Séance en hémicycle du 29 juin 2006 à 9h30

Résumé de la séance

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  • messieurs

La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

M. le président. J'ai le très profond regret de vous faire part du décès brutal de notre collègue Pierre-Yvon Trémel, sénateur des Côtes-d'Armor depuis 1998.

MM. les ministres, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Chacun de nous a pu apprécier la personnalité attachante de notre excellent collègue et la qualité de ses interventions en commission et en séance publique.

Je prononcerai son éloge funèbre ultérieurement.

Pour l'heure, au nom du Sénat, je présente nos condoléances les plus attristées à toute sa famille et aux membres du groupe socialiste du Sénat et partage leur peine.

MM. les ministres, Mmes et MM. les sénateurs observent une minute de silence.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat d'orientation, sur les finances publiques et les finances sociales.

Messieurs les ministres, messieurs les présidents de commission, mes chers collègues, c'est avec un très grand plaisir que j'ouvre ce débat d'orientation budgétaire, le dixième depuis 1990. C'est sur l'initiative de notre commission des finances que l'on doit ce temps fort de notre année financière.

La parole est à M. Thierry Breton, ministre.

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

Monsieur le président, messieurs les présidents de commission, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux d'abord vous dire combien nous sommes heureux, Jean-François Copé, Xavier Bertrand et moi-même, de venir vous présenter aujourd'hui les grandes orientations de nos finances publiques pour l'exercice 2007.

Ce débat d'orientation budgétaire, nous avons déjà eu l'occasion de l'évoquer en commission, est historique, et ce à trois titres.

Tout d'abord, le document d'orientation budgétaire que vous avez devant vous intègre de manière exceptionnelle l'engagement national de désendettement dont le Premier ministre avait demandé la mise en place dès le mois de janvier, à l'occasion de la conférence nationale des finances publiques, et à la suite du rapport sur la dette que j'avais commandé à M. Pébereau.

Je veux dire ici combien je me réjouis du consensus qui est ressorti des travaux de la commission des finances, en tout cas en ce qui concerne l'objectif, comme M. le président de la commission des finances a pu le vérifier.

Ensuite, comme à l'habitude, vous seront présentées les grandes lignes du budget de l'État pour 2007, dont nous avons voulu faire une étape essentielle de la trajectoire de désendettement, une étape historique, même, puisque la dépense de l'État progressera en 2007 d'un point de moins que l'inflation, du jamais vu depuis plus de vingt ans !

Enfin, ce débat d'orientation budgétaire intègre les grandes orientations de la politique de sécurité sociale et du projet de loi de financement de la sécurité sociale présenté à l'automne : je laisserai le soin à Xavier Bertrand de vous les détailler.

Sans plus attendre, mesdames et messieurs les sénateurs, je souhaite entrer dans le vif du sujet.

Concernant les perspectives économiques, je dirai quelques mots sur les hypothèses de croissance que nous envisageons pour la construction du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Les bons résultats de la croissance au premier trimestre s'inscrivent clairement dans la fourchette retenue par le Gouvernement pour l'ensemble de l'année 2006, à savoir entre 2 % et 2, 5 %. La composition de cette croissance confirme d'ailleurs l'excellente dynamique de notre économie.

D'une part, la consommation des ménages, premier moteur de l'activité, a progressé très vite, de 0, 8 %, au premier trimestre, soit un rythme annualisé de 3, 2 %, apportant une contribution d'un demi-point de PIB à la croissance.

D'autre part, l'exportation, second moteur de l'activité, poursuit son net redressement depuis l'été 2005 et affiche une nouvelle progression de 2, 9 % sur le premier trimestre, à un rythme annualisé de près de 12 % en croissance, soit le meilleur résultat depuis six ans ! Le commerce extérieur apporte ainsi une contribution fortement positive à la croissance, de 0, 6 % au premier trimestre.

Les autres indicateurs confirment assez largement cet optimisme sur le deuxième trimestre.

Les enquêtes disponibles font apparaître une poursuite, voire une accélération de cette dynamique au deuxième trimestre : les enquêtes dans l'industrie sont proches de leur plus haut niveau depuis cinq ans, celle de la Banque de France notamment ; les enquêtes dans les autres secteurs, particulièrement dans les services et la construction, sont également nettement au-dessus de leur moyenne.

L'inflation reste bien contenue, autour de 2 % sur un an, malgré la hausse du prix du pétrole. Contrairement à ce que certains commentateurs ont pu écrire, ici ou là, je ne vois pas d'effet de second tour dans les chiffres de cette inflation.

Du reste, ce rythme d'inflation soutient le pouvoir d'achat et la consommation des Français, qui n'ont jamais autant consommé, comme le confirment les statistiques mois après mois.

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

La conjoncture de nos principaux partenaires commerciaux est par ailleurs favorable. En Allemagne, notre premier partenaire commercial, le moral des industriels est à son meilleur niveau depuis la réunification, ce qui est très important pour nos entreprises.

Enfin et surtout, la situation de l'emploi ne cesse de s'améliorer : le taux de chômage a diminué pour atteindre 9, 3 % à la fin du mois d'avril - soit 210 000 demandeurs d'emploi en moins depuis un an. D'après les orientations fournies par mon ministère, nous devrions franchir avant la fin de l'année la barre des 9 % et nous attendons plus de 200 000 créations d'emploi en 2006.

Vous le voyez, la phase de reprise conjoncturelle qu'a connue l'économie française au second semestre de l'an dernier est bel et bien derrière nous : notre économie est désormais installée sur une tendance de 2 % à 2, 5 % de croissance, soit la fourchette retenue pour construire le projet de loi de finances pour 2006.

Je note d'ailleurs que la note de conjoncture de l'INSEE publiée la semaine dernière accrédite ce scénario.

La prévision de croissance de l'INSEE, traditionnellement prudente, se situe dans notre fourchette, avec 2 % pour cette année et des progressions trimestrielles sur les trois trimestres à venir qui se situent à un rythme de 2, 4 % en taux annualisé, c'est-à-dire à 0, 6 % par trimestre. L'INSEE table en outre sur un chômage revenu à moins de 9 % en fin d'année.

Comme quoi le scénario que nous défendons avec mes collègues ministres et avec nos collaborateurs de Bercy n'est finalement pas si irréaliste !

Pour 2007 et les années suivantes, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis confiant dans la capacité de notre économie à absorber les chocs comme la hausse du prix du pétrole ou l'appréciation de l'euro et à rester sur un rythme de croissance de 2 % à 2, 5 % ; il s'agit d'une hypothèse prudente.

Vous le savez, notre ambition, pour notre pays, est une croissance comprise entre 3 % et 4 %. C'est pourquoi j'ai aussi voulu envisager, dans ce débat d'orientation budgétaire, un scénario à 3 % de croissance, qui nous permettrait d'atteindre plus rapidement - c'est-à-dire avant 2010 - nos objectifs de finances publiques, tout en améliorant le niveau de vie de nos concitoyens.

J'en viens maintenant au coeur de ce débat d'orientation budgétaire de 2006 : l'engagement national de désendettement.

Celui-ci doit nous permettre de parvenir à l'équilibre des comptes publics et de ramener notre endettement sous les 60 % du produit intérieur brut à l'horizon de 2010.

Nous avons construit cette trajectoire de désendettement et d'assainissement des finances publiques en quatre étapes essentielles, qui constituent autant d'engagements.

J'ai d'ailleurs souhaité que chacun de ces engagements fasse l'objet de résultats chiffrés, mesurables, sur lesquels nous pourrons être jugés. Nous associons des moyens précis pour arriver à atteindre ces objectifs que je déclinerai dans un instant.

Chacun de ces moyens s'inscrit dans la stratégie globale de désendettement, qui repose sur les trois piliers que je ne cesse de marteler.

Le premier est le relèvement de notre croissance, grâce à la réforme fiscale, à celle du marché du travail, à la priorité donnée à la recherche et au développement, à la politique de développement des PME. Toutes ces mesures s'inscrivent parfaitement dans la contribution française à la stratégie européenne de Lisbonne.

Le deuxième pilier est la maîtrise de la dépense. La dépense de l'État n'aura pas progressé plus vite que l'inflation pendant quatre ans ! Désormais nous proposons qu'elle baisse d'un point - c'est une première dans notre histoire économique -, car cela me semble indispensable.

Le troisième pilier est la cession d'actifs non stratégiques, et plus généralement la recherche systématique de tous les leviers de désendettement. Ainsi, plus de 15 milliards d'euros auront été affectés au désendettement sur les années 2005 et 2006.

Je reviens rapidement sur notre premier engagement pour 2005, à savoir ramener le déficit public sous la barre des 3 %.

Tel était l'engagement que j'avais pris devant vous il y a un an, en présentant mes objectifs de finances publiques. Cet engagement a été tenu - et au-delà ! - malgré certains pronostics négatifs, voire ironiques. Finalement, nous avons obtenu exactement une baisse de 2, 88 % !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

La Cour des comptes dit que ce n'est pas vrai ! C'est une grosse manipulation !

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

Je précise, du reste, que la Commission européenne, elle-même, nous a donné quitus de ce résultat par la voix de M. Almunia, commissaire européen, qui est chargé de le vérifier en s'appuyant sur les services d'Eurostat.

Je note, d'ailleurs, que la France est le seul des quatre grands pays européens - Allemagne, Royaume-Uni, Italie - à être revenu sous la barre des 3 %.

Notre deuxième engagement porte sur 2006 : réduire l'endettement dès cette année d'au moins deux points de PIB. Je prends l'engagement de ramener l'endettement de 66, 6 % à moins de 64, 6 % du PIB d'ici à la fin de cette année.

Cela montrera que l'effort de désendettement, qui doit par nature s'inscrire dans la durée, peut aussi porter ses premiers fruits rapidement. C'est un point qui me paraît absolument essentiel pour nos compatriotes.

À cet égard, je comprends pleinement, monsieur le rapporteur général, votre voeu de fixer des objectifs à long terme, c'est-à-dire à 2030. C'est vrai, la dette est un enjeu de long terme, qui demande un effort dans la durée. Encore faut-il commencer dès maintenant à en infléchir la tendance !

Pour autant je suis convaincu que nous ne pouvons pas attendre pour revenir dans les clous de Maastricht en ce qui concerne la dette, soit pour revenir en dessous de la barre des 60 % du PIB.

En outre, avoir des objectifs à court terme me paraît indispensable pour pouvoir mobiliser les Français sur cet enjeu majeur du désendettement. Comment ? Par la mise sous tension systématique de l'ensemble des leviers disponibles de désendettement.

J'ai ainsi pris, mesdames, messieurs les sénateurs, la décision d'actionner très rapidement trois leviers.

D'abord, les recettes de cessions d'actifs seront prioritairement affectées au désendettement. L'affectation du produit des cessions des concessions autoroutières représente déjà 10 milliards d'euros.

En outre, la vente des titres d'Alstom et d'Aéroports de Paris représente plus de 2 milliards d'euros supplémentaires. Au total, entre le 1er janvier et le 31 mai 2006, l'Agence France Trésor a déjà racheté pour plus de 8, 6 milliards d'euros de dette, pour l'essentiel grâce aux recettes de cessions.

Ensuite, le pilotage de la trésorerie de l'État sera profondément infléchi. J'ai décidé d'un principe très simple : pas un euro d'endettement de plus que le strict nécessaire pour faire face à la gestion courante !

Par conséquent, tout en veillant à ce que sa capacité de disposer de la trésorerie dont l'État a besoin reste intacte, l'Agence France Trésor va, d'une part, se doter de nouveaux outils tels qu'un bon du Trésor à taux fixe, un BTF, à très court terme pour limiter au minimum son matelas de sécurité et, d'autre part, bénéficier d'une amélioration des remontées d'information de la part des administrations dépensières, au sens non péjoratif du terme.

Dans ces conditions, j'ai demandé à l'Agence France Trésor de limiter les émissions de dette aux stricts besoins de la gestion courante.

Ainsi, l'encours de bons du Trésor à court terme a été réduit de 11, 3 milliards d'euros entre le 31 décembre 2005 et le 31 mai 2006.

En outre, je peux d'ores et déjà vous annoncer que l'État va, pour la première fois depuis vingt ans, réduire son appel au marché de 10 milliards d'euros par rapport au niveau prévu dans le programme d'émission initial. Le programme en 2006 de financement net à moyen et à long terme de l'État passera donc de 119, 5 milliards à 109, 5 milliards d'euros.

Enfin, cet effort d'optimisation de la trésorerie doit être partagé par l'ensemble des acteurs publics : État, organismes sociaux, collectivités locales, ou structures comme la Caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES, le Fonds de solidarité vieillesse, le FSV et le Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, le FFIPSA par exemple.

C'est dans cet esprit que le directeur général du Trésor et de la politique économique coordonnera un comité interministériel de la trésorerie des administrations publiques, dont j'ai annoncé la création à l'occasion du Conseil d'orientation des finances publiques que j'ai présidé la semaine dernière.

Cependant, en même temps que nous réduisons de manière substantielle l'endettement, nous poursuivons nos efforts de réduction du déficit public, qui passera de 2, 9 % à 2, 8 %, malgré le contrecoup de la soulte des industries électriques et gazières, les IEG, pour 0, 5 point de PIB l'année dernière.

D'abord, l'exécution du budget de 2006 sera tenue de manière rigoureuse, à l'euro près. Nous avons, vous le savez, mis en réserve 6 milliards d'euros dès le début de l'année, aux termes de la loi organique relative aux lois de finances.

Concernant les comptes sociaux, nous sommes globalement dans les clous de ce qui était prévu au moment de la loi de financement de la sécurité sociale ; Xavier Bertrand y reviendra.

Notre troisième engagement pour 2007 est de ramener le déficit public sous le seuil du déficit stabilisant.

C'est, mesdames, messieurs les sénateurs, la condition nécessaire pour rendre pérenne la dynamique du désendettement amorcée cette année.

Cette notion est clef dans notre stratégie de désendettement, car le déficit stabilisant est le niveau de déficit pour lequel le ratio dette sur PIB se stabilise en l'absence de tout mouvement d'actifs et de passifs. En d'autres termes, dès que ce déficit est atteint, toute amélioration nouvelle du déficit contribue automatiquement à réduire la dette.

Avec une croissance de l'ordre de 2, 25 %, ce déficit stabilisant est d'environ 2, 5 % : c'est bien l'objectif que nous nous fixons pour 2007. Comment l'atteindrons-nous ? Jean-François Copé l'expliquera dans un instant.

Pour ma part, je me contenterai de trois remarques.

D'abord, la dépense de l'État l'année prochaine progressera de 1 % moins vite que l'inflation, c'est ce qu'on appelle le « moins un volume ». Je veux souligner que nous appliquerons à Bercy, dès l'année prochaine, la règle du « zéro valeur », c'est-à-dire une stabilisation de nos dépenses en euros courants !

Ensuite, je vous rappelle que ce projet de loi de finances permettra de financer la réforme fiscale par la baisse de la dépense budgétaire.

Enfin, comme le Premier ministre l'a annoncé, la baisse des plafonds d'effectifs sera précisément de 15 032 postes. La baisse pour Bercy sera de 2 988 postes.

Quant à notre quatrième engagement, il est de mettre en oeuvre dès aujourd'hui les outils de gouvernance de l'ensemble de nos finances publiques indispensables pour atteindre l'équilibre des comptes au plus tard en 2010 et passer sous les 60 % d'endettement.

À partir de 2008, pour atteindre ces objectifs, l'effort de maîtrise de la dépense devra se poursuivre. Ce ne sera possible qu'en associant encore mieux l'ensemble des acteurs. C'est tout l'enjeu du Conseil d'orientation des finances publiques que nous avons mis sur les rails la semaine dernière. Un certain nombre d'entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, y ont participé, et je les en remercie.

Ces objectifs sont ambitieux, mais parfaitement crédibles. Sous l'hypothèse d'une maîtrise collective maintenue de la dépense publique, l'objectif serait atteint en 2009 avec 3 % de croissance par an. Cependant, même en retenant une hypothèse prudente de croissance de 2, 25 %, l'objectif serait atteint en 2010.

Outre la croissance, l'autre enjeu est donc bien la maîtrise de l'ensemble des dépenses publiques.

Il faudra, d'abord, maîtriser les dépenses de l'Etat, qui doivent rejoindre progressivement le « zéro valeur », comme nous l'avons fait nous-mêmes à Bercy dès cette année.

Il faudra, ensuite, maîtriser les dépenses sociales, dont il faudra limiter la progression à « plus un volume » sur la période.

Enfin, il faudra maîtriser les dépenses locales, voire les faire tendre vers le « zéro volume », dans le respect évidemment de l'autonomie financière des collectivités locales, pour ne pas risquer une augmentation préjudiciable des prélèvements obligatoires.

L'outil de cette réduction ordonnée et maîtrisée des dépenses publiques est une nouvelle gouvernance plus stable et plus vertueuse des finances publiques que le Conseil d'orientation des finances publiques est chargé de proposer.

Comme premières pistes de travail, je lui ai soumis les différentes options de rénovation de la gouvernance de nos finances publiques, qui figurent dans le débat d'orientation budgétaire ou qui ont été évoquées avec les collectivités locales lors de la concertation engagée au mois de mai.

Pour ce qui est de l'État, la mise en oeuvre de la LOLF assure une meilleure gouvernance des finances publiques. Les audits systématiques ouvrent des pistes nouvelles de réforme afin de dépenser mieux et moins à qualité de service public maintenue ou améliorée.

Pour ce qui est des collectivités locales, dans le cadre du Conseil d'orientation des finances publiques, le Gouvernement souhaite, d'une part, mieux les associer aux décisions les concernant et élargir leurs marges d'initiative et d'action dans le champ des compétences qui leur ont été transférées et, d'autre part, réfléchir aux moyens d'une meilleure maîtrise de la dépense locale ; Jean-François Copé y reviendra dans un instant.

Enfin, pour ce qui est des organismes sociaux je laisse évidemment Xavier Bertrand le soin de revenir sur ces pistes plus en détail.

Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement vous présente aujourd'hui, par ce débat d'orientation budgétaire, un acte majeur de responsabilité politique.

Les efforts inédits de pédagogie et de sensibilisation menés par ce Gouvernement quant aux risques d'un endettement incontrôlé de notre société ont porté leurs fruits.

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

Chacune et chacun ont pu s'approprier le sujet.

Je constate que les Français considèrent aujourd'hui la dette publique comme l'une de leurs cinq préoccupations majeures. Il était temps de s'en préoccuper et je regrette que certains, par des programmes qui fleurissent ici ou là, contribuent de nouveau à accroître potentiellement cet endettement. Je n'ai pas cité le nom des personnes, mais elles se sont reconnues !

Jean-François Copé, qui a fait un chiffrage précis de l'incidence d'un certain nombre de ces programmes sur l'endettement de la nation, reviendra sur ce point.

Je suis donc convaincu, mesdames, messieurs les sénateurs, que les orientations que nous sommes venus vous présenter aujourd'hui répondent aux inquiétudes de nos concitoyens.

Ce programme pluriannuel de désendettement consiste à dire non pas « vous verrez plus tard », mais « donnons-nous les moyens d'agir et de juger sur pièces dès aujourd'hui. » !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Jean-François Copé, ministre délégué.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget dont nous vous présentons avec Thierry Breton aujourd'hui les grandes orientations est un rendez-vous bien particulier.

Il s'agit de vous présenter les orientations du dernier budget de cette législature.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

C'est le moment privilégié de faire le point sur les priorités sur lesquelles nous avons été élus en 2002 et sur lesquelles nous avons des comptes à rendre aux Français

C'est évidemment aussi l'occasion pour nous de prendre date et de marquer nos choix pour l'avenir. Dans ce domaine, croyez-moi, nous ne serons pas en arrière de la main !

Pour construire ce budget et vous présenter ses orientations, nous avons profité d'un contexte totalement inédit.

D'une part, des outils nouveaux sont désormais à notre disposition à travers une nouvelle constitution financière, la LOLF, et le rapprochement entre le ministère du budget et celui de la réforme de l'État. D'autre part, le rapport Pébereau sur l'endettement de la France, qui a été commandé par Thierry Breton, représente également une opportunité remarquable.

