...

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