À l’occasion de l’examen de cet article 18, je voudrais revenir sur la suppression, par la commission des affaires sociales, des mesures introduites par l’Assemblée nationale, autorisant ce qu’il est convenu d’appeler des testings, autrement dit, des tests de discrimination.
Notre rapporteur justifie cette suppression en ces termes : «La commission a supprimé la possibilité de recours à la pratique dite de « testing », qui fait peser sur l’ensemble de la profession médicale un soupçon sans fondement au regard de l’engagement quotidien de l’immense majorité des praticiens dans l’exercice de leur profession ». Naturellement, nous ne partageons pas du tout cette analyse !
Nous avions donc décidé de déposer un amendement pour réintroduire cette disposition. Malheureusement, une difficulté technique, résultant des conditions de travail déplorables imposées par le refus de la majorité du Sénat et du Gouvernement de repousser le délai de dépôt des amendements, a rendu impossible le dépôt de cet amendement.
Nous considérons que la pratique du testing, si elle présente des inconvénients, n’est pas de nature à jeter l’opprobre sur une profession.
Accepter de soumettre des professionnels de santé à de tels tests, dés lors que ces professionnels ne pratiquent pas de discriminations interdites, permettrait au contraire de mettre en lumière que l’immense majorité d’entre eux exerce leur art dans le respect de la loi et de la déontologie. Inversement, craindre que cette pratique fasse peser sur l’ensemble de la profession le soupçon, c’est envisager que les résultats pourraient être catastrophiques. Monsieur le rapporteur, nous ne vous connaissions pas une telle défiance à l’égard des médecins, bien au contraire !
En réalité, le soupçon dont vous faites part existe déjà. Il est alimenté par des sources officielles, la DREES ayant publié, en 2004, un document sur le refus de soins opposé aux bénéficiaires de la CMU.
Nous sommes d’autant plus étonnés de cette position, monsieur le rapporteur, que la HALDE pratique aujourd’hui ce type de tests à l’encontre des bailleurs privés ou des employeurs. En poursuivant votre raisonnement, j’en déduis que vous considérez que la HALDE fait peser la suspicion sur l’ensemble des propriétaires et des employeurs de notre pays. Si tel est le cas, je m’étonne que le Gouvernement n’ait pas officiellement protesté contre l’attitude de la HALDE.
Aussi, madame la ministre, vous comprendrez que je vous demande de préciser l’opinion du Gouvernement sur les pratiques de testing, dans le domaine médical et de manière plus générale, notamment s’agissant des opérations menées par la HALDE.
Mes chers collègues, je regrette d’autant plus la suppression des mesures introduites par l’Assemblée nationale que le CISS vient de communiquer les résultats de l’enquête qu’il a menée. Je ne reviendrai pas sur ces résultats, Jean Desessard les ayant rappelés. Je préciserai néanmoins que, sur les 466 spécialistes testés, 22 %, et non 21 %, d’entre eux refusaient clairement de recevoir les patients bénéficiaires de la CMU. Ce taux est important et semble croître d’année en année, proportionnellement à l’importance du revenu et de la richesse des habitants de la ville dans lequel le cabinet est implanté. Pour autant, ces pratiques concernent une minorité de médecins, minorité qui n’est tout de même pas marginale.
Bien sûr, les réactions ne se sont pas fait attendre. À peine réalisé, ce testing était déjà dénoncé par le président de la Confédération des syndicats médicaux français, qui déclarait : «la légalisation du testing est le signe d’un acharnement sans précédents contre les médecins ».