Toutes les conditions sont donc réunies pour vous présenter un budget dont le contenu diffère assez largement des précédents. Néanmoins, il continue de s'inscrire dans ce que nous avons fait depuis le début de la législature. Ainsi, nous fixons trois objectifs.

Premier objectif, on remplit le contrat passé par les Français en 2002. La totalité des priorités sur lesquelles les Français attendent de nous des résultats sont financées.

Tout d'abord, en ce qui concerne la restauration de l'autorité de l'État, qu'il s'agisse de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, du budget de la justice ou de la loi de programmation militaire, les crédits sont au rendez-vous.

La loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure est appliquée, puisque 1 787 postes en équivalent temps plein de gendarmes et de policiers seront créés. Au total, sur l'ensemble de la législature, plus de 12 000 emplois de policiers et de gendarmes auront été créés auxquels s'ajoutent 2 000 adjoints de sécurité.

Le budget de la justice augmente de 5 %. Il est vrai qu'un peu de retard avait été pris en raison de lourds programmes d'investissement, mais il sera comblé.

Quant à la loi de programmation militaire, elle est entièrement respectée pour la cinquième année.

J'ajoute que la France respecte ses engagements en matière d'aide publique au développement, puisque le seuil de 0, 5 % du revenu national brut sera atteint, conformément à ce qu'avait décidé le Chef de l'État.

Ensuite, en ce qui concerne la nécessité de répondre aux défis de l'avenir, ce budget traduit les engagements précis que nous avons pris en matière d'enseignement supérieur et de recherche : 1 milliard d'euros de moyens supplémentaires sont dégagés en leur faveur et 1 500 emplois seront créés dans les universités et les établissements publics de recherche. Là encore, nous sommes au rendez-vous !

Deuxième objectif, nous rendons un meilleur service public aux Français.

Nous avons bien évidemment à coeur de dépenser moins, mais surtout de dépenser mieux. C'est ce qui marque la différence. Comme l'a dit Thierry Breton, la dépense publique est en baisse. Pour la première fois depuis très longtemps, elle progressera moins que l'inflation.

C'est à l'idée de créer une administration plus moderne et moins coûteuse au service des Français que nous travaillons. Dans cet objectif, nous avons décidé de nous appuyer sur trois outils nouveaux.

Le premier est utilisé tous les jours par les Français, je veux parler des nouvelles technologies.

Nous avons l'intention - c'est tout l'intérêt du rapprochement du ministère du budget et de celui de la réforme de l'État - de mettre Internet à tous les étages. Ainsi, près de six millions de Français ont déclaré cette année leurs impôts sur Internet. C'est un record absolu ! À la clé, il y a un meilleur service rendu aux Français, une administration qui se modernise et de moindres besoins en termes d'effectifs.

Le deuxième outil, ce sont les audits de modernisation.

J'ai déjà eu l'occasion d'en parler au Sénat, en particulier devant la commission des finances : il y a six mois, j'ai créé un programme inédit. Ainsi, d'ici à la fin de l'été, 100 audits, qui couvriront 100 milliards d'euros sur les 266 milliards d'euros du budget de l'État, radiographieront l'ensemble des grands programmes de l'État. L'objectif est de faire la chasse aux gaspillages, de chercher des gains de productivité, de mesurer en permanence l'efficacité de la dépense publique afin que les Français en aient pour leurs impôts, que les usagers voient le service public se moderniser et que les fonctionnaires puissent directement profiter des gains de productivité réalisés.

J'ai d'ailleurs lancé cette semaine la quatrième vague, qui comprend 35 audits recouvrant 38 milliards d'euros, sur différents sujets, tels que la dématérialisation de la chaîne pénale, la mise en place de l'agence de délivrance des titres sécurisés de l'État, les aides de l'État accordées aux entreprises, les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux ou encore l'entretien de l'immobilier de l'État.

Pour certains ministères, les audits ont montré des gisements de modernisation considérables. J'ai évoqué tout à l'heure la déclaration d'impôt sur Internet. Sachez que cela représente 750 emplois.

Je pourrais aussi parler de l'audit sur les décharges de services des enseignants du second degré. Je vous rappelle qu'elles représentent l'équivalent de 28 000 postes et qu'elles sont régies par des textes datant de 1950. L'audit remarquablement réalisé sur l'initiative de Gilles de Robien a conclu à la possibilité de supprimer 10 000 emplois à terme. Néanmoins, nous comptons procéder de manière intelligente, concertée, progressive, adaptée. Ce sont donc 3 000 emplois qui seront économisés cette année.

Le troisième outil, ce sont les outils d'intéressement à la réforme.

Il s'agit des contrats de performance. L'objectif est que tous les ministères puissent signer avec le ministère des finances un contrat d'objectifs visant à moderniser l'administration de l'État.

Un ministre doit bien sûr porter une ligne politique, décider, veiller à ce que les choses avancent et à ce que les réformes soient engagées. Mais il est aussi le patron de son administration. Il a la mission de la moderniser sans cesse. De ce point de vue, les contrats de performance seront des éléments clés.

Thierry Breton et moi-même avons signé ce type de contrat avec l'ensemble de nos directeurs à Bercy. D'autres ministères agissent de la même manière. Je pense, par exemple, au ministère de l'équipement, qui réduira ses effectifs de 1 267 postes en équivalent temps plein.

À travers ces trois leviers, on offre un service public complètement rénové et l'on ouvre de nouvelles voies à la modernisation de notre pays dans l'avenir. L'objectif est de rendre ensemble le meilleur service public au meilleur coût. Comme par hasard, quand on le fait, la dépense publique diminue.

À cet égard, je voudrais prendre un engagement très clair : aucune des baisses de crédits ou des diminutions d'effectifs figurant dans ce budget ne portera atteinte à la qualité du service public.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

En particulier, le choix que nous avons fait concernant les 15 000 départs à la retraite non financés - en réalité moins 19 000 et plus 4 000 - est à chaque fois parfaitement argumenté et documenté.

Par exemple, le ministre de l'éducation nationale, Gilles de Robien, a scrupuleusement veillé à ce que les décisions qu'il a prises et qu'il a soumises au Premier ministre soient à chaque fois parfaitement justifiées. Elles sont fondées, soit sur le résultat des audits, soit sur la réalité démographique.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Prenons le cas des décharges de service des enseignements du second degré, qui ont fait l'objet d'une décision courageuse. Voilà en effet des années que les décisions dans ce domaine sont différées. Il a pris l'engagement, et je m'inscris dans ses pas, qu'il n'y aura aucune fermeture de classe, ni aucune baisse d'effectifs dans les classes, ni, contrairement à ce que j'ai pu entendre ici ou là, aucune réduction du nombre de classes accueillant des enfants handicapés.

Exclamations dubitatives sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Je le souligne, car la polémique qui s'est développée sur ce sujet est regrettable. Nous concourons tous au même service, celui de l'intérêt général !

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Il faudra donc faire très attention à éviter la caricature lors du débat budgétaire de l'automne. Rappelons que, lorsque l'on parle de 15 000 fonctionnaires de moins, il s'agit bien entendu de départs à la retraite non remplacés à un moment où le pic sera considérable, à savoir entre 70 000 et 80 000 départs à la retraite. Il faut donc replacer cette notion dans ses justes perspectives.

Je le répète, ces réductions sont totalement argumentées. Avec votre concours, mesdames, messieurs les sénateurs, je veillerai durant tout le débat budgétaire à en faire la démonstration.

Enfin, je serai attentif au fait que le contrat de performance soit « gagnant-gagnant ». Comme je l'ai dit, la négociation avec tous les ministères s'est déroulée dans un contexte très nouveau et elle n'a donné lieu à aucun passe-droit. Il n'y a donc eu ni perdant ni gagnant, car ce n'est pas l'esprit de la LOLF.

Souvenez-vous ! Par le passé, les ministres satisfaits étaient ceux qui pouvaient venir annoncer dans cet hémicycle que leur budget avait augmenté. Ils montraient ainsi leur poids politique à la représentation nationale, à la presse et parfois aux Français.

Demain, les ministres qui réussiront ne seront pas ceux qui auront augmenté leur budget, mais ceux qui auront respecté les engagements pris dans le cadre de la LOLF. Émergeront donc de nouvelles stars que l'on ne connaissait pas forcément auparavant, qui valoriseront leur travail à travers les résultats obtenus. Voilà un point qui, à mon sens, changera beaucoup le regard des Français vis-à-vis des décideurs politiques.

Vous le voyez, à travers nos choix, nous assumons nos responsabilités. C'est d'autant plus important que nous aborderons le débat budgétaire à l'automne dans un contexte bien particulier, celui d'une année précédant l'élection présidentielle.

Sourires

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

J'entends bien faire en sorte qu'à l'occasion de l'examen du projet de budget nous ayons un débat politique au sens noble du terme. Il faudra mettre les pieds dans le plat, et la majorité et l'opposition seront invitées à dire à quoi doit servir l'argent public.

Ce débat ne sera pas inutile, car gouverner, c'est aussi hiérarchiser les priorités, être cohérent avec les engagements que nous prenons devant les Français. De ce point de vue, ce budget nous permettra de prendre date. Et le choix sera simple.

Le premier choix, c'est celui de la responsabilité et du réalisme. Il faudra être capable de dire aux Français : « Nous financerons la totalité des priorités politiques sur lesquelles nous nous engageons et sur lesquelles vous attendez des résultats, à savoir les grandes missions régaliennes de l'État : la sécurité, la défense, la justice, l'éducation, l'emploi. »

Il faudra également veiller en permanence à moderniser l'État en évitant de dire systématiquement que l'administration fonctionne moins bien si l'on ne crée pas plus de postes. Nous sommes capables de faire la démonstration inverse et d'affecter les postes de fonctionnaire là où c'est nécessaire, là où nous avons besoin de moderniser notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Ce n'est pas vrai. Il manque de tout partout !

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

J'ai beaucoup de respect pour le groupe communiste, mais je suis fatigué d'entendre depuis des années ...

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

... - je l'entendais déjà quand j'étais petit - l'idée selon laquelle l'administration fonctionne moins bien si l'on n'augmente pas sans arrêt les postes dans l'administration.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Sur ces sujets, on entend les mêmes propos démagogiques, et je le regrette !

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Avec ce budget, il n'y aura aucune suppression de postes. Quant aux départs à la retraite non remplacés, ils seront démontrés, justifiés et documentés. Cela s'appelle l'engagement politique, la modernité !

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Les réactions que j'ai entendues à gauche de l'hémicycle me conduisent à évoquer le deuxième choix, dont vous avez été l'illustration souriante, madame Borvo Cohen-Seat

Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Je me permets de vous dire que désormais, sur ce sujet, nous ne vous lâcherons pas.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

N'ayant pas encore eu le plaisir de lire le projet communiste, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

C'est lequel le vôtre ? Celui de Villepin ou de Sarkozy ?

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

M. Jean-François Copé, ministre délégué. ... et ayant quelques moments à perdre, je me suis livré à la lecture détaillée du projet socialiste.

Ah ! sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Le parti socialiste ne l'avait pas chiffré, tant il avait peur d'y perdre ses lunettes. J'ai donc procédé à son évaluation, et je suis parvenu à 115 milliards d'euros, dont 104 milliards d'euros de dépenses éternelles et 11 milliards d'euros pour la seule renationalisation d'EDF.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Même si ces politiques ont toutes échoué au cours du XXe siècle, il faut quand même qu'en 2006 la gauche- si elle est élue l'année prochaine -, ajoute la promesse de renationaliser EDF.

Avec un total de 115 milliards d'euros, c'est une telle horreur financière que le parti socialiste n'a toujours pas chiffré son projet !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Impatient, angoissé à l'idée que l'on puisse contester un travail aussi précis que celui que j'ai pu mener, j'attendais que le parti socialiste annonce mercredi le « contre-chiffrage ».

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Or, hier matin, le parti socialiste a annulé la conférence de presse qu'il devait tenir. Il n'avait certainement pas fini de recompter.

Souriressur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Je persiste et signe : le chiffre que j'ai indiqué est exact. Je suis d'ailleurs disponible pour un débat contradictoire sur ce sujet.

En d'autres termes, quand nous proposons de moderniser l'État, de financer nos priorités politiques tout en réduisant la dette publique et en dépensant mieux, vous proposez...

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

...d'augmenter dans des proportions absolument folles les dépenses publiques.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Et je ne parle pas à la légère. C'est 7 points de PIB supplémentaires !

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Avec ces 7 points de PIB supplémentaires, nous arriverions à 61 % de dépenses publiques rapportées au PIB !

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Même les Cubains n'ont pas osé faire cela ! (M. Dominique Braye rit.)

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Vous avez raison, monsieur le rapporteur général. Où vont-ils trouver l'argent ?

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Ils pensent à la bonne vieille formule : « Faire payer les riches. » C'était Georges Marchais qui le disait déjà lorsque j'étais enfant. Ils n'ont pas changé.

Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Depuis que je suis devenu ministre du budget, je me demande s'il y aura encore suffisamment de riches en France qui pourront payer.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Rassurez-vous ! Il y en a de plus en plus, des riches !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

C'est vrai ! Aujourd'hui, les pauvres ont de moins en moins et les riches ont de plus en plus !

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

M. Jean-François Copé, ministre délégué. À force, les riches se sont délocalisés en nombre important. Cela risque de poser quelques problèmes.

Mme Borvo Cohen-Seat s'exclame.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Qu'est-ce que cela signifie, madame Borvo Cohen-Seat ? Ce sont encore les classes moyennes, c'est-à-dire ceux qui travaillent et qui n'ont droit à rien, qui devront payer.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Nous, nous présenterons un projet politique dans lequel nous aurons à coeur que les classes moyennes, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Et M. Marini qui fustige les fonctionnaires ! C'est une honte !

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

M. Jean-François Copé, ministre délégué. ... qui travaillent pour soutenir l'économie du pays, l'emploi et l'investissement, puissent continuer à le faire dans une société de respect.

Bravo ! et applaudissementssur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Je souhaitais évoquer un dernier point avant de lancer le débat. Nous aurions pu croire que les Français se laisseraient prendre à un projet socialiste qui rase gratis à 115 milliards d'euros.

Or il y a eu un sondage sur le sujet. Et, puisque la gauche est toujours prompte à commenter les sondages quand ils ne sont pas bons pour le Gouvernement, permettez-moi d'évoquer - une fois n'est pas coutume - un sondage sur le projet socialiste. Là encore, j'en ai eu pour mon argent.

Selon ce sondage, qui a été réalisé voilà quelques jours par l'institut BVA, 60 % des Français jugent ce projet irréaliste...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Frécon

M. Jean-Claude Frécon. Vous avez loué l'hémicycle pour organiser un meeting de l'UMP ?

Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

...et 65 % d'entre eux considèrent qu'il ne donne pas envie de voter pour un candidat socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Et votre Gouvernement est soutenu par 20 % des Français à peine !

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Certes. Mais, comme on nous parle toujours des sondages sur le Gouvernement, il n'est, me semble-t-il, pas forcément inutile que vous connaissiez également les sondages à propos du parti socialiste.

J'ajoute que ce projet est seulement socialiste. Vous n'avez pas encore signé avec les communistes, mesdames, messieurs les sénateurs socialistes. Le jour où vous le ferez, vous doublerez la facture.

Rires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Là, je peux vous dire que nous aurons véritablement de quoi méditer sur la différence entre la gauche et la droite.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les points que je souhaitais aborder pour vous présenter ces orientations budgétaires.

Je suis très content d'avoir suscité votre émotion, madame Borvo Cohen-Seat.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous vous intéressez beaucoup à moi en ce moment !

Rires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Cela me permet de rappeler qu'en politique, au sens noble du terme, il y a une différence entre la majorité et l'opposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

C'est vrai ! Avec vous, il n'y a même pas 20 % de social !

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

M. Jean-François Copé, ministre délégué. Il s'agit d'un débat de fond à propos duquel nous aurons l'occasion de nous opposer tout au long de l'automne.

Bravo ! et applaudissementssur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Etienne

M. Dominique Braye. Les communistes défendent le projet socialiste !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Sauf que nous, nous voulons le SMIC à 1 500 euros tout de suite !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Mes chers collègues, je vous demande un peu de silence afin de poursuivre notre débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Maintenant nous allons voir comment nous serons soignés !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Il va nous parler des exonérations non compensées !

Debut de section - Permalien
Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le débat d'orientation sur les finances sociales qui nous réunit aujourd'hui constitue une avancée importante introduite par la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

En effet, au moment où le Gouvernement s'engage dans la phase d'élaboration et de préparation du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, il est essentiel pour le Parlement de disposer d'une présentation générale des orientations et des grands équilibres financiers pour pouvoir mieux préparer les choix budgétaires que nous serons amenés à effectuer à l'automne.

Un impératif de cohérence s'impose plus que jamais dans le pilotage des finances publiques. C'est dans cet esprit que nous travaillons en compagnie de Philippe Bas, de Thierry Breton et de Jean-François Copé.

C'est bien l'objectif que nous cherchons à atteindre, dans le prolongement de la Conférence nationale des finances publiques, présidée par le Premier ministre. Celle-ci s'est tenue le 11 janvier dernier et a rassemblé le Gouvernement, le Parlement, le Conseil économique et social, les associations d'élus locaux, les partenaires sociaux et les représentants des organismes de protection sociale.

Souhaitant placer notre pays sur la voie de l'équilibre des comptes publics et mettre en oeuvre la stratégie de désendettement que Thierry Breton vient de détailler, le Premier ministre a assigné aux finances sociales deux objectifs.

D'une part, le retour à l'équilibre du régime général de la sécurité sociale devra être effectif à l'horizon 2009.

D'autre part, afin de tenir compte de la nécessaire hausse des dépenses sociales dans notre pays, notamment pour faire face aux besoins croissants dus aux effets du vieillissement et au progrès médical, nous souhaitons que l'évolution des dépenses de l'ensemble des administrations de sécurité sociale soit de plus 1 % au-delà de l'inflation.

C'est dans ces perspectives, et dans le prolongement des réformes engagées, que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 sera conçu. Il sera ensuite discuté à l'automne.

Je centrerai d'abord mon propos sur les implications sur l'assurance maladie et, par voie de conséquence, sur les dépenses de santé.

Le retour à l'équilibre de la branche maladie du régime général en 2009 suppose que les dépenses d'assurance maladie évoluent en moyenne sur la période de 2, 2 % en valeur, soit 0, 4 % en volume, sur la base d'une hypothèse d'inflation à 1, 8 %.

Cela implique la poursuite de l'inflexion déjà constatée des dépenses d'assurance maladie que nous enregistrons depuis 2004 grâce à la réforme de l'assurance maladie.

Les dépenses relevant du champ de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, l'ONDAM, ont augmenté de 6, 4 % en 2003, de 4, 9 % en 2004 et de 3, 9 % en 2005, 2005 étant la première année depuis 1997 au cours de laquelle l'ONDAM adopté par le Parlement a été respecté.

Pour 2006, l'objectif est clair : nous visons une progression de 2, 5 %. Nous sommes donc résolument sur la voie de la maîtrise des dépenses d'assurance maladie. Nous avons notamment enrayé les rythmes de croissance atteints par le passé.

Il nous faut donc poursuivre dans cette voie. Les tendances qui se dégagent depuis le début de l'année sont d'ailleurs constantes. Mois après mois, on constate une modération des dépenses, en particulier s'agissant des soins de ville. Entre le mois de janvier et le mois de mai de cette année, ces dépenses ont augmenté de 1, 4 % seulement par rapport à l'année 2005.

La conséquence de cette modération des dépenses est la réduction très claire du déficit de l'assurance maladie. Après avoir atteint 11, 6 milliards d'euros en 2004, ce déficit a été ramené à 8 milliards d'euros en 2005. Sans la réforme que la majorité a adoptée, il aurait été de 16 milliards d'euros.

En 2006, le déficit sera à nouveau significativement réduit, pour se situer légèrement au-delà de 6 milliards. En 2007, notre objectif est de continuer clairement sur cette trajectoire en visant un déficit inférieur à 4 milliards d'euros.

