Intervention de Roland Courteau

Réunion du 29 juin 2006 à 21h30
Vins à appellation d'origine contrôlée — Adoption définitive d'une proposition de loi

Photo de Roland CourteauRoland Courteau :

Faut-il rappeler que, par le passé, près de 120 000 hectares ont déjà été voués à l'arrachage en Languedoc-Roussillon ?

En réalité, cela ressemble fort à un plan de liquidation de la viticulture. En fait d'arrachage, nous aurions apprécié que l'on réglât le problème des 150 000 hectares plantés illicitement en Espagne, en Italie, en Grèce et peut-être même en France...

Bref, les orientations de la Commission ressemblent à une sorte de dépeçage : suppression des outils de régulation du marché, donc des distillations ; réduction des financements ; volonté de lever l'interdiction de vinifier des moûts importés des pays tiers et de mélanger les vins communautaires. Sur ce dernier point, d'ailleurs, craignons certaines tentations de fraudes et de trafics !

Le Gouvernement se doit donc de refuser l'inacceptable et il est impératif que le secteur du vin bénéficie d'une politique vitivinicole européenne et française autrement plus positive et ambitieuse que celle dont nous sommes actuellement dotés.

Toujours dans le domaine communautaire, je me permettrai une parenthèse : comment expliquer, monsieur le ministre, que des produits phytosanitaires soient interdits en France mais autorisés en Espagne ? Si vous me répondez que c'est pour des raisons de santé publique, comment expliquez-vous que l'on importe des vins espagnols issus de vignobles ayant bénéficié de traitements phytosanitaires considérés, en France, comme dangereux pour la santé ? Dans ce cas, n'y a-t-il pas lieu de contrôler la qualité des vins d'Espagne que nous importons ? Je souhaiterais connaître votre sentiment sur ce point, monsieur le ministre.

J'en viens à deux préoccupations essentielles - et ce n'est pas la première fois que vous m'entendez les évoquer, car elles touchent aux causes mêmes de la crise : la baisse de la consommation en France et la baisse de nos exportations.

Sur ce dernier point, je l'ai déjà dit, les aides à la promotion et à l'exportation sont insuffisantes comparées à celles consenties par l'Espagne, 49 millions d'euros, par l'Australie, 75 millions d'euros, ou même par le conseil régional du Languedoc-Roussillon, 12 millions d'euros.

Concernant le premier point, je ne peux que déplorer l'entreprise de diabolisation dont le vin est la cible. Peut-être faut-il chercher là l'une des raisons de la baisse régulière de la consommation, qui est, vous l'avez souligné, monsieur le rapporteur, de l'ordre de 750 000 hectolitres par an ? Peut-être faut-il chercher là l'une des explications au changement de comportement alimentaire des jeunes, qui ont tendance, comme vous le soulignez également justement, monsieur le rapporteur, à délaisser le vin au profit d'autres alcools, souvent plus forts ?

Inlassablement, je rappellerai l'article L. 3311-3 du code de la santé publique, qui interdit, dans le cadre des campagnes de prévention, toute discrimination entre les différentes boissons.

Par ailleurs, comment espérer convaincre les populations de l'Europe du Nord, où la consommation s'accroît régulièrement, de consommer nos vins français, alors que la plupart des campagnes de prévention, au demeurant fort légitimes, stigmatisent régulièrement le vin, et uniquement le vin ?

Dernière provocation, monsieur le ministre : le sujet soumis aux candidats à un baccalauréat agricole, dans lequel l'on demandait aux élèves de traiter une question portant sur « les dangers du vin » ! Notez au passage que, une fois de plus, on n'évoque pas les alcools durs, ni la bière ou d'autres boissons industrielles, ni même l'alcool en général...

Quelles sont vos réactions, monsieur le ministre, par rapport à cet acte provocateur - car je ne crois pas à une simple erreur - qui reflète bien la pensée dominante de certains milieux ?

Je voudrais évoquer un ultime point, monsieur le ministre. Il semblerait que, dans certaines casernes de régions viticoles, l'on consomme du vin, du vin certes, mais provenant d'Espagne ! Convenons que, dans le contexte de crise que nous connaissons, une telle information est particulièrement choquante. Je vais donc m'employer à la vérifier, mais je serais intéressé de connaître votre sentiment.

Comme nous pouvons le constater, la crise viticole que nous subissons est d'une très grande ampleur. Alors, bien au-delà de la présente proposition de loi, je crois devoir le rappeler encore une fois, l'urgence commande de mettre en oeuvre, d'abord, un véritable soutien social aux viticulteurs en difficulté, puis une politique viticole digne de ce nom !

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