Quoi qu'il en soit, les 15 000 postes de fonctionnaires supprimés devraient entraîner pour l'État un gain de 250 à 300 millions d'euros, au mieux.
De façon plus générale, le Gouvernement a annoncé que la lutte contre la dégradation des comptes publics et la réduction du poids de la dette reposaient sur une évolution à la baisse de la dépense publique.
La dépense publique votée pour 2006 est de 276, 3 milliards d'euros Si elle était indexée sur l'inflation, comme c'est le cas depuis trois ans, elle atteindrait 281, 27 milliards d'euros.
Comme le Gouvernement souhaite qu'elle évolue moins vite que l'évolution des prix, à concurrence d'un point, la dépense publique devrait s'élever à 278, 5 milliards d'euros en 2007. Toutefois, l'économie annuelle ainsi réalisée ne serait que de 2, 75 milliards d'euros, ce qui est peu par rapport aux 13 milliards d'euros de programmes non financés !
Ces économies sans effets significatifs participent d'une politique à courte vue. En effet, la réduction de la dépense publique en période de creux conjoncturel peut avoir des effets récessifs.
L'INSEE vient d'ailleurs d'indiquer que, s'il a révisé à la baisse le taux de croissance de notre pays pour 2005, de 1, 4 % à 1, 2 % du PIB, c'est en raison de la faiblesse de la dépense publique cette même année.
S'agissant à présent des recettes, quand le Gouvernement a voulu mettre en place sa réforme de l'impôt sur le revenu, votée dans la loi de finances de 2006, il a entrepris de réduire cet impôt et de le démanteler en s'attaquant à sa progressivité et, partant, à sa vertu redistributrice.
Or cette réforme, qui entrera en vigueur en 2007, privera l'État de 3, 6 milliards d'euros par an, au détriment de la justice fiscale, mais aussi des comptes publics.
Certes, il y a des gagnants ! Ce sont les contribuables dont les revenus se situent dans les tranches d'imposition les plus hautes. Les 3, 6 milliards d'euros d'allégements bénéficieront pour 70 % aux 20 % des foyers imposables les plus favorisés. Les plus gros gagnants, c'est-à-dire 0, 3 % des ménages, bénéficieront du cinquième du coût total de la réforme.
Les autres gagnants - si l'on peut dire, puisque ce sont souvent les mêmes contribuables que précédemment -, ce sont les titulaires de revenus fonciers qui disposent d'un capital immobilier. En effet, l'intégration de l'abattement de 20 % dans le barème de l'impôt sur le revenu et la suppression de la contribution sur les revenus locatifs font plus que compenser la disparition de la déduction forfaitaire.
Toutefois, il y a aussi des non-gagnants, peut-être même des perdants ! Ce sont les classes moyennes, les vraies : pour elles, le gain est minime, sinon inexistant, car elles ne peuvent profiter « en bas » de l'augmentation de la prime pour l'emploi, ni « en haut » de la réforme du barème de l'impôt sur le revenu. Certains contribuables, et ils sont nombreux, comme ces couples bi-actifs dont chaque membre gagne l'équivalent de 1, 5 SMIC par mois, ne verront aucunement leur situation s'améliorer.
D'un point de vue économique, cette réforme est non seulement inefficace, mais encore contre-productive, car elle n'encourage pas la demande ni, partant, l'investissement. En effet, elle ne fera sentir ses effets qu'en 2007 et ne bénéficiera qu'à des ménages favorisés, qui ne s'en serviront sans doute pas pour consommer et donc relancer la croissance.
Au contraire, le creusement des déficits et l'absence de politique de relance de la croissance ne peuvent qu'entretenir les inquiétudes et les incitations à épargner, du moins chez ceux qui ont la capacité de le faire.
Le plafonnement de la taxe professionnelle à 3, 5 % de la valeur ajoutée, qui aura un coût plus important à partir de 2007, et la suppression de la contribution Delalande représentent d'autres restrictions des moyens publics.
Le Gouvernement a présenté un plan national d'action pour 2006-2010. Destiné à développer l'emploi des séniors, il est censé permettre à la France d'atteindre l'objectif européen d'un taux d'emploi des 55-64 ans de 50 % en 2010, contre 37 % en 2004.
La principale mesure de ce plan est, de façon paradoxale, la suppression progressive, d'ici à 2010, de la contribution Delalande. Cette taxe acquittée par les entreprises qui licencient des salariés de plus de 50 ans a pourtant été instituée par la droite afin d'inciter les entreprises à ne pas se séparer de leurs séniors.
Il est vrai qu'en toute occasion l'important pour les entreprises est de contribuer le moins possible à l'effort financier national, et qu'en l'occurrence elles n'ont aucune intention de jouer le jeu. Au contraire, elles souhaitent profiter de l'aubaine des départs anticipés.
Quoi qu'il en soit, ce plan coûtera 500 millions d'euros par an, dont 10 millions d'euros de dépenses supplémentaires, et surtout 500 millions d'euros de moindres recettes, soit l'équivalent du coût de la suppression de la contribution Delalande dans le budget de l'État à compter de 2010.
En conclusion, en l'état actuel des choses, avec la poursuite de la même politique, l'aggravation des finances publiques est, hélas ! inéluctable.
Les grandes mesures pluriannuelles annoncées récemment ne sont pas financées. La question est renvoyée au-delà des élections de 2007. Le gouvernement qui sera issu des urnes devra alors faire face à un trou de 11 milliards d'euros.
Les déficits publics ont été maintenus en deçà des 3 % du PIB visés en 2005 grâce, principalement, à la soulte d'EDF et à un acompte de l'impôt sur les sociétés, événements exceptionnels qui ne se renouvelleront pas.
Le Gouvernement a augmenté le ratio de la dette de 8 points en quatre ans. Sa diminution ne pourra être que progressive, et des engagements chiffrés optimistes me semblent hasardeux.
En 2005, le Gouvernement a accru les prélèvements obligatoires de 13 milliards d'euros. Afin d'« arranger » un budget plus aisé à exécuter que ne le sera celui de 2007, il a procédé à des manipulations budgétaires qui ont été dénoncés tant par la Cour des comptes que par la Commission européenne.
Ce budget pour 2007 devra donc être corrigé au printemps prochain, sur la base, comme je le soulignais tout à l'heure, des propositions formulées dans le projet des socialistes.