Cela signifie que le déficit de la branche maladie aura été divisé par quatre en moins de trois ans.

Debut de section - Permalien
Xavier Bertrand, ministre

Quand on est attaché à la pérennité de notre système de sécurité sociale, on doit effectivement se féliciter de tels résultats, qui sont notamment dus à l'action des Français.

Mesdames, messieurs les sénateurs, tout cela fait beaucoup de chiffres. C'est d'ailleurs normal dans le cadre d'un débat d'orientation budgétaire.

Pourtant, ces chiffres ne constituent pas une fin en soi. Ce que nous voulons, en revenant à l'équilibre financier, c'est sauvegarder notre système de sécurité sociale en le modernisant et en l'améliorant.

C'est d'ailleurs en cela que la réforme issue de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie se distingue des autres « plans de sauvetage » qui l'ont précédée. Elle n'a pas contenu, et je l'assume, de mesure par essence brutale ou spectaculaire.

Il s'agit au contraire d'une réforme structurelle, qui vise à soigner mieux en dépensant mieux. Cela repose sur des changements de comportement et place la qualité au premier plan. Selon nous, le redressement financier de l'assurance maladie va de pair avec une politique de santé plus ambitieuse. Nous sommes donc animés par une approche qualitative et structurante sur le long terme.

À cet égard, l'essor du parcours de soins autour du médecin traitant est une réussite. Plus de 40 millions d'assurés sociaux ont aujourd'hui choisi leur médecin traitant. En outre, 78 % des consultations s'effectuent dans le cadre du parcours de soins et moins de 2 % seulement sont des consultations hors parcours de soins, la personne ayant consulté directement un spécialiste alors qu'elle avait un médecin traitant.

La maîtrise médicalisée est également un succès. Rappelez-vous pourtant les « Cassandre », qui nous disaient que celle-ci ne fonctionnerait jamais. Elle est le fruit d'une attention plus grande des professionnels aux conditions de prescription, s'agissant tant des médicaments que des indemnités journalières.

Un tel engagement nous a permis d'obtenir des résultats concrets et favorables. Ainsi, avec l'avenant n° 12 à la convention nationale des médecins, qui a été signé cette année, l'objectif est de 800 millions d'euros pour l'année 2006 et de 600 millions d'euros pour l'année 2007.

Nous sommes donc engagés sur une dynamique qui nous permet également de maîtriser les dépenses en évitant les charges inutiles.

Année après année, la Caisse nationale d'assurance maladie, la CNAM, ou la Cour des comptes nous indiquent qu'il y a entre 6 milliards et 8 milliards d'euros de dépenses inutiles dans notre système. Pouvons-nous continuer à nous satisfaire de ce constat sans engager les solutions permettant d'y mettre un terme ?

Ces dépenses inutiles pèsent non seulement sur notre déficit, mais nous aurions en plus besoin de ces 6 milliards à 8 milliards d'euros pour investir dans notre système de santé.

Voilà pourquoi nous avons décidé notamment que les examens inutiles, qui représentaient un surcoût compris entre 1 milliard et 1, 5 milliard d'euros par an, devaient également constituer une priorité. Nous devons y mettre un terme.

Le secteur du médicament constitue également un élément important de notre politique de redressement.

Nous comptons notamment sur les génériques, qui nous ont permis d'économiser en 2005 au total 234 millions d'euros supplémentaires, dont 170 millions d'euros au titre de l'augmentation de leur pénétration.

Je le rappelle, les accords qui ont été signés entre l'assurance maladie, les pharmaciens et les médecins prévoyaient une progression de la substitution avec un objectif de 70 % à la fin de l'année.

Ces engagements seront non seulement tenus, mais ils seront même très certainement dépassés. En effet, si l'objectif est de 70 % au 31 décembre, nous avions déjà atteint un taux de 67, 3 % au 14 juin.

Nous avons donc fait le choix de renoncer à la généralisation du tarif forfaitaire de responsabilité, le TFR, qui avait été envisagée initialement. Nous avons accordé notre confiance au pharmacien et cette confiance n'a pas été démentie par les faits.

Ensuite, la politique des prix est un ressort important, qui a permis de dégager 365 millions d'euros supplémentaires en 2005.

La question des grands conditionnements constitue également un aspect attendu par nombre de Français, à la fois parce que le dispositif relève du bon sens, mais également parce qu'il permet des économies. Ainsi, plus de vingt médicaments sont désormais disponibles en conditionnement de trois mois. Leur délivrance produira ses effets à partir du deuxième semestre 2006.

Au total, toutes les mesures adoptées dans le secteur du médicament produisent leurs effets. Ce qui est encourageant, c'est que nous assistons enfin à un infléchissement indéniable des dépenses médicamenteuses sur les premiers mois de l'année. Les dernières données font état d'un taux d'évolution de seulement 1, 8 %pour le mois de mai, contre 2, 2 % au mois d'avril, 3, 9 % au mois de mars, 4, 6 % au mois de février et 5, 7 % au mois de janvier.

Pour leur part, les établissements de santé se sont engagés dans les réformes structurelles prévues par le plan « Hôpital 2007 ». La part de tarification à l'activité s'élève aujourd'hui à 35 % pour les établissements publics et privés participant au service public.

Le Gouvernement a également entrepris des travaux de mesure des charges spécifiques en vue d'une convergence réussie entre les tarifs des établissements publics et des établissements privés.

Parallèlement, la rationalisation des achats et l'amélioration du contrôle de gestion et des systèmes d'information permettront également au secteur hospitalier de pouvoir répondre aux objectifs de santé que nous lui avons assignés, tout en proposant les meilleurs services et soins aux meilleurs coûts. Comme le dit souvent le président Nicolas About, il s'agit de « soigner mieux en dépensant mieux ».

Enfin, il nous faut développer la prévention, qui est une condition pour garantir à terme la maîtrise durable des dépenses d'assurance maladie et pour améliorer l'état de santé des Français.

En complément de la dynamique instaurée par la réforme de l'assurance maladie, il y a la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.

Je pense également à toute la stratégie de prévention. Nous devons aujourd'hui mettre résolument le cap sur la prévention, tout en ayant aussi à l'esprit que le suivi et les résultats des plans de santé publique et des plans stratégiques en matière de santé sont pour nous une évidence au jour au le jour.

C'est grâce à l'ensemble de ces actions, fidèles à la logique de maîtrise médicalisée des dépenses, que nous continuerons à dégager des marges de manoeuvre pour améliorer la qualité de notre système de santé et renforcer l'accès aux soins.

La majorité a notamment voté des mesures qui ont permis de revaloriser l'aide à la complémentaire. Grâce à cela, celles et ceux qui ont longtemps été considérés comme trop riches pour pouvoir bénéficier de la couverture maladie universelle, la CMU, et qui ne l'étaient pas suffisamment pour pouvoir se payer une complémentaire pourront enfin en avoir une. En effet, le Président de la République a souhaité un relèvement du plafond de revenus des bénéficiaires de ce dispositif.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 permettra de mettre en oeuvre cette mesure, qui profitera à 900 000 personnes supplémentaires.

J'en viens maintenant aux orientations régissant les politiques de sécurité sociale.

La loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie a confié aux partenaires sociaux la mission de faire des propositions au Gouvernement et au Parlement, afin de réformer et de moderniser la branche accidents du travail et maladies professionnelles. Les partenaires sociaux ont constitué des groupes de travail. Un accord a déjà été trouvé sur une réforme de la gouvernance.

S'agissant de la tarification, qui constitue aussi un levier en matière de prévention, il convient d'en revoir les modalités dans la mesure où les règles actuelles sont franchement peu lisibles et surtout peu sensibles à la sinistralité propre à chaque entreprise.

Le Gouvernement est attaché à ce que les négociations avancent rapidement de manière qu'il puisse, avec le Parlement, prendre ses responsabilités dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

Pour ce qui est de la branche vieillesse, le Gouvernement a proposé en 2003 une réforme structurelle et globale qui garantit l'avenir de notre système par répartition. Son adoption reflète un consensus sur la nécessité de préparer d'ores et déjà les échéances démographiques à venir, notamment à l'horizon 2020. La réforme des retraites constitue aussi un processus continu, dans le prolongement des réflexions de long terme sur le fondement du diagnostic du Conseil d'orientation des retraites, le COR.

Nous respecterons le calendrier et les échéances fixées en 2003. Des rendez-vous ont été pris, le premier d'entre eux étant fixé en 2008, date à laquelle le Gouvernement transmettra un rapport à la représentation nationale, qui sera rendu public et discuté.

Ce rapport permettra notamment, grâce aux travaux du COR, d'analyser tous les effets de la réforme et d'envisager, le cas échéant, les mesures complémentaires, au-delà de la consolidation des mesures-clés de 2003.

La dynamique des prestations vieillesse observé en 2006 a conduit la commission des comptes de la sécurité sociale à réactualiser à la hausse ses prévisions de déficit de la branche retraite, en raison d'une forte montée en charge des départs anticipés des salariés ayant effectué de longues carrières. Ce dispositif, nécessaire à l'équilibre à long terme de la réforme des retraites, rencontre un succès plus important que prévu. Cela montre bien quelle était l'attente dans le pays. Ces mesures représentent un coût de 1, 8 milliard d'euros en 2006 et pèse sur les comptes de la Caisse nationale d'assurance vieillesse.

Au-delà de ces effets à court terme, la mise en oeuvre de la réforme des retraites permettra d'améliorer les perspectives financières de la branche vieillesse. Dans son rapport, le COR évalue l'impact de la réforme d'août 2003 sur le régime général à près de 50 % du besoin de financement à l'horizon 2020.

Par ailleurs, nous savons que le redéploiement des cotisations chômage lié à la baisse engagée et progressive du chômage permettra d'équilibrer le régime général. Ainsi, la politique pour l'emploi du Gouvernement, qui a déjà permis une baisse de 200 000 du nombre de chômeurs en un an, est l'un des facteurs de redressement structurel du régime général.

Il faut également souligner l'enjeu fondamental que constitue le niveau d'emploi des séniors pour la viabilité financière de nos régimes de retraite. Cela déterminera notre capacité à conserver un haut niveau de retraite.

La politique de la famille constitue aussi un volet important des dépenses de protection sociale : elle représente près de 50 milliards d'euros, dont 62 % sont gérés par la branche famille du régime général de sécurité sociale. Interviennent également les collectivités locales, notamment au travers de l'action sociale en direction des enfants, la branche maladie, qui prend en charge les dépenses de maternité, ou encore l'État, en tant qu'employeur ou par le financement des bourses, qu'elles soient scolaires ou universitaires.

La politique familiale se traduit par ailleurs par la gratuité des services publics, en particulier l'éducation, ou d'importantes dépenses fiscales.

Au cours de ces dernières années, la conciliation de la vie familiale et professionnelle a constitué un élément structurant de la réorientation des politiques familiales. Ainsi, ce n'est pas un hasard si la France connaît aujourd'hui le taux de fécondité le plus élevé d'Europe continentale. Et si, dans le même temps, le taux d'activité des femmes y est l'un des plus forts, cela reflète le succès de la politique que vous avez soutenue et votée.

Mme Nicole Bricq s'exclame.

Debut de section - Permalien
Xavier Bertrand, ministre

C'est précisément pour faciliter les choix familiaux que la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE, a été instaurée au 1er janvier 2004. Cette prestation connaît un succès dépassant les espérances puisque, d'ici à la fin de l'année, elle concernera 250 000 bénéficiaires, au lieu des 200 000 prévus. Cette montée en charge rapide a entraîné une progression plus dynamique que prévue des dépenses de la branche famille, qui ont crû de plus de 10 % entre 2004 et 2005. Cette prestation devrait toutefois avoir achevé sa montée en charge d'ici à la fin de l'année 2006.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, telles sont aujourd'hui, clairement, les dynamiques sur lesquelles nous sommes engagés. Nous sommes fidèles à la feuille de route tracée par le Président de la République s'agissant du retour à l'équilibre des comptes publics.

En ce qui concerne plus particulièrement la réforme de l'assurance maladie, je souligne de nouveau que celle-ci est en marche. Si la sécurité sociale n'est pas encore aujourd'hui complètement guérie, reconnaissons qu'elle va mieux, ce dont nous pouvons nous réjouir. Cette réforme produit ses résultats et nous allons amplifier en 2006 et en 2007 les dynamiques mises en oeuvre.

C'est toute la logique de la réforme souhaitée par le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. Il s'agit donc d'un travail de longue haleine, nécessitant un suivi de la réforme, ainsi qu'une véritable constance. C'est dans cet esprit que j'ai décidé de mettre en place, depuis le début du printemps, un comité de suivi de la réforme de l'assurance maladie et de pilotage de l'Objectif national de dépenses d'assurance maladie, l'ONDAM, qui réunit le directeur de la sécurité sociale, le directeur des hôpitaux, le directeur général de la santé, ainsi que le président du comité économique du médicament et le directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, l'UNCAM, afin de faire preuve de la plus grande vigilance et de la plus grande réactivité, c'est-à-dire, tout simplement, pour suivre l'évolution des dépenses d'assurance maladie.

Ces réformes reposent avant tout sur des changements de comportement. Elles supposent aussi des évolutions, qu'il faut ancrer dans la durée. C'est dans cet esprit que Philippe Bas et moi-même travaillons. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 s'inscrira dans cette même logique, une logique de réussite.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le rendez-vous de ce jour est une première, car en décidant d'organiser un débat d'orientation conjoint sur l'ensemble des finances publiques, celles de l'État, celles de la sécurité sociale et celles des collectivités territoriales, nous nous efforçons de mettre en perspective la situation de nos finances publiques. Ainsi, nous marquons de notre empreinte, à un moment crucial, les prochaines discussions de l'automne.

Nous souscrivons pleinement à votre engagement national de désendettement et à vos orientations, messieurs les ministres. C'est une nécessité ! La Cour des comptes elle-même n'a-t-elle pas rappelé que 2005 prolonge les tendances antérieures ?

S'agissant du fond de nos débats, en vous renvoyant pour l'essentiel à l'excellent rapport de Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, je centrerai mon intervention sur la nécessaire recherche de la compétitivité. Sans compétitivité, la croissance ne sera pas durable. Sans compétitivité, les ressources de notre système de prélèvements obligatoires seront décevantes. Sans compétitivité, le chômage restera à des niveaux socialement insupportables. Sans compétitivité, notre pacte social ne manquerait pas de se déliter.

Certes, la compétitivité ne se décrète pas, mais nous disposons, me semble-t-il, de deux puissants leviers pour la favoriser.

Le premier, c'est la nécessaire et indispensable réforme de l'État, pour laquelle nous pouvons compter sur un outil puissant et largement consensuel : la LOLF. Nous venons d'en percevoir le potentiel, la puissance latente, pour peu que la volonté politique s'en empare.

Le second levier consiste à sortir du chemin de la croissance atone et, pour cela, à alléger les charges pesant sur la production qui est aisément délocalisable - dans un marché global, les emplois ne manquent pas de suivre - en les reportant sur les produits ; j'y reviendrai dans un instant.

J'évoquerai d'abord l'indispensable réforme de l'État.

Il faut mettre fin à cette accoutumance à la dépense publique, qui constitue l'une des tristes caractéristiques du modèle social français actuel et qui ne nous a pas pour autant permis de renouer avec la compétitivité.

Nous devrions ainsi connaître en 2006, s'agissant de l'État seul, un déficit budgétaire quotidien de près de 125 millions d'euros, car l'État s'autorise, nous le savons bien, ce qu'aucun ménage ni aucune collectivité locale ne pourrait faire : il dépense 20 % de plus que ce qu'il perçoit !

Le corollaire en est l'explosion du montant de la dette publique, qui atteint un niveau historiquement élevé et de moins en moins supportable, ainsi que la commission Pébereau l'a souligné, sans, du reste, faire l'objet d'aucune contestation.

Si l'on ajoute à cette charge les engagements hors bilan résultant du poids des retraites des fonctionnaires - estimé à plus de 800 milliards d'euros par la Cour des comptes, à 430 milliards par la commission Pébereau -, c'est un stock de dette latente correspondant à plus de deux années de produit intérieur brut que nous devons supporter. Je n'ose même pas mesurer le poids effectif des dettes du secteur public. Au total, ce sont donc près de 2 000 milliards d'euros qui doivent être inscrits au passif du bilan de l'État.

Dans le prolongement des travaux de la commission Pébereau, vous disposez, monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, d'une seconde occasion pour faire de la pédagogie. Je sais que vous mesurez l'importance que prendra le bilan d'ouverture : en application de la LOLF, le Gouvernement doit établir au 1er janvier 2006 ce bilan qui recensera les actifs et les passifs de l'État.

Croyez bien que la commission des finances veillera à ce que tous les actifs soient correctement évalués et à ce qu'aucun passif ne soit sous-estimé, et ce afin de nous permettre de disposer d'un état des lieux clair, d'une solide base de référence.

Messieurs les ministres, toute omission de dette directe ou indirecte - je pense aux pensions du mois de décembre, payées en janvier de l'année suivante, soit un peu plus de 3 milliards d'euros ; je pense aux régimes spéciaux de retraite, ou bien encore à des entreprises publiques dont chacun sait que la liquidation se soldera par la reprise d'une dette par l'État -, toute sous-évaluation de provisions, toute sous-estimation des obligations à assumer remontera à la surface dans les prochaines années, effacera les bons résultats attendus, neutralisera les signes positifs, polluera tous les messages encourageants.

À cet égard, j'aimerais que vous nous indiquiez dans quels délais vous envisagez de nous présenter ce bilan du patrimoine de l'État au 1er janvier 2006.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Frécon

M. le ministre n'a pas le temps : il fait les comptes du parti socialiste !

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Et c'est très instructif !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Je ne doute pas qu'y seront inscrits - je ne cite que le seul ministère de la défense - les 2, 1 milliards d'euros de factures impayées au 31 décembre 2005.

Je sais bien que les PME qui avaient assuré les prestations et les fournitures ont pu mobiliser leurs créances. Autrement dit, au 31 décembre 2005, il y avait des créances reconnues par des entreprises qui pouvaient être négociées auprès des banques, mais l'État n'avait pas constaté sa dette. Par conséquent, au 31 décembre 2005, messieurs les ministres, il faudra bien constater ces 2, 1 milliards d'euros, de même que les 45 milliards d'euros de reste à payer sur les dépenses d'équipement militaire, qui représentent à elles seules trois années de la loi de programmation militaire !

La discussion de la loi de règlement a été très instructive et significative. Quatorze ministres sont venus devant le Sénat ; les auditions étaient ouvertes à l'ensemble des sénateurs et au public. Quatre débats ont eu lieu hier et avant-hier. À l'occasion de ces débats, nous avons constaté que la plupart des ministères concernés avaient, ici ou là, des dettes impayées. Nous tenons cet état à votre disposition, messieurs les ministres.

Adepte d'un langage de vérité, vous avez proclamé l'année dernière, monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, que la France vit au dessus de ses moyens.

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

Depuis longtemps !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Voilà des propos forts, que nous entendons bien, parce qu'ils sonnent juste.

À ce titre, l'annonce faite, grâce à une gestion de la fonction publique plus dynamique, moins statique, de la création de 4 000 postes de fonctionnaires, largement compensée par la suppression de 19 000 emplois, pour une large part non pourvus, va dans le bon sens. Nous sommes donc nombreux à vous soutenir dans cette démarche reposant sur plus de transparence et de sincérité dans la présentation des comptes publics.

Efforçons-nous donc de cultiver l'esprit de la LOLF afin de mieux préserver le consensus qu'elle a suscité et de tenter, ensemble, d'y voir clair. Mettons de la lumière dans chaque pièce de la maison publique. Mais, mes chers collègues, ne nous leurrons pas ; la LOLF n'est qu'un cadre d'action, un mode d'emploi du budget et, en aucun cas, elle ne définit la politique à suivre. C'est un aiguillon certes puissant, mais qu'il faut savoir ou vouloir utiliser. Elle n'est rien sans détermination et volonté politique. Or, chacun le sait, la réforme est difficile à mettre en oeuvre et, surtout, aucune réforme n'est à effet immédiat. Les effets bénéfiques ne se font sentir qu'à moyen terme, selon un calendrier qui n'est pas toujours en phase avec le calendrier politique.

