Mes chers collègues, afin de vous éclairer sur la position du groupe socialiste, permettez-moi de vous rappeler la petite histoire de la prime transport.
Croyant avoir trouvé une solution miracle aux problèmes de pouvoir d’achat des Français, le Gouvernement avait créé un chèque-transport, inscrit dans la loi du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié et portant diverses dispositions d’ordre économique et social.
Malgré les avertissements des professionnels du secteur et des représentants des collectivités locales, le Gouvernement avait choisi de calquer ce dispositif sur celui du chèque-restaurant, dispositif tout à fait inadapté au secteur des transports, tant publics qu’individuels.
Dans un rapport de juillet 2007 sur la coordination du travail interministériel, le Conseil d’État et l’inspection générale des finances avaient dénoncé, au sujet du chèque-transport, des « procédures et dysfonctionnements accablants, une absence totale de concertation et d’étude des impacts de la mesure ». Pourtant, le Gouvernement n’hésitait pas alors à consacrer plus de 15 millions d’euros par an à sa mise en place !
Fort heureusement, le projet de loi de finances pour 2009 a prévu de supprimer cette dépense.
Lors de l’annonce, par le Premier ministre, en septembre 2007, de la suppression du chèque-transport, nous ne pensions pas que tant de temps serait nécessaire au Gouvernement et à la majorité pour rectifier le tir. C’est pourquoi le groupe socialiste a entrepris de défendre, chaque fois que c’était possible, le chèque-transport sur la feuille de paie, cette « prime » dont on parle tant aujourd’hui.
Nous avons défendu cette proposition au cours de l’examen de la loi TEPA, de la loi de finances rectificative pour 2007, de la loi de finances pour 2008, de la loi du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, dite « loi Chatel », et même lors de la ratification de l’ordonnance du 12 mars 2007 relative au code du travail.
Cette proposition figure d’ailleurs à l’article 9 de notre proposition de loi en faveur du pouvoir d’achat, déposée le 6 décembre 2007.
De longue date, nous faisons le constat que, dans leurs déplacements, les actifs font face à une grande injustice et que les charges de transport des ménages augmentent d’une manière de plus en plus insupportable. Les Français consacrent en moyenne 12 % de leur budget aux dépenses liées à l’automobile. Pour la plupart d’entre eux, ce sont des dépenses contraintes, qui s’ajoutent aux dépenses relatives au logement et au chauffage, lesquelles représentent le plus souvent près du tiers du budget familial.
Il faut croire que notre insistance paie. Vous nous proposez aujourd’hui une solution, certes édulcorée, mais tout de même « fille » de la proposition que nous avions faite : extension du dispositif francilien de remboursement des frais de transport en commun au reste du territoire et remboursement facultatif pour les usagers de la voiture personnelle.
Sans doute, après avoir fait vos comptes, en avez-vous conclu que cela ne vous coûterait pas grand-chose… Vous mettrez sans doute cette remarque sur le compte de mon mauvais esprit !
Alors, monsieur le ministre, nous sommes évidemment favorables à votre proposition, mais elle est encore en retard d’un train, si j’ose dire. Elle vise à mettre en place un dispositif facultatif pour les salariés qui utilisent leur véhicule personnel. Or nous savons tous que les dispositifs facultatifs sont inefficaces. Le chèque-transport était facultatif et c’est en partie pour cette raison qu’il n’a pas fonctionné ! Pourtant, les utilisateurs de véhicules personnels sont souvent les plus fragiles des ménages, ceux qui doivent partir au loin pour trouver des logements abordables.
Nous ne pouvons pas nous satisfaire de cette demi-mesure.
Votre solution méconnaît en outre le développement des déplacements « doux » : usage du vélo, qui progresse partout dans les villes, covoiturage ou systèmes d’abonnement aux voitures en libre-service. Élargir le dispositif à ces modes doux aurait le mérite de soutenir le développement des services urbains de demain.
Vous l’aurez compris, afin de vous épargner un nouvel échec, l’opposition a soutenu des amendements propres à rendre votre idée réellement efficace et juste. Hélas ! vous les avez rejetés, à une exception près. Par conséquent, nous nous abstiendrons sur cet article.