Intervention de Philippe Richert

Réunion du 5 avril 2005 à 9h30
Eau et milieux aquatiques — Suite de la discussion d'un projet de loi

Photo de Philippe RichertPhilippe Richert :

Ne pourrait-on pas commencer à mettre en place, comme en Allemagne, des doubles réseaux ?

Si la réponse vous paraît évidente, mes chers collègues, essayez donc, dans un établissement accueillant du public, d'alimenter les WC avec de l'eau de pluie. Vous constaterez rapidement l'impossibilité, à cause de notre administration, notamment sanitaire, de mettre sur pied un tel projet. C'est quand même un peu étonnant. En effet, pourquoi rincer les toilettes avec de l'eau potable ? Qui irait boire l'eau des chasses d'eau ?

S'il faut donc inciter nos concitoyens à faire évoluer leurs comportements, encore faut-il que nos administrations suivent !

Ma seconde remarque se rapporte à la nécessité de traiter l'eau en considérant l'ensemble du cycle : prélèvement, transport, consommation, épuration, rejet dans le milieu, rôle dans l'écosystème et gestion hydraulique du bassin.

La préservation des potentialités de notre territoire et l'application des principes du développement durable nécessitent une intervention qui, à chaque étape, fait les choix les plus favorables à la nature, les moins agressifs, les plus réversibles.

C'est bien le choix qui est le vôtre, monsieur le ministre, comme l'atteste l'intitulé de ce projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques. Le fait que vous préconisiez le développement prioritaire des SAGE, l'application non seulement du principe pollueur-payeur, mais aussi de celui de la solidarité, répond à cette attente, oriente structurellement le texte et les mesures qui en découlent. Je vous en félicite.

Certes, il sera facile aux uns ou aux autres de gloser sur le fait, par exemple, qu'on n'impose pas aux agriculteurs de financer aujourd'hui la réparation des pollutions passées. Soyons réalistes ! S'il est indispensable que tous les utilisateurs d'eau prennent à leur charge la pollution qui leur est attribuable, on ne peut imposer à une catégorie sociale une révolution dont elle ne pourrait se remettre, non plus que de son coût. Aussi est-il nécessaire d'associer le principe du pollueur-payeur à celui de la solidarité, ce dernier étant tout aussi fondamental dans notre société.

Sans entrer dans le détail du texte ni dans celui des amendements de la commission, je voudrais maintenant exprimer quatre souhaits.

Le premier de ces souhaits porte sur l'organisation institutionnelle de la gestion de l'eau en tant que ressource et sur le rôle des différents acteurs, sans oublier la place essentielle du consommateur citoyen, qu'il faut convaincre et accompagner dans son évolution.

Je me félicite de voir confirmés tant la place que le rôle des agences de l'eau. Bien sûr, pour être en parfaite phase avec les règles et les exigences de la démocratie, leurs redevances doivent être encadrées et être validées par le Parlement. Le modèle français, avec ses deux piliers que sont les agences et les collectivités locales, a fait ses preuves et devient une référence en Europe. Mais il apparaît de plus en plus pertinent, monsieur le ministre, de développer des cohérences « infrabassins » et des politiques de solidarité au niveau du département. Non seulement l'intervention des conseils généraux est ancienne, mais encore elle est importante si l'on considère les moyens engagés, les politiques de solidarité territoriale conduites et l'assistance technique apportée et - vous l'avez rappelé - développée.

Dans mon département, le conseil général finance l'assainissement dans des proportions aussi importantes que l'agence de l'eau. Nous avons signé une convention-cadre avec l'agence de l'eau Rhin-Meuse pour les quatre prochaines années. Durant cette période, nous cofinancerons avec elle des travaux d'assainissement pour un montant de 175 millions d'euros. Cela confirme tout simplement l'importance de l'engagement financier.

Le conseil général finance de 0 à 70 % du montant des travaux d'adduction d'eau. Pourquoi une si grande différence ? La raison en est tout simplement que nous tenons compte du prix du mètre cube : là où l'eau est chère, là où elle est précieuse, là où les secteurs sont les plus fragiles, nous finançons à hauteur de 70 % ; là où l'eau est présente en plus grande quantité, là où elle n'est pas chère, nous n'intervenons pas. Hormis la collectivité départementale, qui fait cette péréquation, qui assure cette solidarité ?

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