Mais la réforme de l'État ne pourra, seule, nous permettre de renouer avec la compétitivité de la « maison France ». Oui, le chantier de la réforme de l'État est incontournable, mais il nous faut également rompre avec la croissance atone.

Certes, ainsi que vous l'avez rappelé ce matin, monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, les indices sont encourageants. Veillons à ce que ces bonnes nouvelles ne constituent pas autant d'arguments pour encourager les conservatismes et les corporatismes et justifier leur immobilisme.

Nous le savons tous, pour porter remède à la situation actuelle de nos finances publiques, il faut réformer. Et les bonnes réformes, au stade où nous en sommes, passeront nécessairement par des ruptures.

En ce domaine comme dans d'autres, n'hésitons pas à nous comparer à ceux qui ont su redimensionner le champ des interventions publiques sans nuire, bien au contraire, à la qualité du service public, à comprendre ceux qui ont mené à bien leurs réformes structurelles.

Dans un monde globalisé où s'accélèrent les mutations, changeons nos schémas de pensée pour les adapter aux contraintes du troisième millénaire, faute de quoi nos précieux atouts vont s'altérer chaque jour un peu plus.

Nous devons ainsi, afin de préserver la qualité de nos services publics et notre cohésion sociale, faire évoluer notre système de prélèvements obligatoires.

A l'ère de la globalisation, des entreprises nomades, des délocalisations réelles ou masquées, il nous faut réfléchir à la possibilité d'asseoir l'impôt non plus sur les facteurs de production, désormais volatiles - les productions sont aujourd'hui très facilement délocalisables - mais sur d'autres assiettes, notamment les produits.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Cessons, en ce domaine, de demander de nouvelles contributions ou de nouveaux rapports à des experts pour utiliser ce qui existe déjà.

À ce titre, je me félicite tout particulièrement des déclarations qui appellent à renouer avec la valeur « travail » et à envisager pour ce faire une très large palette de moyens.

Tous ceux qui veulent travailler plus - ils sont nombreux -, tous ceux qui sont désireux d'entreprendre - ils sont également nombreux - attendent des gages de liberté et de compétitivité. Il est donc temps de redessiner notre horizon fiscal, avec des mesures simples, lisibles, compréhensibles, expurgées des niches et autres exonérations « ciblées »...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

...qui pervertissent notre code général des impôts et que le Conseil constitutionnel, après la Cour des comptes, a dénoncées

Ce grand chantier ne peut se concevoir sans une réhabilitation de l'entreprise, car c'est elle qui crée de l'emploi, qui diffuse la richesse. Cessons donc de demander à nos entreprises de prendre en charge la solidarité édictée par les États pour faire vivre la cohésion sociale et organisons un nouveau partage des tâches : aux entreprises, la responsabilité de l'activité, de l'investissement, de la création de richesses et d'emplois ; aux citoyens, le financement de la solidarité.

Donnons en particulier des gages aux petites et moyennes entreprises : c'est le tissu des PME qui fait la croissance. Je sais bien que les entreprises du CAC 40 sont notre fierté - plus de 80 milliards d'euros de bénéfices et plus de 30 milliards d'euros de dividendes -, mais, au final, bien peu d'emplois y sont créés et des pressions sont parfois exercées sur les fournisseurs pour les inciter à produire ailleurs et à délocaliser leurs emplois, sans parler de quelques cas infimes qui laissent à penser que, dans cette financiarisation à outrance, certains dirigeants peuvent être atteints par la folie de l'argent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

De toute évidence, l'avenir du pays, la croissance, la création d'emplois dépendent des petites et moyennes entreprises.

Parmi les signes les plus tangibles, figure la réforme fondamentale des prélèvements obligatoires.

Tel est le sillon que notre commission trace depuis de nombreuses années et qui, chaque jour, s'élargit et s'approfondit. La « TVA sociale », puisque c'est d'elle qu'il s'agit, doit devenir un thème central de réflexion, et je me félicite que, chaque jour, le nombre de ses disciples s'accroisse.

J'ai bien dit « TVA sociale », et non pas « taxe sur la valeur ajoutée des entreprises ». En effet, cette dernière serait une invention diabolique, qui constituerait une seconde taxe professionnelle, dont nous mesurons les effets quelque peu corrosifs sur l'investissement et sur l'emploi.

Je souhaite que ce débat puisse venir devant l'opinion publique, car il est, à mon avis, l'une des grandes orientations pour stimuler la croissance et sortir de ce niveau d'activité dont la progression est malheureusement atone.

Ainsi, à taux de prélèvement global inchangé, les cotisations sociales assises sur le salaire seront diminuées au profit d'un prélèvement reposant sur l'assiette la plus large, touchant toutes les activités, qu'elles soient nationales ou réalisées hors de nos frontières. Le Danemark et les autres pays scandinaves se sont engagés dans cette voie. Leur réussite est une référence !

L'on pourrait ainsi régler le douloureux problème du plombier polonais. En effet, celui-ci paie a priori ses cotisations sociales en Pologne alors qu'il travaille en France. Si la TVA devient le vecteur du financement de la protection sociale, lorsque le plombier polonais interviendra à Paris ou dans n'importe quel village français, il acquittera une TVA qui participera au financement de la protection sociale en France.

À nous, en liaison avec le Gouvernement, de prendre notre destin en main, de tracer les orientations budgétaires et fiscales au service de la compétitivité de demain et des emplois d'après-demain.

Tel est le sens de notre engagement. Soyez assurés, messieurs les ministres, que nous serons toujours à vos côtés dans cette démarche de lucidité et de courage.

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le débat d'orientation sur les finances sociales qui a lieu ce matin est une première dont je me félicite.

En effet, ces dernières années, nous nous raccrochions au débat d'orientation budgétaire, sans vraiment y être invités. Cette année, nous intervenons conformément aux dispositions de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale du 2 août 2005 qui, dans son article 6, a prévu la possibilité de ce débat.

Pour les membres de la commission des affaires sociales, ce débat est très important et je voudrais m'arrêter un instant sur les conditions dans lesquelles il a lieu.

L'article LO 111-5-3 du code de la sécurité sociale, introduit par la loi organique du 2 août dernier, prévoit deux choses : d'une part, un rapport, d'autre part, un débat.

Le rapport, impérativement déposé au cours du dernier trimestre de la session ordinaire, doit être consacré aux orientations des finances sociales et comporter deux éléments : premièrement, une description des grandes orientations de la politique du Gouvernement en matière de sécurité sociale au regard des engagements européens de la France ; deuxièmement, une évaluation pluriannuelle de l'évolution des recettes et des dépenses des administrations de sécurité sociale ainsi que de l'ONDAM.

Le débat, qui n'est pas obligatoire, est organisé sur la base de ce rapport, à l'Assemblée nationale et au Sénat. Il peut être concomitant du débat d'orientation budgétaire, mais, là encore, la loi ne l'impose pas. Or que se passe-t-il cette année ?

Un rapport a bien été déposé par le Gouvernement la semaine dernière. Mais celui-ci ne répond pas tout à fait aux exigences de la loi organique et ne concerne pas exclusivement les finances sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Intitulé « Engagement national de désendettement », il englobe à la fois des considérations sur l'économie nationale, la présentation de mesures destinées à renforcer le pilotage des finances publiques, tant centrales que locales ou sociales, et les principales orientations aussi bien des finances de l'État que des finances sociales.

Malheureusement - et n'y voyez pas une critique -, sans doute préparé par les services de Bercy, ce document noie un peu les finances sociales dans la masse. À la page 35, par exemple, seul est mentionné le caractère « préparatoire au débat d'orientation budgétaire » de ce rapport, malgré le souci affiché du Gouvernement de renforcer la coordination entre les finances de l'État et les finances sociales.

En outre, contrairement à la lettre de la loi organique, ce document ne comporte aucune évaluation pluriannuelle de l'évolution des recettes et des dépenses des administrations de sécurité sociale et encore moins de l'ONDAM. Seul est rappelé l'objectif d'un retour à l'équilibre du régime général à l'horizon 2009, ce qui est un peu maigre, vous en conviendrez. Là encore, les scénarios pluriannuels décrits pour les recettes et les dépenses du budget de l'État sont bien plus développés et étayés par une analyse plus approfondie.

Notre commission a décidé de considérer cette première application des nouvelles règles de la LOLFSS comme un « galop d'essai »...

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

... qui devra être amélioré l'an prochain. Ainsi, nous souhaitons que le rapport qui sera établi l'année prochaine laisse plus de place aux finances sociales et qu'il soit plus rigoureux dans sa présentation, sur la partie qui nous concerne, bien sûr.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Par ailleurs, pour en finir avec ces questions de procédure, je voudrais vous faire part d'un très vif désir que M. Alain Vasselle et moi-même avons pour le prochain PLFSS : la commission des affaires sociales souhaite vous entendre, monsieur le ministre délégué au budget, dès la présentation en conseil des ministres du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Une telle audition n'a jamais eu lieu. Compte tenu des imbrications entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale, elle me paraît aujourd'hui indispensable. S'y ajoute le fait que les finances sociales sont désormais devenues, pour ainsi dire, la variable d'ajustement des finances de l'État. Il serait bon que le ministre délégué au budget - directement concerné par cet état de fait - vienne en rendre compte devant notre commission.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Je relèverai le défi !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Le ministre de la santé et le ministre délégué à la sécurité sociale, que nous entendrons aussi, bien sûr, ...

Debut de section - Permalien
Xavier Bertrand, ministre

Avec plaisir !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

... car ils sont les principaux responsables de la bonne gestion des finances sociales, n'ont en effet pas la chance de maîtriser tous les cordons de la bourse ni toutes les ficelles des comptes. Aussi, pour que nous puissions voter en toute connaissance de cause le budget social de la nation, nous avons besoin de vos explications, monsieur le ministre délégué au budget.

Le décor du débat étant planté, j'en viens maintenant à la présentation d'une série d'observations sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale lui-même ; M. Alain Vasselle vous exposera ensuite les remarques de notre commission sur l'évolution des finances sociales.

Je rappellerai d'abord les insuffisances que nous avons relevées dans ce projet de loi voilà quelques mois et que nous vous avons demandé de corriger, messieurs les ministres, demande que je réitère aujourd'hui.

Si ces insuffisances sont bien naturelles pour une première application du nouveau cadre organique, il nous avait paru important de les recenser, car des améliorations peuvent et doivent y être apportées, afin que l'intention du législateur organique soit pleinement respectée.

Il conviendra donc de renforcer le cadrage pluriannuel en développant l'annexe B, de façon à justifier plus solidement les évolutions prévues, et en présentant plusieurs scénarios, à l'image de ce qui existe dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances.

Ainsi, dans le document de l'année dernière, le Gouvernement nous indiquait que la masse salariale progresserait en moyenne de 4, 45 % par an jusqu'en 2009 et que l'augmentation annuelle de l'ONDAM serait contenue à 2, 2 %. Aucune explication développée n'était donnée sur le moyen de parvenir à ces chiffres. Il en est de même dans le document qui sert de base à notre débat de ce matin. Il faudra absolument que cela change dans le prochain PLFSS.

De même, il conviendra de fournir, dans l'exposé des motifs du projet de loi, les raisons des diverses évolutions envisagées, notamment pour les prévisions de dépenses, de recettes et d'équilibre. Dans le texte de l'année dernière, aucun des tableaux d'équilibre, des prévisions de recettes ou de dépenses n'était justifié.

Il serait par ailleurs souhaitable que les montants inscrits dans le projet de loi soient présentés en millions d'euros et non en milliards arrondis à la centaine de millions d'euros près. Cette excessive simplification va à l'évidence à l'encontre de la recherche de sincérité et de précision des comptes.

Enfin, il serait utile de disposer d'un chiffrage précis des différentes mesures nouvelles proposées, en recettes et en dépenses, ainsi que cela existe pour le projet de loi de finances.

Par ailleurs, en ce qui concerne l'ONDAM, l'annexe de l'année dernière, trop succincte, ne permettait pas de prendre l'exacte mesure des ambitions du Gouvernement. Le découpage proposé en six sous-objectifs ne nous donne pas non plus entièrement satisfaction, que ce soit en termes de lisibilité, de clarté ou de précision. En particulier, nous aimerions que l'un des sous-objectifs soit consacré aux dépenses de médicaments, avec une ventilation entre les médicaments prescrits par les médecins de ville et ceux qui sont prescrits à l'hôpital.

Nous souhaitons donc, vous le comprenez, que le Gouvernement étoffe sa présentation et ses projections concernant l'ONDAM, qui se situe au coeur des évolutions et au centre de la réforme.

Des marges de progrès existent. Nous resterons vigilants sur leur mise en oeuvre, car il en va de la crédibilité du Parlement et de la valeur de notre vote sur le budget social de la nation.

À cet égard, je voudrais vous faire part, messieurs les ministres, de ma satisfaction quant aux propositions que vous venez de nous transmettre sur les programmes de qualité et d'efficience. Avec ces programmes, il s'agit d'insuffler un nouvel esprit dans le PLFSS et la gestion des finances sociales. Nous l'avions souhaité en discutant de l'élaboration du nouveau cadre organique. Il prend forme aujourd'hui et nous nous en félicitons.

Cette démarche répond à une priorité : responsabiliser les acteurs. Elle s'inscrit dans la même ligne que les conventions d'objectifs et de gestion conclues entre l'État et les caisses nationales, qui ont déjà permis d'enregistrer de réels progrès dans la gestion des différentes branches de la sécurité sociale.

Je voudrais tout particulièrement souligner notre accord avec la méthode que vous avez retenue pour définir ces programmes de qualité et d'efficience, leurs objectifs et les indicateurs qui leur sont associés. Ainsi, nous partageons tout à fait votre souci d'avoir une approche globale des finances sociales et de faire de la discussion du PLFSS le lieu unique du débat autour des politiques en lien avec la sécurité sociale.

En effet, limiter ce débat au seul champ strictement défini de la loi de financement aurait des inconvénients majeurs. Un seul exemple permet de l'illustrer : parler de l'accès aux soins sans faire allusion à la couverture maladie universelle, ou en ignorant la couverture maladie complémentaire, n'a guère de sens.

Cela signifie que nous ne devons pas exclure de nos réflexions certaines politiques qui figurent dans le projet de loi de finances. L'essentiel des crédits relatifs à la sécurité sociale est toutefois, je le rappelle, retracé dans le cadre de la loi de financement, soit 382 milliards d'euros en 2006 pour les seuls régimes de base de la sécurité sociale, à rapprocher des 276 milliards d'euros du budget de l'État pour ce même exercice.

Le deuxième aspect de la méthode que nous approuvons est l'équilibre que vous avez recherché, dans la définition des objectifs et indicateurs, entre ce qui relève d'une stratégie à moyen terme et ce qui s'inscrit dans des priorités de court terme.

Cela aboutit à des objectifs de politique publique à portée relativement large, s'inscrivant dans une action à moyen et long terme - par exemple « concilier vie familiale et vie professionnelle » ou « assurer un égal accès aux soins », ou encore « garantir la viabilité financière des régimes de retraite » - et à des indicateurs de résultat précis : « le nombre de bénéficiaires de l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé », « la dispersion territoriale des modes de garde », ou encore « le nombre de bénéficiaires de la mesure de cumul emploi-retraite ».

Nous vous ferons par écrit, messieurs les ministres, quelques remarques ponctuelles sur cette batterie d'objectifs et d'indicateurs. Mais sachez d'ores et déjà que nous attendons beaucoup de cette démarche. Elle doit nous permettre de mesurer effectivement et concrètement les progrès de gestion des finances sociales. Nous en serons des contrôleurs actifs et vigilants, car ce qui préoccupe avant tout notre commission, c'est l'amélioration de la maîtrise des équilibres sociaux, dans l'intérêt général de nos concitoyens.

M. Guy Fischer remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce débat de fin de législature est particulièrement important, car il nous permet d'avoir une vision globale des enjeux financiers : il s'agit non seulement du budget de l'État ou du budget social, mais également de l'enjeu macroéconomique du secteur public au sens large.

Nous ne nous préoccupons pas seulement de la présente année ou de l'année qui vient : nous ouvrons une perspective qui, nous le savons, sera couverte par une nouvelle législature. Notre débat de ce matin consiste donc à poser les bases, issues de la réalité, qui seront celles de l'action future, quels que soient les choix exprimés par les Françaises et les Français l'année prochaine.

La perspective des années à venir est conditionnée par les chiffres et les constats d'aujourd'hui, et par la pédagogie que nous pouvons développer à partir de la réalité d'aujourd'hui.

L'objectif fondamental qui se dégage des documents que vous nous avez communiqués, messieurs les ministres, consiste à faire refluer la dette publique. Tel est l'aspect prioritaire de votre message. Nous ne pouvons que nous réjouir de la prise de conscience qui s'est accélérée ces derniers mois, notamment grâce à l'action du ministre des finances, Thierry Breton. Tout le monde s'accorde aujourd'hui sur le caractère insoutenable de l'endettement du pays et de son évolution au fil de l'eau.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Nous ne sommes pas d'accord sur les solutions !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je ne parle pas encore de solutions, nous y viendrons, ma chère collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La commission des finances se réjouit à l'unanimité, je crois pouvoir le dire, de cet état de choses, et elle vous invite, mes chers collègues, à faire preuve de rigueur.

Le terme « rigueur » mérite un bref commentaire. La rigueur, ce n'est pas la punition.

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

Absolument !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La rigueur, c'est la cohérence, c'est le sens des responsabilités, c'est la bonne gestion. En d'autres termes, la rigueur consiste à accomplir le service pour lequel on est élu.

Le premier témoignage de la rigueur, c'est la vérité. Dire la vérité en mots, c'est bien ! La dire en chiffres, c'est encore mieux !

De ce point de vue, monsieur le président du Sénat, permettez-moi de déplorer une nouvelle fois que nous ne disposions pas, en séance plénière dans l'hémicycle, d'écrans incrustés dans les pupitres, comme cela existe dans de nombreux parlements plus pauvres que le nôtre. On ne peut plus se satisfaire de commentaires verbaux de chiffres, alors que les choses seraient tellement plus simples à comprendre, plus rapides à exposer, si nous disposions enfin de ce matériel élémentaire.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, rapporteur général. Mes chers collègues, il faut faire bouger les choses ! Et pas seulement à l'extérieur de nos murs ; à l'intérieur aussi !

Applaudissementssur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

M. le président du Sénat vous a entendu, monsieur le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je remercie M. le président de son écoute attentive et de son aide pour faire aboutir ce vieux projet qui, si je ne me trompe, était déjà soutenu par Alain Lambert lorsqu'il présidait la commission des finances.

J'en reviens à mon propos. Le Gouvernement nous incite à respecter des principes. Sur ce terrain, la commission des finances le suit, à une large majorité.

Il convient d'abord de mobiliser l'État et les administrations de sécurité sociale pour revenir rapidement au-dessous du solde qui stabilise la dette publique, c'est-à-dire le solde en deçà duquel le rapport entre la dette publique et le produit intérieur brut ne croît plus. Il n'est pas encore question de réduire la dette publique ; il s'agit de parvenir au point où elle cesse de s'accroître en proportion de la richesse nationale.

Ensuite, il importe, nous dit le Gouvernement, - et nous le suivrons - de rechercher des économies structurelles et de s'aider par une démarche empirique, celle des audits de modernisation.

Je souhaite rendre hommage à l'action pugnace du ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, Jean-François Copé, car ce levier expérimental est essentiel pour faire bouger les mentalités. Ce n'est pas par doctrine que l'on réduit des crédits ou des effectifs ! C'est tout simplement parce que le peuple français nous demande des comptes et qu'il a le droit de bénéficier de services publics lui garantissant que son argent est utilisé au mieux.

