Intervention de Roland Courteau

Réunion du 29 juin 2006 à 21h30
Vins à appellation d'origine contrôlée — Adoption définitive d'une proposition de loi

Photo de Roland CourteauRoland Courteau :

Dans le contexte de crise viticole sans précédent que nous connaissons, vous m'avez très souvent entendu insister, monsieur le ministre, sur l'absolue nécessité de permettre à de nombreux viticulteurs de passer un cap extrêmement difficile, faute de quoi des pans entiers de ce secteur d'activité disparaîtront.

Or, vous le savez, la situation se détériore de jour en jour. Cette situation, dans un contexte certes différent, ressemble fort à la période qui avait précédé les événements tragiques de 1907, une année qui a marqué à jamais le midi de la France.

Nous allons d'ailleurs commémorer cette révolte des vignerons l'an prochain, et je ne vous cache pas que nous allons le faire avec une certaine appréhension, tant la situation est grave. Force est de le constater, un siècle après, les vignerons éprouvent toujours, en Languedoc-Roussillon notamment, le même sentiment d'abandon.

Quel avenir les pouvoirs publics entendent-ils réserver à la première région viticole du monde ? Le pessimisme règne, monsieur le ministre. La présente proposition de loi, selon son exposé des motifs, « offre donc la possibilité de fixer par un arrêté conjoint des ministres chargés de l'agriculture, de l'économie et de la consommation, des seuils de rendements adaptés, permettant le cas échéant de compenser un engagement insuffisant dans la campagne de distillation volontaire. » Cette possibilité est offerte à titre exceptionnel et après consultation pour avis de l'INAO.

Je comprends les intentions des auteurs de cette proposition de loi. Il s'agit de permettre au Gouvernement de baisser les rendements autorisés pour les AOC qui, dans certaines régions, ne participent pas, ou trop peu, aux mesures d'assainissement du marché et qui espèrent que les efforts de distillation seront accomplis par d'autres. Étrange comportement, en effet !

Mais, en marge de nos travaux en cette fin de session, à quelques mois des prochaines vendanges, on me permettra de faire quelques remarques d'ordre général.

La première est bien plus qu'une remarque de forme. Cessons, comme j'ai pu le lire et même l'entendre, de qualifier certaines catégories de vins « vins de qualité », ce qui tendrait à dire que les vins de pays et les vins de tables ne seraient pas, eux, de qualité... Je puis vous assurer que nous avons aussi des vins de pays de très grande qualité.

Ma deuxième remarque est pour regretter que les instances européennes aient décidé de refuser un volume de distillation plus important et à des prix plus rémunérateurs. Vous avez été précis, monsieur le ministre, et j'ai bien noté votre réaction.

Pour cette raison, je crains que cette mesure d'assainissement n'ait pas de véritable effet sur le marché. De surcroît, elle arrive bien tard, pour ne pas dire trop tard. Encore une occasion manquée, serais-je tenté d'ajouter, et toujours cette lente mais régulière dégradation du marché...

Va-t-on continuer à laisser à la crise le soin de faire le sale travail, c'est-à-dire de tirer un trait sur des zones viticoles entières ? C'est une vraie question.

Ce que nous attendons de l'État en urgence, vous le savez, monsieur le ministre, ce sont d'abord des mesures conjoncturelles autrement plus conséquentes que celles que vous avez annoncées. Je vous ai dit voilà deux mois, ici même, que des exploitations, en nombre particulièrement important, perdaient en moyenne entre 600 euros et 1 000 euros par hectare, alors que les aides que vous proposiez ne s'élevaient, en moyenne, qu'à 1 000 euros par exploitation.

Il vous faut - j'y insiste, monsieur le ministre - revoir l'ensemble des mesures conjoncturelles et mettre en place un véritable soutien social, faute de quoi, je le répète, des pans entiers de l'économie vitivinicole vont disparaître, entraînant d'innombrables drames humains.

Par ailleurs, pourquoi le Gouvernement n'a-t-il pas donné suite aux récentes décisions de l'Union européenne qui permettent de porter le montant annuel des préretraites jusqu'à 18 000 euros par an, avec un cofinancement de 50 % ?

Dans mon département, 34 % des viticulteurs ont plus de cinquante-cinq ans. C'est, à mon avis, encore une occasion manquée !

En avril dernier, lors du débat sur la situation viticole, concernant la prochaine réforme de l'OCM-vin, j'avais mis en avant les lignes de force qui nous paraissaient être fondamentales, je n'y reviens donc pas.

Mais quel choc avons-nous ressenti en prenant connaissance des orientations annoncées par la Commission européenne sur cette réforme de l'OCM vitivinicole ! C'est, comme vous l'avez vous-même souligné voilà quelques instants, monsieur le ministre, une véritable provocation !

Nous sommes là, ni plus ni moins, dans l'inacceptable ! Le plan d'arrachage de 400 000 hectares qui est proposé est inacceptable, d'autant que nous savons quelle région en pâtira le plus en France !

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