Intervention de Thierry Foucaud

Réunion du 10 décembre 2007 à 15h00
Loi de finances pour 2008 — Article 37

Photo de Thierry FoucaudThierry Foucaud :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'article 37 porte sur le plafond des emplois autorisés, aux termes de la LOLF, traduit en équivalents temps plein.

Le plafond des emplois était évidemment plus élevé pour l'année 2007 : pour mémoire, il se situait à 2 283 519 emplois, dont 2 270 840 étaient engagés sur les missions du budget général et 12 319 sur les budgets annexes.

La réduction du plafond des emplois est donc nettement plus importante que ne le laissait prévoir le nombre des suppressions de postes annoncé dans le cadrage de la loi de finances, puisque nous voyons disparaître 64 124 emplois dans l'ensemble des budgets des missions et des budgets annexes.

La principale variation affecte, bien entendu, l'éducation nationale, avec une réduction de 36 518 postes, conséquence des suppressions de postes dans la mission « Enseignement scolaire » mais aussi des transferts de postes découlant de la décentralisation de personnels non enseignants vers les collectivités territoriales.

Parmi les autres missions, peu échappent au mouvement de réduction des effectifs des différentes administrations. Même le ministère de l'intérieur voit ses postes diminuer, alors que nous avions cru comprendre que la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure avait prévu tout autre chose ! De son côté, la progression des effectifs du ministère de la justice, pourtant affirmée comme priorité, reste somme toute très modeste, le plafond des emplois étant relevé de 58 unités pour 2007, sur un total d'un peu plus de 72 000... Ce n'est sans doute pas ainsi, mes chers collègues, que nous réglerons la question de la justice accessible, de la justice de proximité, celle dont ont besoin nos concitoyens !

Une autre question est celle des perspectives ouvertes quant à l'avenir de nos emplois budgétaires et de la fonction publique tel qu'il semble se dessiner dans le cadre de la révision générale des politiques publiques. Si l'on devait suivre le principe de non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, ce seraient 130 000 emplois publics qui disparaîtraient d'ici à 2012.

Une telle évolution ne peut toutefois être détachée de certaines des grandes orientations esquissées dans ce projet de budget, orientations que nous connaissons bien.

Ce sont d'abord les répercussions de la fusion de la direction générale des impôts, la DGI, et de la direction générale de la comptabilité publique, la DGCP, fusion qui vise notamment à réaliser d'importantes économies de personnels parmi les 150 000 agents des administrations financières.

C'est encore la réduction programmée des effectifs du ministère de l'agriculture.

C'est aussi la conséquence de la modification des horaires et de l'organisation de l'enseignement scolaire, dont on souhaite pouvoir tirer la possibilité d'absorber la suppression d'un certain nombre d'heures-postes liées aux départs à la retraite. D'ores et déjà, la mise en question des zones d'éducation prioritaires et le resserrement des moyens exceptionnels dévolus aux secteurs, plus rares, classés dans un réseau « ambition réussite » permettent de « gratter » de menues économies, en tout cas en apparence...

Nous arrivons ici à l'une des questions essentielles que soulève cette politique de réduction des emplois budgétaires de l'État : quelle est la nature des économies que l'on réalise, notamment au regard des besoins, et donc de l'efficacité, de l'intervention publique ?

Rappelons qu'une bonne partie des emplois disparus des crédits budgétaires sont aujourd'hui dans le champ de la fonction publique territoriale, mouvement amplifié depuis la loi d'août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Le fait est que l'emploi public continue de croître relativement dans notre pays, du fait de l'implication de plus en plus forte des collectivités locales dans l'action publique sous toutes ses formes.

Il faut ajouter à cela plus de 760 000 salariés du secteur public qui sont en situation précaire. L'État n'est pas nécessairement le plus gros utilisateur de personnels non titulaires ; toujours est-il que, à la fin de l'année 2005, le nombre des agents concernés s'élevait à 122 638 équivalents temps plein, avec, là encore, quelques différences selon les ministères : le recours à ce type de postes est particulièrement marqué dans l'enseignement, mais aussi aux affaires étrangères, où la moitié des postes budgétaires sont pourvus ainsi, sans parler des auxiliaires recrutés dans les administrations financières ou dans les ministères dits sociaux. C'est souvent sur la base de cette précarité plus ou moins importante que l'on a pu, ces dernières années - en particulier depuis la mise en oeuvre de la LOLF -, procéder à des ajustements à la baisse des crédits de personnel.

Demeure enfin posée la question de la rémunération des agents du secteur public. Les mesures annoncées par le Gouvernement, fondées notamment sur la monétisation des heures « RTT » non récupérées, sont loin de répondre aux attentes des agents.

Tout cela tourne le dos à une véritable négociation dans la fonction publique d'État, alors qu'il serait fondamental qu'elle s'ouvre pour donner le la de la relance de la négociation collective dans notre pays et qu'elle porte à la fois sur les carrières, sur les missions de service public, sur le niveau des rémunérations, mais aussi sur le rattrapage des pertes de pouvoir d'achat enregistrées depuis 2002 ; bref, sur toute question constituant aujourd'hui le vrai débat sur le devenir du secteur public.

Tels sont, mes chers collègues, les points que nous souhaitions préciser à l'occasion de l'examen de cet article, que, bien sûr, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen ne voteront pas.

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