Mes chers collègues, je voudrais que nous y réfléchissions un instant, et même sur les travées de l'opposition : au nom de quoi le peuple devrait-il être moins exigeant qu'un actionnaire vis-à-vis de la société dont il possède des parts ? Au nom de quoi l'État devrait-il être le seul agent économique immobile dans un monde où tout bouge ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Nous devons nous adapter et rechercher des économies structurelles. Il faut donc améliorer la gouvernance de nos services publics et s'assurer qu'ils disposent des ressources stables nécessaires à l'accomplissement de leurs missions ; j'y reviendrai.

La commission des finances approuve donc ces principes. Toutefois, elle a voulu aller plus loin et elle s'est livrée à un test de cohérence : elle s'est demandée quel était le chemin pour atteindre les objectifs fixés Tel est l'exercice auquel nous nous sommes livrés et nous avons estimé, messieurs les ministres, que la copie du Gouvernement n'était pas complète sur cet aspect des choses.

En ce qui concerne le cap clair et réaliste à tenir à moyen terme, nous estimons, pour notre part, qu'il convient de ramener le déficit public à un point de produit intérieur brut à la fin de la prochaine législature, c'est-à-dire en 2011. C'est l'échéance la plus significative.

De quel déficit s'agit-il ? Je voudrais maintenant l'expliquer.

Il s'agit, dans notre esprit, du déficit structurel, c'est-à-dire de celui qui reflète les éléments permanents des charges et des ressources du système public, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

...hors mesures exceptionnelles et hors effets de la conjoncture. Il est nécessaire de raisonner selon cette méthode pour s'assurer que les économies réalisées sont de vraies économies, que les progrès obtenus sont de vrais progrès et que les circonstances n'empirent pas ou n'améliorent pas de façon factice la réalité profonde de nos comptes publics.

Par conséquent, l'objectif que nous considérons, à tort ou à raison, comme réaliste, est d'abaisser le déficit public à un point de PIB à la fin de 2011, donc le taux d'endettement à 40 % par rapport au produit intérieur brut en 2030.

Comment y parviendra-t-on ? En chiffres ronds, cela suppose de faire passer le déficit public annuel de 60 milliards d'euros à 20 milliards d'euros. Il faut donc obtenir 40 milliards d'euros d'améliorations structurelles.

À cet égard, il convient de considérer, monsieur le ministre de la santé et des solidarités, que les réformes votées au cours de la présente législature, à savoir la réforme de l'assurance vieillesse et celle de l'assurance maladie, vont rapporter 10 milliards d'euros. J'y insiste, mes chers collègues : pour l'ensemble des membres de notre assemblée, tous groupes confondus, le travail de cette législature trouvera sa traduction dans les résultats de ces deux réformes, à condition de « serrer les boulons », à condition d'être sérieux et pragmatiques dans leur application, comme l'est, de manière remarquable, le ministre de la santé et des solidarités, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

...à condition de suivre la feuille de route, à condition de mettre en oeuvre avec persévérance ce qui a été voté. Si ces préalables sont respectés, les réformes décidées au cours de la présente législature permettront un freinage des dépenses à hauteur de 10 milliards d'euros par an par rapport à la tendance spontanée d'évolution de celles-ci.

Cela étant posé, il reste donc 30 milliards d'euros d'économies à trouver.

Comme les membres de la commission des finances et le rapporteur général n'ont pas beaucoup d'imagination, ils ont considéré que ces 30 milliards d'euros pouvaient se répartir en trois paquets de 10 milliards d'euros chacun. C'est naturellement une simple façon d'illustrer les choses.

Tout d'abord, en ce qui concerne l'État, quel est l'effort raisonnable que ce dernier peut accomplir, d'ici à 2011, en termes de réduction structurelle de ses charges ? Nous estimons qu'un effort de l'ordre de 10 milliards d'euros est possible et raisonnable. Dégager une telle économie ne sera pas forcément simple, car il faudra trouver chaque année les meilleures solutions et déployer, là aussi, du travail, de la conviction, de la pédagogie.

Cela étant, voyons quelles sont les données fondamentales.

Nous entrons, monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, dans une période où les taux d'intérêt commencent à se tendre. Nous sommes partis d'une hypothèse, qui vaut ce qu'elle vaut et qui est, bien sûr, discutable, selon laquelle, sur la période courant jusqu'à la fin de 2011, le taux moyen de financement de l'État sera supérieur de 70 points de base, soit de 0, 7 %, à ce qu'il est actuellement.

En nous fondant sur cette seule hypothèse, nous constatons que la dépense annuelle supplémentaire, compte tenu des effets induits par la dette existante, sera de 5 milliards d'euros. Dans l'élaboration du budget de l'État, il faut donc d'abord tenir compte du passé et du présent de la dette, ainsi que de la dette nouvelle que nous devrons continuer à souscrire chaque année jusqu'en 2011.

Par quoi cette dépense supplémentaire annuelle de 5 milliards d'euros peut-elle être compensée ?

Elle peut l'être d'abord par la poursuite de l'effort de maîtrise des dépenses publiques par rapport à la tendance acquise ou à la tendance moyenne de la période 1994-2005. Maintenir une croissance nulle de leur volume chaque année représente une amélioration de 4 milliards d'euros.

Ensuite, il faut bien sûr s'intéresser aux principaux postes de charges du budget de l'État, et d'abord au plus volumineux, au plus essentiel d'entre eux, à savoir la main-d'oeuvre. Nous considérons que, en ce qui concerne cette dernière, la non-compensation d'un départ à la retraite sur deux rendra possible une économie annuelle de l'ordre de 5 milliards d'euros. Pour dire les choses simplement, le surcoût engendré par la hausse du taux moyen de financement de l'État serait compensé grâce à l'application de la règle de la non-compensation d'un départ à la retraite sur deux.

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

À Bercy, ce sont deux départs à la retraite sur trois qui ne sont pas compensés !

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

C'est fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

En effet, et il faut vous en donner acte. Si vous n'agissiez pas ainsi, comment seriez-vous crédibles aux yeux de vos collègues qui demandent des crédits supplémentaires ?

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

Absolument !

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Bercy est une vitrine !

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

M. Thierry Breton, ministre. Nous essayons !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

... c'est dans la vocation du ministère de l'économie et des finances !

J'en terminerai sur ce point en indiquant que, à nos yeux, la régulation des effectifs n'est pas l'alpha et l'oméga de la politique de la fonction publique ; c'est la résultante de beaucoup d'efforts, qui doivent être au moins autant qualitatifs que quantitatifs. En vérité, c'est même la première de ces deux dimensions qui doit primer : c'est en mobilisant mieux les ressources humaines de la fonction publique, en motivant, en remotivant, en impliquant les agents, en décentralisant la gestion que l'on parviendra à rendre les services publics plus efficaces, avec des effectifs un peu moindres.

À ce propos, l'application de la règle de la non-compensation de tous les départs à la retraite que j'ai évoquée à l'instant représente, pour la période considérée, 190 000 emplois. Sur ce point, n'oubliez pas, mes chers collègues, qu'aujourd'hui le poids de l'absentéisme dans les services publics de l'État équivaut à 100 000 emplois. Il existe donc des marges sur lesquelles il est possible de travailler, afin d'améliorer réellement et structurellement les choses.

En ce qui concerne maintenant les régimes sociaux, il y aura naturellement aussi des efforts à faire. À cet égard, nous avons fait figurer des chiffrages indicatifs dans le rapport de la commission des finances. Nous estimons que chacune des branches de la sécurité sociale doit pouvoir contribuer à des économies supplémentaires, particulièrement, nous l'espérons, l'assurance chômage, si elle est mieux organisée et si elle bénéficie d'une évolution favorable et durable de la situation de l'emploi.

Je voudrais achever cette présentation de nos préconisations en évoquant le volet des recettes.

Mes chers collègues, la conviction de la commission des finances est que tout le chemin ne peut pas être parcouru grâce à une action sur les seules dépenses. Il faut que les recettes soient au rendez-vous.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Sans augmentation des dépenses !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Première règle à suivre dans ce domaine : pas d'allégement de recettes qui ne soit compensé l'année même.

Seconde règle : définir les assiettes des impositions et contributions de manière à renforcer la compétitivité de l'économie. Le combat du président Jean Arthuis, qui est celui de toute la commission des finances, en tout cas d'une large majorité de celle-ci, c'est le combat de la compétitivité.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Or, quand on constate que la France est mal placée, en Europe, au regard des taux d'imposition implicites du travail et du capital, on ne peut que redire que ces impôts reposent sur les assiettes les plus volatiles, les plus mobiles qui soient dans le monde d'aujourd'hui, et que l'impôt sur la consommation devra assurer une part plus importante des recettes de l'État.

Nous estimons en outre, messieurs les ministres, que, dans le cadre d'une nouvelle stratégie fiscale, il faudra réduire le nombre des niches fiscales, rendre les impôts plus clairs, plus lisibles, et instaurer une vraie dynamique de l'assiette, c'est-à-dire une dynamique de l'enrichissement collectif, permettant au système fiscal de fonctionner avec un rendement accru.

En effet, si nous ne bénéficions pas d'un rendement accru des prélèvements obligatoires, il est tout à fait clair que l'exercice sera plus difficile à réaliser et qu'atteindre nos objectifs imposera des coupes plus sévères dans les crédits des administrations de l'État et de la sécurité sociale.

Nous considérons enfin qu'il faut se poser sérieusement la question du coût, qui est actuellement de l'ordre de 20 milliards d'euros par an, des exonérations de charges sociales pour les bas salaires. Dans le cadre d'une politique de TVA sociale, il est possible de faire l'économie d'une partie, fût-elle modeste, de ces dépenses, économie qui se chiffrera en milliards d'euros.

De même, dans la mesure où le SMIC est augmenté structurellement chaque année, on peut s'interroger sur les raisons pour lesquelles il faudrait que le seuil de dégrèvement reste immuablement fixé à 1, 6 fois le SMIC.

En tout état de cause, d'un côté comme de l'autre, il y a des économies à réaliser, qui sont des facteurs de responsabilisation et de compétitivité pour nos entreprises.

Par conséquent, mes chers collègues, à partir de ces principes - réexamen des niches sociales, suppression d'un maximum de niches fiscales, création d'un système de prélèvements obligatoires plus clair, plus lisible, plus global, plus favorable à la compétitivité -, il sera vraiment possible d'améliorer les choses.

Nous allons, d'ici peu, examiner les éléments budgétaires pour l'exercice 2007. Ce sera notre travail de la rentrée.

Le voeu que je forme, en conclusion, c'est que le Gouvernement crée les conditions d'un bon débat pour la session parlementaire qui vient. En d'autres termes, messieurs les ministres, jetez les bases stables dont nous avons besoin pour que, à partir de 2007, nous disposions de marges de manoeuvre qui soient les plus larges possible.

En effet, un État qui n'a pas de marge de manoeuvre budgétaire est un État impuissant ; un État impuissant est un État que l'on ne respecte pas, un État qui nourrit les extrémismes, les déceptions, les frustrations...

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

Et les illusions !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

En effet, monsieur le ministre !

La noble mission qui est la vôtre, en cette période difficile de fin de législature, est bien de ne pas vous laisser prendre au miroir des promesses, des promesses que l'on est tenté de faire pour se débarrasser des sollicitations. Ce serait naturellement la pire des solutions, mais de cela, vous êtes convaincus, messieurs les ministres !

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

C'est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, rapporteur général. Tant vos propos que votre action le montrent, et surtout le montreront dans les mois qui viennent. Le Sénat vous soutiendra, messieurs les ministres

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, rapporteur général. En tout cas, une large partie du Sénat soutiendra le Gouvernement. Comme vous n'aviez guère réagi, jusqu'à présent, à mes propos, j'ai pensé que vous les approuviez, chers collègues de l'opposition !

Rires

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Une large partie du Sénat, donc, soutiendra le Gouvernement dans cette attitude de courage qui sera à son honneur : ne pas compromettre l'avenir, permettre la préparation des choix fondamentaux en toute clarté, faire en sorte que notre pays se réconcilie avec son économie, que les Françaises et les Français, dans le grand débat à venir, comprennent que les illusions n'ont plus cours, que le monde est global...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, rapporteur général. ...et que tenir un langage de vérité, même si la vérité est un peu difficile à dire, est la seule vraie façon de les servir et de préparer leur avenir.

Applaudissementssur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

Très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, il n'est pas facile d'intervenir après le rapporteur général et les présidents de la commission des finances et de la commission des affaires sociales, mais je vais tenter d'apporter, en qualité de rapporteur de la commission des affaires sociales chargé des équilibres financiers, une modeste contribution à ce débat, dont je me réjouis, à l'instar du président Nicolas About.

Il s'agit d'une première, même si nous avions contribué à un débat sous une autre forme l'année dernière. J'espère que ce nouvel environnement favorisera le dialogue entre le ministère des finances et celui des affaires sociales.

Cette discussion en amont des grandes lignes du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, à la lumière des comptes de l'année écoulée, 2005, et de ceux de l'année en cours, 2006, est une innovation que nous avions souhaitée lors de l'élaboration du nouveau cadre organique institué par la LOLFSS, et qui va, me semble-t-il, prouver son utilité cette année.

J'ai souhaité concentrer mon intervention sur l'évolution actuelle des finances sociales et sur leurs perspectives, et la décliner autour de quatre constats.

Premier constat : l'objectif rappelé tout à l'heure par Xavier Bertrand, à savoir le retour à l'équilibre en 2009, s'annonce particulièrement difficile.

Deuxième constat : les relations entre l'État et la sécurité sociale manquent de transparence. La sécurité sociale est trop souvent utilisée comme une variable d'ajustement pour le budget de l'État ; je l'ai maintes fois dénoncé, mais je constate que j'ai quelques difficultés à me faire entendre. Il ne faut jamais désespérer ; j'espère qu'aujourd'hui je serai entendu.

Troisième constat, particulièrement préoccupant : aucune solution ne semble se dessiner pour faire face à la situation qui est devenue intenable du fonds de solidarité vieillesse, le FSV, et du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, le FFIPSA. J'ai cru comprendre que Jean-François Copé en avait conscience, et j'espère qu'il en est de même pour Thierry Breton.

Un effort a été accompli l'année dernière sur le FFIPSA. Je fais partie du Conseil d'orientation des finances publiques. Jean-François Copé nous a rappelé que 2, 5 milliards d'euros avaient été « mis au pot ». Sur les 3, 2 milliards d'euros que représente le basculement du BAPSA vers le FFIPSA, il manque 700 millions d'euros, sans compter le flux, que nous avons laissé courir. Le tout cumulé représente une somme non négligeable, que je rappellerai dans quelques instants.

Quatrième constat : la réforme du financement de la protection sociale est une entreprise complexe, comme le montrent de récents rapports, notamment celui qui concerne l'expérience allemande ; cette dernière a fait l'objet d'une étude de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS, mise en place au début de l'année par notre commission et que j'ai l'honneur de présider.

S'agissant du retour à l'équilibre en 2009, qui apparaît particulièrement délicat, certes, grâce aux réformes menées par le Gouvernement, les tendances antérieures se sont très nettement infléchies.

Le déficit du régime général pour 2005 s'établit à 11, 6 milliards d'euros. Il devrait s'élever à un peu plus de 10 milliards d'euros en 2006, ce qui représente un léger infléchissement. Si rien n'avait été fait, je le dis à l'intention de nos collègues de l'opposition qui, trop souvent, regrettent la situation du déficit, il aurait atteint 16 milliards d'euros. Des efforts sensibles ont donc été accomplis.

Mais chacune des branches est en déficit, pour la deuxième année consécutive, et les perspectives d'amélioration restent soumises à de fortes incertitudes.

En ce qui concerne d'abord les recettes, on doit observer que les exercices 2005 et 2006 ont bénéficié, j'espère que vous en conviendrez, de recettes exceptionnelles. En 2005, la soulte des industries électriques et gazières a représenté 0, 4 point dans la croissance des recettes et, comme le souligne à juste titre la Cour des comptes, cette ressource exceptionnelle n'est « pas reproductible ».

De même, en 2006, la modification des modalités de taxation des plans d'épargne logement de plus de dix ans devrait permettre d'engranger 2 milliards d'euros, soit le double des prévisions de la loi de financement pour 2006. Ces recettes ont permis d'améliorer sensiblement les résultats. Là encore, il s'agit d'un fusil à un coup, car ce sont des recettes en grande partie non reconductibles.

Enfin, mais cette fois-ci nous devons nous en féliciter, le recul du chômage a entraîné une évolution positive de la masse salariale et donc permis un meilleur rendement de la CSG. Il faut simplement espérer que cette tendance positive se maintienne au cours des prochains mois et que la croissance reste à un niveau suffisamment élevé.

Du côté des charges, on observe un indéniable ralentissement des dépenses d'assurance maladie. La progression de l'ONDAM a été contenue à 3, 9 % en 2005, après avoir atteint 4, 9 % en 2004 et 6, 4 % en 2003. Xavier Bertrand a eu raison de rappeler tout à l'heure que l'ONDAM de 2005 est le seul à avoir été respecté depuis 1997. Le premier ONDAM résultait de la « réforme Juppé », donc de la première loi de financement de la sécurité sociale. La situation n'a cessé de déraper les années suivantes par rapport à l'objectif que nous avions voté.

Pour 2006, la prévision est de + 1, 7 %, ce qui est très nettement inférieur aux exercices antérieurs. Ce chiffre démontre à lui seul le chemin parcouru et la volonté du Gouvernement non seulement d'agir, mais d'obtenir des résultats concrets.

Néanmoins, dans son avis du 31 mai dernier, le comité d'alerte a constaté un dérapage de 600 millions d'euros sur les soins de ville. Il n'est pas encore en mesure de se prononcer sur les dépenses des établissements de santé, mais rien ne dit que, dans ce secteur, on ne doive pas enregistrer des dépenses supplémentaires en fin d'année, comme cela a été constaté en 2005, à hauteur de 670 millions d'euros.

Je vous rappelle au passage que le rapport de la MECSS sur la dette sociale a fait état d'importants reports de charges des hôpitaux publics, atteignant plus de 400 millions d'euros. Les nouveaux EPRD, les états prévisionnels de recettes et de dépenses des hôpitaux, permettront d'y voir plus clair, mais la situation reste globalement déficitaire.

Je souhaite insister sur le problème du médicament. Si l'on constate en effet une certaine inflexion dans la progression des dépenses, rien ne semble être encore acquis. Le comité d'alerte affirme d'ailleurs : « c'est dans le domaine du médicament que le risque de dépassement de l'objectif, ambitieux, fixé pour 2006 est le plus grand ».

Pour suivre au plus près les évolutions de ce poste de dépenses, l'une des clés de la réussite de la réforme de l'assurance maladie, je renouvelle notre souhait, messieurs les ministres, de pouvoir disposer d'un sous-objectif de l'ONDAM exclusivement consacré aux dépenses de médicaments. L'idéal serait même de le décomposer en deux parties : l'une pour les médicaments prescrits en ville, l'autre pour les médicaments prescrits à l'hôpital.

Le ministre de la santé souhaiterait peut-être bénéficier de moyens humains supplémentaires pour l'aider dans sa tâche. Mais comme M. Copé et M. Breton sont en train de réfléchir à la diminution des effectifs de la fonction publique, sans doute pourraient-ils, à cette occasion, procéder à un redéploiement des moyens humains du ministère des finances vers le ministère de la santé pour aider M. Bertrand dans le travail qu'il doit effectuer. Car après toutes les demandes qui ont été présentées tout à l'heure par le président Nicolas About, les collaborateurs du ministre vont devoir se mettre à l'oeuvre.

Il faut tirer tous les enseignements de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, qui a accru de façon considérable la tâche du ministère de la santé. D'ailleurs, monsieur le ministre des finances, le document que vous nous avez remis est particulièrement discret et manque d'éléments d'information pour le Parlement sur l'évolution des finances sociales.

Vous avez été très exhaustif en ce qui concerne la loi de finances, car c'est un exercice auquel vos collaborateurs sont habitués. Mais les finances sociales sont plutôt du ressort du ministère de la santé. Alors, donnez à ce dernier les moyens nécessaires ! Ainsi, l'année prochaine, nous aurons un document qui correspondra tout à fait à notre attente. Je ne doute pas que vous effectuerez ce redéploiement.

