Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi était attendu. Il est équilibré, important, très important.
Voilà un demi-siècle, notre administration répartissait les pouvoirs en matière de gestion de l'eau entre trois ministères : l'industrie, pour l'eau souterraine, l'équipement et l'agriculture. Je m'honore d'avoir, à cette époque, en tant que dirigeant d'un établissement public national, le Bureau de recherches géologiques, géophysiques et minières, mis en relation ces trois ministères de façon à permettre la création des agences de l'eau. Ce texte fondateur est aujourd'hui repris et amélioré. Il concerne un problème tout à fait capital.
Je ferai trois remarques sur des points particuliers du projet de loi et une remarque de fond.
Dans le droit-fil du rapport de M. Bruno Sido, dont l'excellence a d'ailleurs été soulignée sur l'ensemble des travées de cette assemblée, ma première remarque portera sur la nécessité de protéger l'énergie hydroélectrique. Celle-ci est tout de même la seule énergie renouvelable importante, en France et dans le monde, à part la biomasse. Compte tenu, notamment, du plan Climat, grâce auquel nous voulons dépasser les objectifs du protocole de Kyoto, il est important de protéger cette énergie au maximum, indépendamment des arguments d'ordre économique.
Ma deuxième remarque portera sur l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques, l'ONEMA.
Je suis, en général, réservé sur la création de nouvelles structures. En la circonstance, il conviendra de veiller à ce que l'ONEMA aide et utilise les structures déjà existantes. Je pense, en particulier, à l'Office international de l'eau, qui réalise un travail remarquable en matière de formation, non seulement en France, mais également à l'étranger ; je pense aussi au Plan Bleu, qui fournit de nombreuses données, notamment hydrauliques, sur l'ensemble des pays circumméditerranéens, où le problème de l'eau est crucial ; je pense également au Bureau de recherches géologiques et minières, dont le département hydraulique est de très haut niveau, au CEMAGREF, le Centre national du machinisme agricole, du génie rural, des eaux et des forêts, et, enfin, aux grandes écoles et aux universités qui effectuent des recherches dans ce domaine, notamment à Montpellier.
Toutes ces compétences doivent absolument, me semble-t-il, être utilisées et, à cet égard, l'ONEMA devra probablement beaucoup plus faire faire que faire par lui-même, notamment en ce qui concerne les études et conseils.
Ma troisième remarque concerne le financement des syndicats d'études. Le schéma d'aménagement et de gestion des eaux de la basse vallée du Var, dont mon ami Marc Lafaurie est président, ne peut pas devenir un établissement public territorial de bassin, un EPTB, la basse vallée étant trop courte. Il lui faut néanmoins trouver des financements pluriannuels. Or, le présent projet de loi ne règle pas ce problème.
Je ferai maintenant une remarque de fond.
Les risques climatiques liés à l'effet de serre vont radicalement bouleverser, et ce bientôt, dans moins de quelques décennies, l'ensemble de la gestion de l'eau. C'est donc dès à présent qu'il faut commencer de prévoir des solutions.
Les différents intervenants dans la discussion générale n'ont pas évoqué ce sujet. Il n'en est pas non plus question dans le projet de loi.
Il est pourtant nécessaire, me semble-t-il, de préparer un plan visant à diminuer l'ampleur et les conséquences des sécheresses longues, des inondations dévastatrices et inéluctables, qui surviennent déjà. Nous savons que leur nombre augmentera à très court terme. Il faut donc d'urgence préparer des programmes d'action et de prévention.
Je n'ai pas souhaité déposer d'amendements à ce sujet, car la politique de très large concertation que M. le ministre a menée durant la préparation du projet de loi doit également permettre de préparer des colloques régionaux - tant dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, à Marseille, Sophia-Antipolis ou à Montpellier, qu'en Bretagne ou ailleurs - sur les problèmes qui se poseront et s'aggraveront à très court terme. C'est une nécessité absolue. Gouverner, c'est prévoir !
L'information scientifique, les données locales, les prévisions des meilleurs spécialistes en climatologie doivent permettre aux collectivités locales et à la population de prendre conscience des faits et des précautions à prendre, de l'importance accrue de l'économie de l'eau. Elles doivent également leur permettre de connaître les nouvelles méthodes utilisables en agriculture, ainsi qu'un certain nombre des modifications nécessaires des cultures, voire l'utilisation d'organismes génétiquement modifiés, qui permettront à l'économie agricole de tenir compte des changements de climat inéluctables.
Commençons à examiner la situation ; nous serons cependant obligés, d'ici peu de temps, de prendre des décisions majeures, de prévoir à la fois de grands programmes de travaux pour permettre la constitution de réserves et de grands programmes scientifiques de modification des méthodes culturales.