Intervention de Catherine Morin-Desailly

Réunion du 3 février 2010 à 14h30
Réforme des collectivités territoriales — Article 13

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly :

Le projet de loi de réforme des collectivités territoriales a pour objectif affiché, entre autres, de rendre le « millefeuille territorial » plus rationnel et les politiques publiques locales plus simples, plus efficaces et plus performantes.

L’article que nous examinons à présent doit faciliter le regroupement des régions. Il a donc tout son sens.

Selon un rapport de la délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires du mois de janvier 2009, en Europe, les régions françaises font preuve d’une « dynamique démographique favorable ».

Toutefois, seules les régions d’Île-de-France, de Rhône-Alpes et de Provence-Alpes-Côte d’Azur figurent parmi les quinze premières régions européennes pour leur niveau de production. Pourquoi ? Parce que nombre de régions subissent – il faut le reconnaître – des flux migratoires qui creusent les écarts entre, d’une part, le sud et l’ouest, et, d’autre part, le nord et l’est.

Dans le même temps, le mouvement de résidentialisation en zones périurbaines et la construction d’infrastructures continuent de réduire le périmètre des espaces agricoles et ruraux français.

De concert avec les dynamiques économiques, ces mouvements de population dessinent de grands ensembles interrégionaux de plus en plus homogènes.

Des regroupements interrégionaux, on le constate, se font aujourd’hui de manière naturelle. Il me semble utile de prendre acte de ce phénomène et d’aménager le cadre légal de telle façon que ces regroupements ne soient pas seulement factuels, mais puissent devenir, dans le respect des collectivités et des populations concernées, institutionnels.

De tels ensembles régionaux, vastes et cohérents d’un point de vue socio-économique, permettraient de mener des politiques publiques plus efficaces.

Hostiles à d’éventuelles fusions de régions, d’aucuns invoquent, selon les cas, la notion d’identité régionale. C’est une vraie question qui doit être sérieusement étudiée.

Néanmoins, il est aussi des régions auxquelles, d’emblée, la fusion non seulement ouvrirait des perspectives de développement, mais aussi et surtout permettrait de retrouver une identité pleine et entière.

Élue de Seine-Maritime, mes chers collègues, je me préoccupe du devenir de ma région, qui est un cas d’école en la matière.

Comment justifier l’existence de deux Normandie ? Comme l’a indiqué le Président de la République lui-même dans un discours sur la réforme territoriale prononcé le 21 octobre dernier, « vu de n’importe quel endroit du monde, les frontières administratives du Calvados, de l’Orne ou de la Seine-Maritime n’ont pas de sens. Pas davantage que celles de la Haute-Normandie et de la Basse-Normandie ». Ces dernières ont en effet été créées, à l’orée des années cinquante, pour satisfaire les visées de deux champions politiques. Totalement artificielle, cette division conduira ces deux mini-régions à l’impuissance si elles continuent à demeurer isolées et séparées par ce véritable « mur » administratif. Leur existence disjointe ne se justifie nullement. Leur unité est profonde et se fonde sur l’histoire, la culture et l’identité qu’elles ont en commun et qu’elles partagent.

À l’heure où l’on veut construire le Grand Paris, qui représentera une aire urbaine de 11 millions d’habitants, la question pour nous, Normands, se pose avec encore plus d’acuité. Que pèseront ces deux mini-régions et quel sera leur degré d’attractivité ?

Je rappelle que la Haute-Normandie représente 1, 6 million d’habitants et la Basse-Normandie 1, 4 million d’habitants, ce qui fait un total de 3 millions d’habitants.

La réunification de ces deux régions est donc une véritable nécessité, sous peine de les voir devenir des banlieues périphériques d’un Grand Paris qui concentrera tous les services, tous les centres de recherches, toutes les entreprises, tous les projets. Le Grand Paris appelle la Grande Normandie ! Atteindre une taille et une masse critiques suffisantes rendrait, autour d’un vrai projet de développement, les politiques publiques régionales plus cohérentes.

Les moyens humains, financiers et techniques seraient démultipliés. Des synergies pourraient être dégagées pour résoudre un certain nombre de dossiers structurants dans notre région. Je pense, notamment, à la question des infrastructures de transport, mais aussi à l’offre de formation, ainsi qu’aux politiques d’innovation et de recherche.

Ainsi, le regroupement de ces deux régions donnerait plus de poids politique à l’ensemble. Il simplifierait également le réseau des collectivités territoriales. Il le rendrait surtout plus intelligible et transparent, bref plus accessible à nos concitoyens.

En raison de tous ces éléments, je ne peux que me réjouir des possibilités de fusion offertes par ce projet de loi.

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