Pour ce qui est de la branche vieillesse, nous avons encore quelques doutes sur son avenir. Ainsi, la commission des comptes de la sécurité sociale, dans son rapport publié le 8 juin dernier, a révisé à la hausse les dépenses de la CNAV pour 2006 à hauteur d'un peu plus de 800 millions d'euros.

Ladite commission évoque un point important, qui n'a pas été abordé tout à l'heure par notre collègue rapporteur général, mais qu'il y a lieu d'intégrer dans l'évolution des dépenses futures de la branche vieillesse : il est extrêmement difficile pour la CNAV de chiffrer des prévisions qui sont liées à l'évolution du comportement des futurs retraités. Il y a là une véritable incertitude, ce qui est inhabituel dans le domaine des retraites.

Deux phénomènes se cumulent : le nombre des départs intervenus dans le cadre des carrières longues - lorsqu'on a voté la réforme, on a sous-estimé l'effet qui résulterait de ce droit, tout à fait légitime, que nous avons ouvert à nos concitoyens -, et le comportement de la première génération du baby -boom, qui arrive aujourd'hui, à 60 ans, à l'âge de la retraite.

J'ai le sentiment qu'un nombre non négligeable de salariés, inquiets des effets de l'application de la réforme, font valoir plus rapidement leurs droits qu'ils ne l'auraient fait si les règles n'avaient pas changé. Ce n'est pas pour autant qu'il aurait fallu ne rien faire. Mais cette anticipation de départs à la retraite représente des dépenses supplémentaires importantes à la charge de la CNAV. La présidente de la CNAV avait évalué à 350 millions d'euros le coût d'un mois d'anticipation. Imaginez ce qu'il en est pour une année complète ! Ainsi, l'amplification du déficit peut résulter du seul changement de comportement des futurs retraités.

S'agissant de la branche famille, enfin, la croissance des dépenses reste très dynamique, principalement du fait de la montée en charge de la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE, dont le coût avait été largement sous-estimé. Sa progression devrait rester significative et entraîner un déficit qui pourrait se maintenir plus longtemps que cela n'avait été envisagé par le Gouvernement ; de conjoncturel, celui-ci pourrait devenir, peu à peu, structurel. Je vous rappelle que le déficit prévisionnel est de 1, 5 milliard d'euros pour 2006.

Je retiens de l'audition de Mme Prud'homme, présidente de la CNAF, qu'il est peu probable que la situation des comptes de la CNAF s'améliore avant 2009. Et ce ne serait peut-être pas avant l'année 2010 que la CNAF pourrait retrouver l'équilibre et espérer renouer avec des excédents d'exploitation d'une année sur l'autre.

Je me permets d'attirer l'attention du ministre de la santé et du ministre des finances sur un point : ce n'est certainement pas en ayant adopté la mesure qui figurait dans le projet de loi réformant la protection de l'enfance afin de compenser les nouvelles charges devant être supportées par les collectivités locales, en particulier les départements, que l'on va améliorer les comptes de la branche famille.

Mme Prud'homme a été très claire : à niveau de charges constant, on renouera avec l'équilibre et les excédents à partir de 2010. Mais si, chaque année, on ajoute 100 millions ou 200 millions d'euros à la charge de la CNAF, on retardera d'autant l'atteinte de l'équilibre en 2010. Cet objectif peut être compromis par les dispositions que nous adoptons au travers de différentes lois ordinaires.

Cette observation me donne l'occasion de rappeler à MM. les ministres ainsi qu'aux membres de la commission des finances - mais ils en sont sans doute aussi soucieux que nous-mêmes - que les lois ordinaires ne devraient plus être présentées au Parlement sans être accompagnées d'une étude de leur impact financier non seulement sur la loi de finances, mais également sur la loi de financement de la sécurité sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Sinon, comment prétendre parvenir à maîtriser les déficits et l'endettement du pays ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

À cela s'ajoute le problème non moins préoccupant de l'accumulation des déficits.

La loi de réforme de l'assurance maladie a traité une partie de la question pour la branche maladie grâce à la reprise de 50 milliards d'euros de déficits par la CADES. Néanmoins, monsieur le ministre de la santé et des solidarités, d'ici à 2009, un minimum de 15 milliards d'euros restera à financer.

Les 35 milliards d'euros venant du FOREC et transférés à la CADES ajoutés au déficit prévisionnel estimé à 15 milliards d'euros jusqu'en 2007 représentaient au total 50 milliards d'euros, ce qui nous avait permis d'espérer que le transfert de cette somme allait régler le problème et nous permettre de renouer avec l'équilibre. Or, en réalité, comme cela a déjà été relevé l'année dernière, il y aura malgré tout un dérapage, qui sera au minimum de 15 milliards d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Il nous faudra bien nous poser la question de savoir comment les financer. Allons-nous rouvrir la CADES ? Dans ce cas, je le rappelle, il faudra, en application de la loi organique, prévoir une recette pour assurer son financement. Ou bien parviendrons-nous à renouer avec des excédents nous permettant, sur la durée, de financer le dérapage constaté du déficit ?

Ces sommes viendront, en tout cas, augmenter notre stock de dette sociale. Or M. Pébereau avait appelé l'attention du Parlement sur la nécessité d'interdire absolument la possibilité à la fois d'ouvrir à nouveau les comptes de la CADES et de prolonger les situations de déficit.

Peut-être aurions-nous pu nous inspirer de la manière dont les Allemands ont géré le déficit des branches. En effet, en Allemagne, pays dont je reviens, la situation des comptes qui se profile à l'horizon 2007-2008 n'est, certes, pas rassurante parce qu'un déficit de la branche maladie, qui pourrait être de l'ordre de 7 milliards à 8 milliards d'euros, devrait être constaté, mais un excédent de 4 milliards d'euros a été dégagé en 2004 et aucune dette liée à la sécurité sociale n'est reportée sur les générations futures.

Debut de section - Permalien
Xavier Bertrand, ministre

Ils font moins bien que nous et les médecins sont dans la rue !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

En France, cette dette est actuellement de l'ordre de 100 milliards d'euros, alors qu'en Allemagne elle doit se situer entre 3 milliards et 4 milliards d'euros. Les Allemands ont géré au fil de l'eau les déficits, ce que nous n'avons pas fait dans notre pays.

« L'engagement national de désendettement » ne peut, bien entendu, qu'être approuvé, mais il signifie que l'on évite absolument de recréer les causes qui ont conduit, du moins en matière sociale, à l'accumulation de sommes que nous avons bien légèrement choisi de reporter sur nos enfants et petits-enfants.

J'en viens au deuxième constat de mon analyse, qui porte sur les relations entre l'État et la sécurité sociale. La situation n'est pas nouvelle et nous la dénonçons depuis des années ; il est donc inutile d'apporter des preuves. Je voudrais toutefois développer trois points.

En premier lieu, s'agissant des compensations d'exonérations, vous vous souvenez, bien sûr, mes chers collègues, de nos débats de l'automne dernier.

Le Gouvernement a supprimé du budget de l'emploi les sommes consacrées à la compensation des allégements de charges, d'un montant proche de 20 milliards d'euros, ce qui, au passage, est loin d'être neutre en termes de progression des masses budgétaires, et il a décidé de transférer un panier de recettes à la sécurité sociale pour en assurer le financement.

On nous avait alors promis, messieurs les ministres, et j'entends encore les paroles de M. Copé, une égalité parfaite entre les recettes transférées et les dépenses d'allégement, soit une compensation à l'euro près.

M. le ministre délégué fait un signe d'approbation.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Vous avez raison : c'est ma marque de fabrique !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

...et que vous nous annonciez, soit dans la réponse que vous nous apporterez aujourd'hui, soit dans le cadre du prochain projet de loi de finances, le rattrapage qui permettra d'assurer l'équilibre des comptes et la compensation à l'euro près.

Il est indispensable que le manque à gagner pour la sécurité sociale soit compensé par l'État : ce n'est pas à la sécurité sociale de financer la politique de l'emploi ! Il devra en aller de même en 2007 et au cours des années ultérieures.

En deuxième lieu, s'agissant de la reprise des dettes du plan textile et du FOREC, la Cour des comptes, dans son rapport, précise que la question devra être réglée à l'occasion de l'établissement du bilan d'entrée de l'État. Nous insistons une nouvelle fois pour que le Gouvernement inscrive bien ces sommes en créance vis-à-vis de la sécurité sociale.

En troisième lieu, j'évoquerai la mise à la charge de la sécurité sociale de dépenses que je qualifierai de « régaliennes » et qui relèvent normalement du budget de l'État, tels le plan « grippe aviaire » ou le plan Biotox - et j'en passe ! -, ou qui correspondent à de la simple débudgétisation, comme, ces derniers jours, le financement de la réforme de la protection de l'enfance, pour un montant de 150 millions d'euros.

Au passage, je me permets de faire également allusion à des dépenses de solidarité, et je pense à la CMU. L'État a en effet su s'alléger de la subvention d'équilibre qu'il devait apporter en créant une nouvelle taxe sur les alcools pour alimenter le financement de ce dispositif, alors qu'à l'origine les droits sur les alcools finançaient la branche maladie et la sécurité sociale.

On ne peut pas à la fois exiger la résorption des déficits sociaux et imposer à la sécurité sociale des dépenses supplémentaires qui ne relèvent pas de son champ normal de compétence. Il ne nous paraît pas juste que l'État apparaisse budgétairement vertueux au détriment des finances sociales.

J'en viens à mon troisième constat, qui concerne le FSV et le FFIPSA. Ayant déjà abordé le sujet, je me bornerai à citer quelques chiffres pour vous rappeler, mes chers collègues, que, si rien n'est fait, les déficits cumulés du FSV et du FFIPSA, qui atteignent déjà 8, 3 milliards d'euros, s'élèveront en 2009 à 18 milliards d'euros, ce qui est considérable.

Il faut donc absolument que des mesures soient prises dès la prochaine loi de finances. La Cour des comptes fait le même constat et elle considère par ailleurs, comme notre commission, que les textes font obligation à l'État d'assurer l'équilibre de ces deux structures.

À la suite du débat organisé lors de l'examen du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement a mis en place un groupe de travail chargé de trouver une solution aux problèmes du FFIPSA par le recours à la compensation. Mais ce groupe de travail, qui était présidé par Jean-François Chadelat, et auquel ont participé nos collègues Claude Domeizel et Dominique Leclerc, a abouti à une impasse. Nous nous retrouvons donc à la case départ en ayant perdu une année.

Dans ce contexte général d'accumulation des déficits, une réforme du financement de la protection sociale apparaît, à l'évidence, nécessaire. Elle s'impose en raison du volume des dépenses à financer, rappelé par Nicolas About, et de leurs perspectives d'évolution, mais, surtout, de la nouvelle exigence « zéro dette sociale » que nous sommes en train de nous fixer.

Je me réjouis d'avoir entendu le rapporteur général rappeler que les efforts accomplis grâce aux deux réformes consécutives concernant la branche vieillesse et la branche maladie ont permis de réaliser une économie de 10 milliards d'euros par an. C'est une contribution appréciable de la sécurité sociale à la maîtrise de l'endettement et des déficits, et il faut bien entendu continuer dans cette voie.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

C'est peut-être la raison pour laquelle le parti socialiste veut supprimer la réforme Fillon...

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Au total, cela correspondrait à 12 milliards d'euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Rien que cela ! Je note d'ailleurs que nos collègues socialistes sont particulièrement silencieux. Or qui ne dit rien consent...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

...et nos collègues approuvent donc vos propos, monsieur le rapporteur général, ainsi que les miens !

Je rappelle, à cet égard, que nous avons voté, il y a moins d'un an, une disposition que je qualifierai d' « historique » : l'impossibilité de transférer toute nouvelle dette à la CADES sans le transfert des ressources correspondantes, disposition dont le Conseil constitutionnel a confirmé le niveau organique.

Réformer le financement de la protection sociale est néanmoins une entreprise complexe, comme le montrent plusieurs rapports récemment publiés et l'exemple de l'expérience allemande.

Le Gouvernement semble avoir renoncé à proposer une réforme de l'assiette des cotisations sociales employeurs dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Dans ces conditions, monsieur le ministre, nous allons examiner avec intérêt vos propositions.

Cependant, nous pensons que les différentes pistes envisageables - instauration d'une cotisation sur la valeur ajoutée, modulation des cotisations sociales en fonction de la valeur ajoutée, introduction d'une cotisation patronale généralisée ou, quatrième piste chère à M. Arthuis et dont vient de se faire l'écho M. Marini, création d'une TVA sociale -...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

...nécessitent une réflexion extrêmement approfondie, tant leurs conséquences peuvent être importantes, voire imprévisibles, notamment en termes d'activité et de compétitivité économique.

Or la préservation de notre système de protection sociale est étroitement dépendante de la bonne santé de notre économie. À cet égard, j'ai noté le réalisme de notre rapporteur général, qui a considéré que nous pouvions faire un pas dans cette direction, mais qu'il fallait avoir conscience que, ce faisant, nous ne réglerions pas la totalité du problème du financement de la sécurité sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

C'est pourquoi la commission des affaires sociales va, de son côté, poursuivre elle aussi sa réflexion afin d'être en mesure d'apporter sa contribution au débat. De même, elle continuera ses activités de contrôle, comme, récemment, sur les modalités de mise en place de la tarification à l'activité à l'hôpital, ainsi que son travail de proposition, à l'image de ce qu'elle vient de faire pour le médicament.

Nous sommes bien déterminés à utiliser les conclusions de ces réflexions pour améliorer le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, dans l'intérêt de notre système de sécurité sociale, dans l'intérêt de nos concitoyens et dans l'intérêt de notre pays. J'écouterai donc avec beaucoup d'attention les réponses que nous apporteront MM. les ministres pour nous rassurer quant à l'avenir de la sécurité sociale.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la commission des affaires économiques porte, comme vous le savez, une grande attention à la situation des finances publiques de notre pays. C'est pourquoi son président, M. Emorine, a souhaité qu'elle intervienne dans ce débat et m'a demandé d'être son porte-parole.

Nous avons souvent eu l'occasion d'exprimer notre convergence d'analyse avec nos collègues de la commission des finances. Il ne vous surprendra donc pas, messieurs les ministres, que je fasse miennes les excellentes observations du président et du rapporteur général de la commission des finances.

En effet, la résorption des déficits publics récurrents et de la dette considérable qui en est la conséquence n'est plus seulement une obligation morale envers les générations futures ; c'est désormais une ardente nécessité pour préserver l'équilibre économique et social de notre pays.

Je ne m'attarderai pas longuement sur ces éléments, car ils sont bien connus. Les éléments chiffrés présentés dans le rapport de notre collègue Philippe Marini illustrent suffisamment la gravité de la situation. Le rapporteur général a relevé, à juste titre, le paradoxe étonnant qui fait qu'alors que tous reconnaissent la gravité à moyen terme du problème de l'endettement et des déficits publics beaucoup rechignent encore à en tirer les conséquences concrètes.

Comment ne pas s'inquiéter quand on relève, en outre, que ce déficit - et l'endettement qui est son corollaire - tend de plus en plus à permettre non pas des investissements porteurs d'avenir, mais, le plus souvent, le financement de dépenses de fonctionnement ?

Messieurs les ministres, mes chers collègues, nous sommes à l'heure des choix ! Ceux de la majorité de la commission des affaires économiques sont clairs : nous soutenons la position de la commission des finances de réduction des déficits publics.

Je voudrais, à cette occasion, mes chers collègues, vous dire la satisfaction que j'ai de voir ce Gouvernement annoncer courageusement cet effort de maîtrise de la dépense publique, loin de toute attitude électoraliste à l'approche des importantes échéances de l'année prochaine. Il s'agit là d'un geste fort de courage politique, il faut le souligner, et je crois que notre Haute Assemblée doit saluer de tels comportements vertueux du Gouvernement.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Le courage du Gouvernement se doit d'autant plus d'être relevé que ce choix entraîne naturellement des conséquences concrètes : réduire les déficits, c'est en premier lieu diminuer les dépenses de l'État. De ce point de vue, il est évident que nous devons tirer parti des gains de productivité naturels réalisés par les administrations publiques pour réduire, lorsque c'est possible, leurs effectifs.

Il s'agit là d'un point très important sur lequel je souhaite qu'il n'y ait aucune ambiguïté : nous ne sommes pas pour supprimer des postes de fonctionnaires par principe. Notre commission est très attachée au service public ; elle l'a démontré sur tous les textes ayant encadré l'évolution de nos grands services publics ces dernières années.

Mais le service public que nous voulons, c'est un service au public, un service public efficace, soucieux de l'argent du contribuable, et à même de répondre au mieux aux évolutions de la société.

Dans ces conditions, j'incline à penser, comme nos collègues de la commission des finances, qu'un effort beaucoup plus important pourrait être accompli en matière de non-renouvellement des départs en retraite de fonctionnaires.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Ce n'est déjà pas mal !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Il nous faut, en la matière, avoir une attitude pragmatique dans le cadre d'une action de réforme coordonnée et concertée dont la fin soit l'amélioration de l'efficacité, et non la seule réduction des effectifs. Je crois très sincèrement que le pragmatisme doit nous conduire aujourd'hui à réduire les effectifs de certaines administrations.

Je ne prétends pas, mes chers collègues, qu'il s'agisse là d'une tâche simple. Mais nous pouvons être convaincus que plus nous différons les réformes, plus elles seront difficiles à mettre en oeuvre. C'est donc dès 2007, dans le cadre du projet de loi de finances, que nous devons relancer cet effort.

Je voudrais vous citer un exemple qui m'a beaucoup frappé : notre commission a auditionné, il y a quelques jours, le directeur général de l'Office national des forêts, l'ONF ; en quatre ans, cet établissement public a renoué avec l'équilibre financier, s'est réorganisé et a vu ses effectifs diminuer de 1 500 agents sur 12 000. Que l'on compare cet effort à celui qui est proposé pour l'État, et l'on verra bien que le chiffre de 15 000 postes non remplacés est excessivement modeste : moins de 0, 01 % des effectifs de la fonction publique d'État.

J'ai salué tout à l'heure le courage du Gouvernement, et si j'ai un reproche à lui faire, c'est donc de ne pas avoir fait déjà quelques pas de plus sur la voie judicieuse qu'il emprunte.

Par ailleurs, messieurs les ministres, loin de moi l'idée de vous faire un procès d'intention, mais le Sénat a bien souvent été amené à constater que l'exécution budgétaire était bien moins vertueuse que les positions initiales ne le laissaient penser. La Haute Assemblée est naturellement dans son rôle lorsqu'elle vérifie que les promesses sont tenues.

De ce point de vue, je dois vous faire part de ma préoccupation à la lecture du programme de stabilité que la France a transmis à la Commission européenne. L'analyse de ce programme par le rapporteur général est sévère, mais juste ! Il est capital que l'État soit exemplaire en matière de sincérité budgétaire et de respect de ses engagements.

Messieurs les ministres, quels engagements pouvez-vous prendre aujourd'hui devant nous quant au respect de ce programme de stabilité ? En tout état de cause, je voulais vous prévenir, dès le débat d'orientation budgétaire, que notre commission abordera l'examen du projet de loi de finances pour 2007 avec des exigences très fortes en matière d'équilibre des finances publiques.

Nous sommes convaincus qu'il faut aller plus loin et que vous pouvez le faire. J'ai l'espoir que vous mettiez à profit les mois d'interruption parlementaire pour renforcer l'ambition réformatrice du projet de loi de finances que nous examinerons à la rentrée.

