Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat qui nous réunit aujourd'hui autour du projet de loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs n'est pas nouveau, loin s'en faut.
Vous m'autoriserez, en effet, à rappeler qu'au cours de la précédente législature deux projets de loi visant à renforcer le dialogue social nous ont été présentés, par M. François Fillon pour l'un, par M. Jean-Louis Borloo pour l'autre. Il est donc permis de s'interroger sur la pertinence du dépôt d'un nouveau texte sur le même sujet.
La loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, et celle du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social, défendues et adoptées par la majorité parlementaire, se sont-elles vraiment révélées à la hauteur des enjeux et des objectifs qu'elles voulaient atteindre ? Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui ne serait-il pas la traduction du contraire ?
À l'instar de tous les membres de notre assemblée, je me réjouis de voir le dialogue social et l'amélioration de la qualité du service rendu aux usagers des transports publics terrestres placés au coeur des préoccupations du Gouvernement.
J'ai eu moi-même de nombreuses occasions de réaffirmer mon attachement et celui des socialistes au principe de négociation préalable entre employeurs et salariés.
Je l'ai fait d'abord à l'ADF, l'Assemblée des départements de France, au sein de laquelle une réflexion avait été engagée à la suite de la remise, en 2004, du rapport Mandelkern au ministre des transports de l'époque, M. de Robien.
Je l'ai fait ensuite dans le cadre des travaux entrepris par la commission spéciale chargée d'examiner ce projet de loi, notamment lors de mon audition en qualité de membre de l'ADF.
À ce titre, j'approuve l'invitation ici lancée au législateur à prévenir plus efficacement les conflits sociaux dans les entreprises de transport terrestre en instaurant un dispositif de négociation collective obligatoire.
Le premier volet du projet de loi qui nous est présenté peut constituer un progrès. En effet, nous souscrivons à l'idée que le renforcement du dialogue social dans les entreprises de transport permettra, pour une part, d'éviter les grèves.
En faisant de la grève non plus un préalable à la négociation, mais l'ultime recours à son échec, la première partie du projet de loi pourrait être porteuse de progrès social, dans la mesure où elle inscrit les relations au sein de l'entreprise dans un cadre pacifié, propice au dialogue et à la médiation.
S'inspirant pour une large part des dispositifs de prévention des conflits mis en place à la RATP en 1996, puis à la SNCF en octobre 2004, ce texte entend renforcer et étendre à toutes les entreprises de transport les procédures dites « d'alarme sociale » et de « demande de concertation immédiate » expérimentées avec succès dans ces deux entreprises. Parce qu'ils imposent une négociation préalable avant tout dépôt de préavis de grève, ces dispositifs ont largement fait leurs preuves, cette dernière décennie, en matière de diminution du nombre de conflits sociaux. Il semble donc intéressant de les approfondir et d'essayer de les généraliser.
Cependant, si la solution semble adaptée, la méthode l'est moins, et ce au moins sur trois points cruciaux.
Le projet de loi pose le principe d'une négociation obligatoire dans les entreprises de transport public, négociation qui doit aboutir à la signature avant le 1er janvier 2008 d'un accord-cadre de prévention des conflits. Un décret en Conseil d'État interviendra après le 1er janvier 2008 pour traiter le cas des entreprises où les négociations collectives auront échoué.
Ma première remarque concerne le champ d'application de cette disposition, qui ne tient pas compte des spécificités propres à certains services de transport placés, par exemple, sous la responsabilité des départements.
Il s'agit là pour l'essentiel de transports scolaires et, dans une proportion bien moindre, de transports interurbains, lesquels, en milieu rural, relèvent essentiellement d'entreprises à taille réduite - au sein desquelles les conflits sont d'ailleurs extrêmement rares.