Le coût du bouclier fiscal aurait dû, selon vos estimations, atteindre 810 millions d'euros en 2007. Nous en sommes fort loin.
En effet, seule une poignée de contribuables, soit 3 000 à 4 000 d'entre eux, auraient fait valoir leur droit à restitution. Qui sont-ils ? Ce sont essentiellement des familles dont la fortune se situe entre 7, 4 millions d'euros et plus de 15 millions d'euros.
Vous avez beau dire, monsieur le ministre, que le bouclier fiscal concerne également des personnes modestes, vous aurez quelques difficultés à convaincre !
Dans les faits, en lieu et place de quelque 77 000 foyers aux revenus plus modestes qui, possédant une maison dont la valeur avec la spéculation immobilière a atteint 770 000 euros, se voient assujettis à I'ISF et de quelques milliers de contribuables très modestes qui peuvent même escompter se faire rembourser leur taxe foncière, à qui observe-t-on que cela profite ?
On constate qu'un cadeau fiscal d'un montant de 50 503 euros, en moyenne, est fait à moins d'un dix millième des contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu et même à moins de 1% des contribuables assujettis à l'ISF !
Pour obtenir une restitution de plus de 50 000 euros, en moyenne, il faut donc avoir un niveau d'imposition particulièrement élevé, quel que soit l'impôt retenu. Si l'on s'arrête à l'impôt sur le revenu, il faut être imposé au taux marginal de 40 %, voire très au-delà, puisqu'un revenu de 100 000 euros nets par part ne produit que 28 092 euros d'impôt.
La restitution, comme son nom l'indique, c'est ce qui dépasse les 60 % de prélèvement, soit la partie émergée de l'iceberg de l'impôt à payer. Le bouclier fiscal est donc non pas, pour l'heure, la réparation d'une fiscalité qui serait confiscatoire, mais juste un moyen d'optimisation fiscale de plus pour quelques milliers de privilégiés.
Dans Le Figaro du 6 juillet dernier, journal qui n'a pas pour habitude de contredire votre politique, monsieur le ministre, il était écrit : « Et, rien ne prouve que le nouveau dispositif - celui qui a ramené le plafonnement fiscal à 50 % dans la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, la loi TEPA -, bien plus attractif que le précédent, conduira davantage de foyers à réclamer leur chèque au fisc. Beaucoup parmi les dizaines de milliers de contribuables modestes sont convaincus qu'ils n'y ont pas droit. Ou pire, la majorité ne s'est même pas posé la question. Quant aux contribuables plus aisés, ils sont bien sûr informés de l'existence de ce dispositif, mais ils redoutent d'écoper d'un contrôle fiscal s'ils demandent leur chèque. »
Combien avons-nous vu de dispositifs d'incitation fiscale - le bouclier fiscal en est un -, annoncés avec force efforts de communication et de publicité, ne pas rencontrer finalement le succès escompté auprès de la population ?
Regardez simplement, pour ne donner qu'un exemple récent, le cas du dispositif relatif aux heures supplémentaires instauré par la loi TEPA, qui ne connaît pas le moins du monde le succès attendu au regard de la dépense qui figure à ce titre dans le collectif budgétaire de fin d'année !
Pour en finir avec ce bouclier fiscal, comment ne pas pointer du doigt que, si une dépense fiscale concerne moins de 1 % des contribuables du pays - c'est ici le cas - et porte sur moins de 1 % du total des impôts visés - c'est encore une fois ici le cas -, c'est qu'elle ne remplit pas ses objectifs généraux et paraît dépourvue de la moindre incidence sur la vie économique du pays ?
C'est sous le bénéfice de ces observations que nous vous invitons à adopter cet amendement.