Enfin, mes chers collègues, je saisis l'occasion de ce débat d'orientation budgétaire pour me réjouir du fait que le concept de TVA sociale, cher à la commission des affaires économiques, mais aussi à la commission des finances, fasse son chemin. J'ai noté avec une grande satisfaction les déclarations en ce sens du président de l'UMP, Nicolas Sarkozy, qui constituent une bonne base de départ pour le débat dans ce domaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

, rapporteur général. C'est un thème incontournable !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

en remplacement de M. le président de la commission des affaires économiques. Il s'agit là d'un dossier très important, sur lequel notre commission - et tout particulièrement nos collègues Christian Gaudin et Francis Grignon - a travaillé tout au long de l'année 2004. Nous pensons qu'il y a beaucoup à attendre d'une refonte de notre système de prélèvements sociaux de façon à atteindre une plus grande efficacité productive, une transparence et une simplification des prélèvements et, en définitive, un renforcement de notre économie et de notre protection sociale.

Il s'agit d'un bon exemple d'un domaine où des réformes ambitieuses sont indispensables et sont attendues par nos concitoyens. Là encore, messieurs les ministres, notre commission et, je crois, la Haute Assemblée dans son ensemble attendent du Gouvernement des propositions dès 2007.

Sur toutes ces questions, vous pouvez être assuré, messieurs les ministres, du soutien aux réformes, mais aussi de l'attente exigeante de la commission des affaires économiques.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire : 103 minutes ;

Groupe socialiste : 67 minutes ;

Groupe Union centriste - UDF : 26 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen : 20 minutes ;

Groupe du Rassemblement démocratique et social européen : 15 minutes ;

Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe : 9 minutes.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Michel Mercier.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, j'ai quelque scrupule à prendre la parole après autant de grands esprits et spécialistes des finances publiques, des finances sociales, des finances locales, moi qui ne suis spécialiste de rien du tout.

Debut de section - Permalien
Xavier Bertrand, ministre

Allons, allons ! Comme en matière de santé, on a besoin de généralistes !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Je me demande où nous en sommes. On a l'impression que toutes les analyses, tous les constats ont été faits, et Dieu sait s'ils sont sévères !

Monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, vos deux discours de vérité nous ont montré où nous en sommes aujourd'hui. C'est sûrement une base de départ pour demain, car il faut bien savoir où nous en sommes pour déterminer ce que nous devons faire.

On a l'impression, après les discours des ministres, de savoir parfaitement ce qu'il faut faire. Alors, pourquoi ne le faisons-nous pas ?

Les discussions qui ont eu lieu, les constats qui ont été faits aujourd'hui ne posent-ils pas une vraie question, celle de l'efficacité de l'action publique ? Sachant ce que nous savons, voyant ce que nous voyons et étant sûrs de ce qu'il faut faire depuis vingt ans, pour quelle raison n'arrivons-nous pas à avancer davantage dans la voie de la réforme et du progrès ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est un problème d'embrayage !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Les prochaines échéances électorales, la présidentielle et les législatives, doivent nous amener à nous interroger à cet égard.

Ce n'est pas un problème de majorité : il y en a une et elle est pléthorique ; elle sait ce qu'elle veut.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Surtout quand vous y êtes !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Quand nous y sommes, monsieur le ministre, elle a plus de qualités, qui n'échappent à personne, et je ne doute pas des efforts importants que vous allez accomplir dans les mois qui viennent pour faire en sorte que nous y soyons encore. Je vous attends ; ma porte est toujours ouverte !

Cela dit, regardons où nous en sommes. Vous avez raison, monsieur le ministre, de nous dire que tout gouvernement doit n'avoir qu'un seul objectif, réduire la dette, pour des raisons évidentes de morale publique.

Il peut y avoir une dette justifiée, celle qui finance les équipements. Mais il y a une dette injustifiée, celle qui finance notre vie quotidienne. De ce point de vue, la plus injustifiée de toutes les dettes, c'est, bien sûr, la dette sociale. Comment expliquer à nos enfants que nous sommes en bonne santé, que cela ne va pas trop mal, et que ce sont eux qui vont payer ?

Debut de section - Permalien
Xavier Bertrand, ministre

Il faut réduire les déficits, ce que faisons !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Certes, monsieur le ministre, mais j'ai écouté M. Vasselle qui nous annoncé des choses moins jolies que celles que vous voulez bien nous présenter, ce que je comprends.

Debut de section - Permalien
Xavier Bertrand, ministre

Vous n'avez pas tout entendu !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Nous sommes arrivés, en quelque sorte, au bout des analyses techniques, au bout des réponses technocratiques. Ce dont nous avons besoin, c'est, naturellement, de vraies réponses politiques. Or le débat a tendance à se réduire à une exacerbation de l'opposition droite-gauche. Depuis 1978, notre pays, à chaque échéance électorale, a changé de majorité : une fois la droite, une fois la gauche. Il n'y a pas eu suffisamment de réformes et nous sommes arrivés à un pic d'endettement sans précédent.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Est-ce que la solution qui nous a amenés à l'échec nous conduira demain au succès, monsieur le rapporteur général ?

Chiffrer le programme du parti socialiste, comme vous l'avez fait, monsieur le ministre délégué au budget, est un exercice intéressant. Même la SFIO de Guy Mollet aurait proposé quelque chose de plus moderne !

Donc, vous ne prenez pas de risque, mais cela ne nous fait avancer en rien sur la voie du progrès et de la réforme.

Ces vieux clivages, fondés sur des réalités que je ne nie pas, doivent pouvoir être dépassés.

Avoir une majorité pléthorique dans les assemblées ne suffit pas à réunir une majorité dans le pays. Sinon, les réformes auraient été beaucoup plus nombreuses au cours de cette législature.

Par conséquent, la véritable utilité de ce débat est d'aider nos concitoyennes et nos concitoyens à prendre conscience de la réalité de l'état de notre pays : un déficit, une gestion habile, des factures impayées, des reports.

Je sais bien, je ne veux pas jouer les Cassandre, que tout ne peut pas être fait le même jour. Mais il faudrait au moins progresser. Dans les trois grands secteurs des dépenses de l'État, des dépenses sociales et des dépenses des collectivités locales, celui dans lequel il est probablement le plus facile d'avancer, c'est le secteur local. Les choses sont évidentes et simples !

Le Gouvernement a mené une politique de décentralisation. On peut en penser ce qu'on veut ! Pour ma part, j'y suis plutôt favorable, parce que la décision est prise au plus près des réalités, donc de façon plus responsable. Mais cela pose aussi un certain nombre de questions : l'État a-t-il su se réformer depuis la décentralisation ?

Est-il encore justifié, une fois que l'on a transféré toutes les routes et tous les équipements aux collectivités locales, de conserver une administration de l'équipement à côté d'une administration de l'agriculture, toutes les deux à la recherche d'équipements qu'elles pourraient réaliser? Il faut procéder à une fusion.

M. Dominique Braye s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

L'État ne s'est pas réformé depuis la décentralisation ; il faut qu'il le fasse. Il est tout à fait normal que l'État diminue le nombre de ses agents et que les collectivités locales augmentent le leur. C'est une évidence ! Si l'on expliquait simplement que l'État s'adapte à ses missions, qui ne sont plus les mêmes, l'effectif des fonctionnaires ne soulèverait pas de telles passions.

De la même façon, messieurs les ministres, vous nous dites en permanence que les dotations de l'État aux collectivités locales augmentent plus vite que ses propres dépenses. C'est tout à fait exact ! Mais l'État tient-il compte des dépenses que ses décisions imposent aux collectivités locales ? Il s'agit, là aussi, d'un phénomène récurrent : l'État décide pour les collectivités locales et il le fait d'autant plus généreusement que cela ne lui coûte rien, ce qui constitue un vrai problème.

Or il serait possible, à peu de frais, d'améliorer le fonctionnement des administrations locales si l'État passait avec toutes les collectivités locales un véritable contrat de confiance, en ne considérant plus celles-ci comme le lieu ou le moyen de faire ce qu'il réalisait lui-même auparavant. Il suffirait simplement de prévoir que telle compétence doit être exercée localement, afin que les décisions soient plus justes, plus efficaces, et de laisser aux collectivités locales la liberté et la responsabilité de la gestion, plutôt que de décider de leurs dépenses et de chercher, dans le même temps, à diminuer leurs recettes.

Il s'agit là d'un vrai problème de philosophie de l'action qui, me semble-t-il, pourrait trouver son application dans les relations entre l'État et les collectivités locales. Cela permettrait à tout le monde de réaliser de véritables économies et servirait d'exemple pour les deux autres secteurs que sont les finances publiques et les finances sociales.

Pourquoi, sachant tout, faisons-nous si peu ? C'est la question essentielle !

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je préciserai tout d'abord que mon intervention s'inscrit parfaitement dans le débat d'orientation sur les finances publiques et les finances sociales qui nous réunit aujourd'hui.

Quant au projet des socialistes, qui semble être le livre de chevet de M. Copé, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

... il nous sera fort utile pour vous présenter dans un an, chers collègues de la majorité sénatoriale, un collectif budgétaire dont l'objet sera de corriger les orientations que nous a proposées ce matin M. Copé.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Vous l'assumez quand même ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

M. Marc Massion. Je regrette, monsieur le ministre, que, tout à l'heure, vous ayez un peu confondu tribune du Sénat et tréteaux électoraux !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

Quand on fait le lien, comme la LOLF nous y invite, entre la discussion de la loi portant règlement définitif du budget de 2005 et l'examen des grandes lignes du futur budget de 2007, l'on ne peut que constater une évidence : par attachement atavique, sans doute, mais aussi par idéologie, le Gouvernement n'a qu'une ligne de conduite, la persistance dans l'erreur !

Le débat d'aujourd'hui sur l'orientation que le Gouvernement entend donner à la politique budgétaire de la France en 2007 se situe dans un contexte, hélas ! connu : une croissance toujours faible ; une situation des finances publiques toujours aussi dégradée, et ce depuis maintenant quatre ans.

L'on pourrait dire que nous sommes non plus devant une fracture financière, mais véritablement devant une désintégration financière. Et le pire est encore à venir ! En effet, comment réagit le Gouvernement pour faire face à cette situation ? Il en rajoute en annonçant un train de mesures pluriannuelles, non financées, bien sûr, mais dont la gestion incombera au gouvernement qui sera issu des prochaines élections.

Écoutant l'autre jour le président de la République à la télévision, on l'imaginait très bien fredonner « Tout va très bien, Madame la Marquise. » !

Le Gouvernement se livre sans cesse à des effets d'annonce permanents.

S'agissant du contexte, nous avons affaire à une croissance économique toujours faible. Malgré une croissance mondiale très forte depuis quatre ans, la France est en panne de croissance, et ce n'est pas la politique économique suivie par le Gouvernement actuel qui pourrait changer cet état de choses.

Ce Gouvernement fait beaucoup moins bien, en matière de croissance, que les gouvernements de gauche, alors que la croissance mondiale est devenue beaucoup plus forte que lorsque la gauche était aux responsabilités.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

L'investissement est atone, en dépit des profits record réalisés par les grands groupes industriels en 2005. Ceux-ci ont préféré distribuer des dividendes pléthoriques ou racheter leurs propres actions, plutôt que d'investir.

La faiblesse du commerce extérieur est aujourd'hui particulièrement inquiétante. Une mauvaise spécialisation des productions, l'insuffisance de la recherche, tant publique que privée, et, par conséquent, l'insuffisance de l'innovation contribuent à expliquer le déficit historique de l'année 2005.

Nos exportations pâtissent du manque de dynamisme et de la mauvaise adéquation aux besoins du marché international de notre appareil productif. Pourtant, nulle esquisse de l'épure d'une politique industrielle à l'horizon !

La consommation s'est, certes, améliorée, mais cela est dû au fait que les ménages ont commencé à puiser dans leur épargne. La faiblesse de l'augmentation du pouvoir d'achat moyen des ménages, ainsi que la dégradation du pouvoir d'achat des ménages les plus modestes constituent une lourde menace pour l'avenir.

Pour ce qui est des finances publiques, la croissance de l'économie française continuant à être faible, il n'est pas étonnant que le poids de la dette se fasse de plus en plus sentir. En effet, le poids croissant de la dette est tout à la fois le symptôme de la faiblesse de la croissance et la conséquence de cette faiblesse.

Pourtant, le Gouvernement s'apprête à aggraver cette situation en sous-estimant pour 2007 aussi bien le déficit, hélas ! prévisible, que les conséquences probables des facteurs perturbants que peuvent constituer la hausse du prix de l'énergie ou celle des taux d'intérêt.

Rappelons qu'une erreur d'un demi-point dans l'estimation du taux de croissance engendre un manque à gagner pour l'État d'environ 5 milliards d'euros, dont 3, 5 milliards d'euros de recettes fiscales.

En faisant adopter quatre ans de suite des budgets qui ont surestimé, en cumulé, la croissance de 3, 4 points, le Gouvernement a provoqué une situation budgétaire dangereuse, les recettes attendues ayant été surestimées de plus de 20 milliards d'euros.

Ainsi, alors qu'en 2005 le Gouvernement annonçait une croissance comprise entre 1, 5 % et 2 %, cette dernière a été corrigée à la baisse, soit 1, 2 %, diminution qui est imputable à la décélération nette de la dépense publique.

Pour 2007, à nouveau, le Gouvernement veut croire, et faire croire, en une croissance comprise entre 2 % et 2, 5 %, alors qu'aucun institut ne prévoit une croissance supérieure à 2 %. Quant aux données initiales relatives au premier trimestre 2006, elles indiquent que la croissance de 0, 5 % est plus faible qu'on ne l'attendait, notamment en raison de la décroissance des investissements des entreprises.

Symptôme et conséquence de cette faible croissance, la charge de la dette publique représente plus de 40 milliards d'euros, soit 17 % du budget ; c'est le deuxième poste budgétaire après celui de l'Éducation nationale.

Par ailleurs, depuis six mois, la Banque centrale européenne, la BCE, a relevé son taux de base de 0, 75 %, ce qui renchérit le coût du crédit de près d'un tiers.

En quatre ans, le poids de la dette s'est ainsi alourdi de 8 points. Dès lors, l'objectif consistant à diminuer cette dette de 2 points d'ici à la fin de 2007 est peu crédible, sauf à mettre le pays en panne.

Quant à la dette publique financière - État, collectivités locales et sécurité sociale -, que le gouvernement de gauche avait réussi à réduire sensiblement de 1998 à 2001, de 1, 4 %, elle a littéralement explosé - plus de 10 points - depuis l'arrivée de la droite au pouvoir en 2002, pour atteindre les deux tiers du PIB aujourd'hui, soit près de 67 %. Depuis 2003, la France se situe donc hors critères européens en la matière.

Cette dette n'est pas, hélas ! le résultat d'un effort structuré pour accroître notre potentiel de croissance, d'un effort particulier en faveur de l'investissement public, de la recherche ou de l'enseignement supérieur, bref, d'un effort pour préparer l'avenir. En réalité, cette dette est le fruit d'une gestion insuffisamment rigoureuse des dépenses publiques.

Dans ce contexte, la promesse inconsidérée du candidat Chirac en 2002 de « baisser les impôts » a aggravé la situation, car tous les impôts n'ont pas diminué en France depuis quatre ans. Seuls ont baissé l'impôt sur le revenu, l'impôt de solidarité sur la fortune et les impôts relatifs aux donations ou successions, c'est-à-dire uniquement les impôts frappant les ménages dont les revenus et les patrimoines sont les plus élevés.

En revanche, les prélèvements obligatoires, c'est-à-dire les impôts, taxes et cotisations sociales qu'acquittent l'ensemble des Français, et notamment les plus modestes d'entre eux, ont augmenté, aggravant de ce fait les inégalités. Ils ont pesé de façon négative sur la croissance et, partant, sur les précieuses recettes fiscales qui auraient permis de conserver la maîtrise des comptes publics.

Le manque à gagner pour les finances publiques est lourd : environ 25 milliards d'euros pour l'impôt sur le revenu et l'ISF, sur l'ensemble de la législature en cours. Or la réforme de l'impôt sur le revenu votée en 2005 n'est pas financée et elle pèsera sur la législature suivante. Il en résulte que le fameux « engagement national de désendettement » n'est qu'un leurre publicitaire, tout comme la notion de « déficit stabilisant » !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

S'agissant de la détérioration des comptes publics, elle n'est pas due à une dérive de la dépense publique, d'autant que les dépenses de l'État, qui, certes, doivent être maîtrisées, peuvent devenir, par le biais de la consommation induite, le moteur d'un cercle vertueux qui résorbe les déficits.

Il n'y a aucune raison de faire des fonctionnaires des boucs émissaires. La détérioration présente des comptes publics est due, tout simplement, à une accumulation de déficits liés à des erreurs de prévision et de gestion. Le gouvernement qui sortira des urnes en 2007 trouvera un lourd « cadeau » de mesures votées et non financées : 12, 5 milliards d'euros en moyenne par an, soit quelque 62 milliards d'euros sur l'ensemble d'une législature !

Tous les budgets que les gouvernements ont fait voter depuis 2002 ont reposé sur des prévisions de croissance dites « volontaristes », ainsi que sur des baisses d'impôt censées « encourager la croissance et créer de l'emploi ». Ce volontarisme a sa propre logique : il s'agit de définir un taux de croissance, lequel doit justifier les prévisions de recettes, lesquelles doivent couvrir les dépenses dans une proportion suffisante pour ne pas accroître le déficit dans des proportions trop importantes, lequel, enfin, en termes d'affichage, ne doit pas trop aggraver la dette.

Toutefois, jusqu'à présent - et cela n'est guère étonnant -, cette méthode consistant en des baisses d'impôts financées à crédit n'a pas suffi à insuffler à notre économie la vigueur nécessaire. Au contraire, malgré une croissance mondiale très forte, la croissance française reste faible, victime de l'insincérité répétée des prévisions de croissance avancées depuis 2002.

J'en viens aux dépenses, telles qu'elles sont envisagées par le Gouvernement pour 2007.

En ce qui concerne le plan de cohésion sociale, il n'est pas financé. Le coût de ce plan commencera à peser particulièrement à partir de 2007, les crédits qui lui sont destinés devant atteindre 3, 9 milliards d'euros, contre 1, 1 milliard d'euros en 2005.

Pour ce qui est du coût annuel du plan « Solidarité grand âge », lequel est une bonne chose en soi, il va tripler au cours de la prochaine législature. Il coûtera ainsi 3 milliards d'euros supplémentaires par an à l'horizon de 2012. Selon le ministère aux personnes âgées, il sera financé, notamment, par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, qui perçoit les 2 milliards d'euros provenant de la journée de solidarité. Mais cette Caisse n'ayant pas de réserves, le financement des mesures prévues reposera sur l'assurance maladie, dont le déficit est déjà considérable.

Ce plan, utilisé comme un effet d'annonce, et qui tente de tirer les leçons de la faillite de la suppression du statut de jour férié du lundi de Pentecôte, reporte donc à plus tard les mesures nécessaires à son financement.

Le programme « Accès des jeunes à la vie active en entreprise », qui remplace le CPE, élargit aux titulaires d'un contrat d'insertion dans la vie sociale, ou Civis, la possibilité d'accéder au bilan de compétences avec, en cas d'embauche, la faculté d'être suivis pendant un an par un « tuteur ». Ce programme prévoit d'inciter les employeurs à embaucher des jeunes en contrat jeune en entreprise, l'État leur versant une aide mensuelle de 400 euros la première année, et de 200 euros la seconde année.

Le contrat de professionnalisation sera, lui aussi, subventionné par l'État au moyen d'une prime de 200 euros par mois la première année, et de 100 euros la seconde, dès lors que le contrat débouchera sur un contrat à durée indéterminée.

Ce programme devrait coûter 150 millions d'euros en 2006, et 300 millions d'euros en 2007. Or le Gouvernement n'ayant pas prévu son financement, des députés UMP ont dû voter un amendement tendant à préciser que le coût de ce programme devrait être pris en charge par des redéploiements budgétaires et des crédits mis en réserve.

