…sans avoir réellement procédé à une évaluation de l’ensemble de celles qui ont été mises en œuvre depuis plusieurs années. Je rappelle, mes chers collègues, que toutes ces mesures ont été mises en place progressivement, l’une après l’autre. À aucun moment n’a été définie une politique incitative globale qui aurait permis que ces mesures aient des effets réels. À chaque loi de financement de la sécurité sociale, nous y allions d’une mesure !
Je pense notamment à une disposition visant à encourager les maisons de santé que j’avais fait adopter par la Haute Assemblée. Ces maisons de santé avaient fait l’objet d’un brillant rapport de la part de notre collègue Jean-Marc Juilhard. À l’époque, le Gouvernement était réservé sur cette disposition et nous avions dû lui forcer la main pour qu’elle figure dans la loi de financement de la sécurité sociale. Les maisons de santé et les maisons médicales ne constituent pas la mesure incitative miraculeuse qui, à elle seule, pourrait régler les problèmes. C’est un ensemble de mesures incitatives qui peut donner des résultats.
Deuxième remarque : nous sommes en train de traiter la question de la même manière pour le stock et pour le flux.
Mme la ministre soulignait hier qu’il fallait jouer la solidarité intergénérationnelle. Mettez-vous à la place d’un jeune étudiant qui, après dix années d’études, découvre qu’il ne pourra pas s’installer librement dans le territoire de son choix parce que de nouvelles mesures contraignantes vont s’imposer à lui. Je comprendrais que l’on puisse appliquer ces mesures sur le flux, mais les appliquer sur le stock, c’est introduire une rupture dans la forme de contrat moral existant entre la société et ces jeunes étudiants. Il devrait y avoir, à mon sens, une prise en considération de ces situations afin que ces jeunes médecins ne considèrent pas qu’ils ont été trompés lorsqu’ils se sont lancés dans leurs études.
Troisième remarque : les médecins internes, auxquels Mme la ministre a fait allusion et dont j’ai reçu personnellement la représentante, m’ont fait valoir que les étudiants n’avaient pas été suffisamment informés sur ces mesures incitatives et qu’il ne fallait pas s’étonner, de ce fait, que celles-ci n’aient pas eu les effets attendus.
Je sais bien que ce projet de loi prévoit des dispositions permettant la meilleure diffusion possible de l’information par le directeur de l’agence régionale de santé afin que ces mesures incitatives prennent leur plein effet. Pourquoi ne pas attendre les résultats avant de mettre en œuvre des mesures plus contraignantes ? À cet égard, la mesure à caractère incitatif proposée par notre collègue Jean-Pierre Sueur aurait pu être prise en considération.
Que font les conseils généraux pour remédier au manque d’assistantes sociales sur leur territoire ? Ils signent des contrats avec des étudiants qui envisagent d’exercer le métier d’assistante sociale et, en contrepartie du financement de leurs études, ces étudiants s’engagent à travailler cinq années dans le département qui a accordé le financement.
N’aurions-nous pas pu imaginer un dispositif de cette nature pour les médecins ? On nous dit que cela coûterait trop cher. A-t-on vraiment pesé les conséquences financières des déserts médicaux au regard du contrecoup que subit l’hôpital public ? Là où il n’y a pas de permanence de soins, nos concitoyens n’ont d’autre choix que de se rendre à l’hôpital de proximité pour se faire soigner. Autrefois, il y avait des dispensaires répartis sur le territoire.
En conclusion, il faut réussir à concilier la liberté d’installation des médecins et la mission de service public que se doivent d’organiser sur l’ensemble du territoire le Gouvernement et la représentation nationale. Plutôt que de contraindre les médecins libéraux, n’est-il pas préférable de veiller à ce que soit assuré, sur l’ensemble du territoire, un service public de proximité et de qualité capable de répondre aux besoins de nos concitoyens ?
Telles sont les raisons que je voulais développer et pour lesquelles je ne voterai pas les amendements identiques présentés par le Gouvernement et par M. Hervé Maurey.