Intervention de Serge Lepeltier

Réunion du 5 avril 2005 à 21h45
Eau et milieux aquatiques — Articles additionnels avant l'article 1er

Serge Lepeltier, ministre :

Madame la sénatrice, cet amendement soulève une vraie question, qui mérite effectivement d'être débattue. Vous avez d'ailleurs évoqué une lettre par laquelle j'avais répondu au président de la région Alsace et au président de la région Bretagne.

L'objet de votre amendement est de prévoir la possibilité d'expérimenter, en quelque sorte, la gestion de l'eau par les régions.

Cependant, la France a fait en 1964 un choix dont nous ne pouvons que nous louer, celui d'une gestion de l'eau par bassin versant. Ce choix a été repris par la directive-cadre sur l'eau, et je constate que ce choix se généralise progressivement à l'ensemble de l'Europe.

Si l'on peut effectivement concevoir, pour certaines régions, une cohérence entre le territoire régional et la logique de bassin - on songe naturellement à l'Alsace -, cette cohérence est difficile à trouver pour les grands fleuves couvrant le territoire de plusieurs régions. Vous avez évoqué le cas de la Bretagne : cette région est couverte par le bassin Loire-Bretagne, mais la Loire intéresse également beaucoup d'autres régions.

Par ailleurs, aux termes de la loi organique du 1er août 2003, les expérimentations qui peuvent être menées doivent être susceptibles d'être étendues, si elles ont réussi, à tout le territoire. Cela signifie qu'une nouvelle compétence régionale en matière de gestion de l'eau ne pourrait faire l'objet d'une expérimentation que s'il était envisageable, le cas échéant, de l'étendre à l'ensemble des régions françaises. Or c'est là que se situe le problème : les bassins hydrographiques dépassent largement les territoires des régions.

Ce que vous proposez pourrait sans doute s'appliquer en Alsace. En Bretagne, ce serait déjà beaucoup plus difficile, à moins de faire sortir, en quelque sorte, la Loire de la Bretagne, ce qui poserait peut-être un problème à la Loire-Atlantique...

En tout état de cause, très peu de régions sont susceptibles de se prêter au dispositif que vous avez imaginé. C'est pourquoi il ne me paraît pas possible d'envisager une telle expérimentation.

J'ajoute qu'il s'agit aussi de compétences qui concernent directement l'Etat. Il semble difficile que l'Etat se dessaisisse complètement d'une compétence et d'un contrôle sur la gestion et la protection de l'eau alors qu'il reste, face aux institutions européennes, seul responsable de la bonne application des directives.

Enfin, on peut se demander s'il serait bien pertinent d'ajouter un autre acteur dans la gestion de l'eau, en l'occurrence la région, alors même que, comme le disait le rapporteur, celle-ci exerce déjà des compétences aussi nombreuses qu'importantes. Gardons-nous du risque de créer une confusion entre les différents acteurs de la gestion de l'eau. Mieux vaut aller dans le sens de la clarification, comme nous le proposons avec ce projet de loi.

Telles sont les raisons pour lesquelles j'émets un avis défavorable sur cet amendement, après avoir, croyez-le bien, madame la sénatrice, soigneusement analysé votre proposition.

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