Quant au « contrat de modernisation », qui a été signé avec le secteur des cafés, hôtels et restaurants, nous constatons que, pour des raisons clientélistes - et afin de compenser le fait que les « clients » visés ne cessent de se faire abuser par le président de la République -, le Gouvernement vient d'accorder de nombreuses aides aux professionnels de l'hôtellerie et de la restauration, aux termes du contrat de croissance du 17 mai 2006 passé avec la profession : hausse de l'aide forfaitaire à l'emploi dans le secteur ; aide à la mise aux normes des entreprises du secteur accordée par l'État, qui s'engage à améliorer le système de dotation pour investissement, et qui autorisera la déduction pour les entreprises individuelles de 15 000 euros du revenu au titre d'investissements futurs ; abaissement des charges sociales sur les heures supplémentaires pour les entreprises de moins de vingt salariés ; enfin, un « grand plan tourisme » consistant, notamment, en des actions de promotion de la France à l'étranger.

Nous pouvons légitimement nous interroger sur l'efficacité d'un tel plan. En effet, ces aides ne sont aucunement conditionnées par des engagements des professionnels en termes de créations d'emplois ou de revalorisations salariales, alors que la profession a déjà bénéficié de 1, 5 milliards d'euros de baisses de charges depuis juillet 2004, sans que les salariés en aient profité, puisqu'il n'y a eu de négociations ni sur l'emploi, ni sur la grille des salaires, ni sur les conditions de travail. En outre, ce plan d'aide n'a fait l'objet d'aucun chiffrage.

Le « plan Gazelle » n'est pas davantage chiffré. Il est destiné à accompagner deux mille PME à forte croissance, qui devraient bénéficier plus facilement de financements, d'un accès à des spécialistes et de soutiens d'investisseurs de proximité.

Pour neutraliser les surcoûts liés à cette croissance, la loi de finances pour 2007 devrait prévoir un « nouveau mécanisme de gel de l'impôt sur les sociétés », qui s'appliquerait dès le 1er janvier 2007, afin de « neutraliser toute augmentation de cet impôt durant la période de croissance ».

De plus, les PME en croissance devraient bénéficier d'un décalage de six mois pour payer les cotisations sociales des salariés embauchés.

Le plan de renforcement du capital-risque annoncé par le Président de la République devrait coûter 2 milliards d'euros et se trouver opérationnel dès l'été 2006. Les PME sélectionnées pourraient ainsi accéder plus facilement à des financements et à des conseils de juristes, d'experts comptables et de notaires. Bien sûr, pas plus que les autres, ce dispositif n'a pas fait l'objet d'une évaluation, du moins publique.

En revanche, les dépenses relatives à la fonction publique ont subi une attaque en règle, à travers deux mesures : d'une part, la limitation de la dépense publique, dont le rythme de croissance devra être inférieur d'un point à l'inflation ; d'autre part, la baisse massive du nombre des fonctionnaires.

Le budget pour 2007 prévoit de supprimer 15 000 emplois de fonctionnaires, dont la moitié dans les écoles, les collèges et les lycées.

Pendant ce temps, l'éducation nationale recrutera des assistants d'éducation grâce à des contrats d'une durée de dix mois, qui se termineront donc - c'est certainement un hasard ! - juste après la présidentielle et les législatives. Ces assistants ne semblent pas aujourd'hui faire l'unanimité parmi les enseignants.

Monsieur le ministre, je crois que vous avez fait tout à l'heure une erreur de vocabulaire lorsque vous avez affirmé qu'il n'y aurait pas de suppression de classes d'enfants handicapés. Les enfants dont il s'agit ici ne sont pas handicapés, mais ils ont des problèmes de comportement et ils sont placés dans des classes d'intégration scolaire, les CLIS. (M le ministre délégué, acquiesce.) Je puis vous affirmer que des CLIS ont fermé et le mouvement se poursuit, tout au moins dans mon département ; notre collègue Thierry Foucaud pourra en témoigner également.

En tout cas, je tiens à préciser que ces enfants ne sont pas des handicapés.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur Massion ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

Je vous en prie, monsieur le ministre délégué.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. le ministre délégué, avec l'autorisation de l'orateur.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Monsieur Massion, vous avez tout à fait raison, et il faut préciser ce point. : aucune des décisions d'emplois relatives au budget pour 2007 n'aura d'incidence sur les CLIS, d'une part, et sur le nombre d'enfants par classe, d'autre part ; le ministre de l'éducation nationale a eu l'occasion de le rappeler voilà peu de temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

Monsieur le ministre, s'agissant des CLIS, nous ne pouvons pas être d'accord ! Nous connaissons déjà le nombre de fermetures de CLIS à la rentrée.

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Ces fermetures sont indépendantes du budget du ministère des finances !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

Quoi qu'il en soit, les 15 000 postes de fonctionnaires supprimés devraient entraîner pour l'État un gain de 250 à 300 millions d'euros, au mieux.

De façon plus générale, le Gouvernement a annoncé que la lutte contre la dégradation des comptes publics et la réduction du poids de la dette reposaient sur une évolution à la baisse de la dépense publique.

La dépense publique votée pour 2006 est de 276, 3 milliards d'euros Si elle était indexée sur l'inflation, comme c'est le cas depuis trois ans, elle atteindrait 281, 27 milliards d'euros.

Comme le Gouvernement souhaite qu'elle évolue moins vite que l'évolution des prix, à concurrence d'un point, la dépense publique devrait s'élever à 278, 5 milliards d'euros en 2007. Toutefois, l'économie annuelle ainsi réalisée ne serait que de 2, 75 milliards d'euros, ce qui est peu par rapport aux 13 milliards d'euros de programmes non financés !

Ces économies sans effets significatifs participent d'une politique à courte vue. En effet, la réduction de la dépense publique en période de creux conjoncturel peut avoir des effets récessifs.

L'INSEE vient d'ailleurs d'indiquer que, s'il a révisé à la baisse le taux de croissance de notre pays pour 2005, de 1, 4 % à 1, 2 % du PIB, c'est en raison de la faiblesse de la dépense publique cette même année.

S'agissant à présent des recettes, quand le Gouvernement a voulu mettre en place sa réforme de l'impôt sur le revenu, votée dans la loi de finances de 2006, il a entrepris de réduire cet impôt et de le démanteler en s'attaquant à sa progressivité et, partant, à sa vertu redistributrice.

Or cette réforme, qui entrera en vigueur en 2007, privera l'État de 3, 6 milliards d'euros par an, au détriment de la justice fiscale, mais aussi des comptes publics.

Certes, il y a des gagnants ! Ce sont les contribuables dont les revenus se situent dans les tranches d'imposition les plus hautes. Les 3, 6 milliards d'euros d'allégements bénéficieront pour 70 % aux 20 % des foyers imposables les plus favorisés. Les plus gros gagnants, c'est-à-dire 0, 3 % des ménages, bénéficieront du cinquième du coût total de la réforme.

Les autres gagnants - si l'on peut dire, puisque ce sont souvent les mêmes contribuables que précédemment -, ce sont les titulaires de revenus fonciers qui disposent d'un capital immobilier. En effet, l'intégration de l'abattement de 20 % dans le barème de l'impôt sur le revenu et la suppression de la contribution sur les revenus locatifs font plus que compenser la disparition de la déduction forfaitaire.

Toutefois, il y a aussi des non-gagnants, peut-être même des perdants ! Ce sont les classes moyennes, les vraies : pour elles, le gain est minime, sinon inexistant, car elles ne peuvent profiter « en bas » de l'augmentation de la prime pour l'emploi, ni « en haut » de la réforme du barème de l'impôt sur le revenu. Certains contribuables, et ils sont nombreux, comme ces couples bi-actifs dont chaque membre gagne l'équivalent de 1, 5 SMIC par mois, ne verront aucunement leur situation s'améliorer.

D'un point de vue économique, cette réforme est non seulement inefficace, mais encore contre-productive, car elle n'encourage pas la demande ni, partant, l'investissement. En effet, elle ne fera sentir ses effets qu'en 2007 et ne bénéficiera qu'à des ménages favorisés, qui ne s'en serviront sans doute pas pour consommer et donc relancer la croissance.

Au contraire, le creusement des déficits et l'absence de politique de relance de la croissance ne peuvent qu'entretenir les inquiétudes et les incitations à épargner, du moins chez ceux qui ont la capacité de le faire.

Le plafonnement de la taxe professionnelle à 3, 5 % de la valeur ajoutée, qui aura un coût plus important à partir de 2007, et la suppression de la contribution Delalande représentent d'autres restrictions des moyens publics.

Le Gouvernement a présenté un plan national d'action pour 2006-2010. Destiné à développer l'emploi des séniors, il est censé permettre à la France d'atteindre l'objectif européen d'un taux d'emploi des 55-64 ans de 50 % en 2010, contre 37 % en 2004.

La principale mesure de ce plan est, de façon paradoxale, la suppression progressive, d'ici à 2010, de la contribution Delalande. Cette taxe acquittée par les entreprises qui licencient des salariés de plus de 50 ans a pourtant été instituée par la droite afin d'inciter les entreprises à ne pas se séparer de leurs séniors.

Il est vrai qu'en toute occasion l'important pour les entreprises est de contribuer le moins possible à l'effort financier national, et qu'en l'occurrence elles n'ont aucune intention de jouer le jeu. Au contraire, elles souhaitent profiter de l'aubaine des départs anticipés.

Quoi qu'il en soit, ce plan coûtera 500 millions d'euros par an, dont 10 millions d'euros de dépenses supplémentaires, et surtout 500 millions d'euros de moindres recettes, soit l'équivalent du coût de la suppression de la contribution Delalande dans le budget de l'État à compter de 2010.

En conclusion, en l'état actuel des choses, avec la poursuite de la même politique, l'aggravation des finances publiques est, hélas ! inéluctable.

Les grandes mesures pluriannuelles annoncées récemment ne sont pas financées. La question est renvoyée au-delà des élections de 2007. Le gouvernement qui sera issu des urnes devra alors faire face à un trou de 11 milliards d'euros.

Les déficits publics ont été maintenus en deçà des 3 % du PIB visés en 2005 grâce, principalement, à la soulte d'EDF et à un acompte de l'impôt sur les sociétés, événements exceptionnels qui ne se renouvelleront pas.

Le Gouvernement a augmenté le ratio de la dette de 8 points en quatre ans. Sa diminution ne pourra être que progressive, et des engagements chiffrés optimistes me semblent hasardeux.

En 2005, le Gouvernement a accru les prélèvements obligatoires de 13 milliards d'euros. Afin d'« arranger » un budget plus aisé à exécuter que ne le sera celui de 2007, il a procédé à des manipulations budgétaires qui ont été dénoncés tant par la Cour des comptes que par la Commission européenne.

Ce budget pour 2007 devra donc être corrigé au printemps prochain, sur la base, comme je le soulignais tout à l'heure, des propositions formulées dans le projet des socialistes.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Xavier Bertrand, ministre

Parce qu'il y a un projet socialiste ?

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, en matière de finances publiques et de finances sociales, notre pays est confronté à deux paradoxes.

Le premier concerne la dette. Les Français sont individuellement peu endettés, mais collectivement surendettés.

Le 16 mars dernier, en tant que président de la Délégation du Sénat pour la planification, j'ai eu l'honneur de présenter un rapport sur l'accès des Français au crédit. Ce rapport souligne que l'endettement des ménages a beaucoup augmenté depuis vingt ans et représente aujourd'hui plus de 60 % de leur revenu annuel.

Pourtant, les Français ne sont pas confrontés à une dérive du crédit. Si leur endettement a progressé, le poids des remboursements du capital et des intérêts est resté stable grâce à la baisse des taux et à l'allongement de la durée des prêts. De plus, l'augmentation de la dette brute des ménages ne les a pas empêchés d'améliorer significativement leur situation patrimoniale nette.

Enfin, la France est l'un des pays du monde développé où l'endettement des ménages est le plus faible : la dette par habitant est près de trois fois moins élevée qu'au Danemark, et encore deux fois moindre environ que la moyenne des pays européens.

Dans l'encours des crédits à long terme en Europe, la France occupe une place très modeste, avec 8, 1 %, soit nettement moins que son poids dans le PIB des douze pays concernés, qui est de 17, 6 %. L'OCDE estime même que, parmi les réformes structurelles nécessaires pour que l'Europe surmonte la langueur de son économie, figure un élargissement de l'accès des ménages au crédit.

Le Gouvernement a lui-même soumis au Parlement, qui l'a adopté, un projet de loi l'autorisant à introduire par ordonnances des mécanismes d'hypothèque rechargeable et de viager hypothécaire qui visent à doper la distribution de liquidités aux ménages.

Le paradoxe, c'est que si la France peut encourager un certain endettement individuel pour soutenir la croissance économique, elle doit en même temps tout faire pour stopper la croissance inquiétante de la dette publique. En effet, la dette publique a triplé en proportion de la richesse nationale depuis 25 ans. Elle a atteint un niveau tel qu'elle handicape aujourd'hui notre pays dans la compétition internationale, elle compromet ses chances de redresser les finances publiques et elle met ainsi en cause l'avenir des générations futures.

De ce point de vue, le rapport publié par Michel Pébereau en décembre dernier a été l'occasion d'une véritable prise de conscience nationale.

Il faut également féliciter le Gouvernement pour l'effort de pédagogie qu'il a su réaliser sur un sujet trop longtemps ignoré ou négligé dans notre pays.

Dans son rapport d'information sur le débat d'orientation sur les finances publiques, notre rapporteur général, Philippe Marini, évoque trois bonnes raisons pour réduire le déficit public : tout d'abord, sur 100 euros versés par le contribuable, 15 euros servent à payer la charge de l'État ; ensuite, les générations futures devront déjà payer les retraites ; enfin, il faut restaurer, dès à présent, les marges de manoeuvre de l'État.

Toutefois, nous nous heurtons ici à un second paradoxe, qui est cette fois politique. Alors que presque tout le monde s'accorde aujourd'hui sur la nécessité de réduire l'endettement, certains, à gauche, continuent à prôner des mesures qui auraient exactement l'effet inverse.

Comme l'ont très bien montré MM. les ministres Thierry Breton et Jean-François Copé, la stratégie du parti socialiste renoue avec la facilité financière, à travers toujours plus de dépenses publiques, donc toujours plus de déficit et de dette.

Le projet du parti socialiste est une réédition de son programme de 1981, avec la même philosophie, les mêmes principes doctrinaux, et le refus de prendre en compte les problèmes du jour, les enjeux de demain et le nouveau système monétaire auquel nous avons, ensemble, adhéré.

La renationalisation d'EDF, la généralisation des 35 heures, le recours massif à l'emploi public, à travers la réactivation des emplois-jeunes, et l'embauche massive de fonctionnaires sont autant de mesures inadaptées et de contresens économiques ; nous ne trouvons d'ailleurs aucun équivalent dans les autres pays de l'OCDE.

L'abrogation de la réforme des retraites constituerait un grand bond en arrière. Dans ce domaine, la gauche a oublié d'agir, et c'est un gouvernement de droite qui a eu le courage de mettre en oeuvre une réforme historique et indispensable, pour tenir compte de l'évolution démographique.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Courrière

C'est pour ça que les Français sont si contents ! Regardez les derniers sondages !

Debut de section - Permalien
Jean-François Copé, ministre délégué

Vous vous intéressez aux sondages, maintenant ?

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

On ne peut pas, d'un côté, s'inquiéter de l'ampleur de la dette et, de l'autre, présenter un projet qui coûterait 115 milliards d'euros et ne pourrait être financé que par une augmentation massive des prélèvements obligatoires, déjà très élevés, ou par un triplement du déficit public.

Face à ce double paradoxe financier et politique, le Gouvernement a fait le choix du réalisme et de la responsabilité.

Il est en effet réaliste dans ses prévisions économiques, qui rejoignent d'ailleurs largement celles que nous avons effectuées dans le cadre de la Délégation du Sénat pour la planification.

Avec 0, 54 % au premier trimestre, la croissance annuelle est solidement installée entre 2 % et 2, 5 %, ce qui est l'hypothèse retenue pour l'élaboration du budget de 2006. Malgré la hausse du pétrole, l'inflation reste maîtrisée. Les taux d'intérêts devraient évoluer modérément, et la situation sur le marché de l'emploi continuer à s'améliorer.

De plus, la baisse du chômage est un acquis obtenu ces derniers mois et un signal encourageant pour l'avenir. Il convient d'en féliciter le Gouvernement, même s'il reste dans ce domaine, comme dans d'autres, encore beaucoup de chemin à parcourir.

Réaliste sur le plan économique, le Gouvernement est également responsable sur le plan budgétaire : les engagements en termes de déficit public sont tenus, et le désendettement est amorcé en 2006.

Ce désendettement est au coeur des préoccupations de la commission des finances et des orientations budgétaires annoncées par le Gouvernement. L'objectif fixé par le Premier ministre lors de la Conférence nationale des finances publiques du 11 janvier dernier est le retour des comptes publics à l'équilibre d'ici à 2010, pour ramener le ratio d'endettement sous la barre des 60 % du PIB.

C'est un objectif ambitieux, comme l'a relevé M. le rapporteur général, qui propose pour sa part une stratégie de désendettement à moyen terme. Au-delà des options choisies, il importe que la priorité soit donnée à la réduction des déficits publics et au désendettement.

Les principales orientations définies pour le budget 2007 s'inscrivent dans cette perspective : la progression des dépenses de l'État serait de un point inférieure à l'inflation, soit une baisse en volume après quatre années de « zéro volume ».

Cela ne remettrait pas en cause le financement des grandes priorités fixées depuis 2002 en matière d'emploi, de sécurité, de défense, de justice, d'aide publique au développement, de recherche et d'infrastructures de transport. Le financement des réformes fiscales, dont celles, majeures, de l'impôt sur le revenu et de la taxe professionnelle, serait également assuré en 2007, grâce à la maîtrise des dépenses et à la bonne tenue de la croissance.

Sur les 74 000 départs à la retraite prévus l'année prochaine, 15 000 postes ne seraient pas remplacés. La mise en oeuvre de la LOLF et les conclusions des rapports d'audits ont en effet été mis à profit pour réaliser des gains de productivité - cette expression était peu utilisée jusqu'à présent dans la fonction publique -, moderniser le service public et adapter les effectifs aux besoins réels de l'État. C'est donc tout le contraire d'une politique aveugle de réduction des dépenses et des effectifs ! La LOLF et les audits de modernisation constituent une véritable « opération vérité » sur le fonctionnement de l'État.

À cet égard, le Gouvernement peut compter sur le groupe UMP du Sénat pour le soutenir dans cette démarche inédite et pragmatique. Ce dernier a d'ailleurs mis en place un groupe de travail « LOLF et réforme de l'État », pour examiner les résultats des audits et envisager les suites à leur donner.

Cette « opération vérité » a déjà montré concrètement et précisément qu'il était possible de réduire les dépenses et les effectifs dans certains secteurs, tout en préservant ou, même, en améliorant la qualité du service public, y compris dans l'éducation nationale ; je le dis avec beaucoup d'humilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Je terminerai mon intervention en évoquant la sécurité sociale et les collectivités locales, que le Gouvernement souhaite placer, aux côtés de l'État, au coeur de sa stratégie de désendettement.

Il convient, tout d'abord, de saluer les réformes courageuses engagées dans le domaine de l'assurance maladie et des retraites. Qualifiées de « premier coup d'arrêt » par M. le rapporteur général, elles traduisent notre volonté commune de parvenir à une réelle maîtrise des comptes sociaux, qui est un enjeu essentiel pour l'avenir de notre modèle social.

Ensuite, le groupe UMP tient à saluer l'engagement du Gouvernement de poursuivre le dialogue avec les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale, dans le cadre, notamment, du Conseil d'orientation des finances publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Nous apprécions sa volonté de ne pas imposer de contraintes nouvelles et de ne pas remettre brusquement et unilatéralement en cause le contrat de croissance et solidarité, qui définit la croissance globale des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales.

Le dialogue doit se poursuivre, dans le respect de l'autonomie des collectivités locales et de la sécurité sociale.

Ce n'est qu'en agissant ensemble que les grands acteurs de la dépense publique pourront parvenir à définir et à mettre en oeuvre cette stratégie de désendettement que nous appelons de nos voeux, dans l'intérêt supérieur de notre pays et des générations futures.

Messieurs les ministres, c'est dans cet esprit constructif que le groupe UMP abordera la prochaine discussion budgétaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Christian Poncelet.