Intervention de Annie David

Réunion du 17 novembre 2008 à 15h00
Financement de la sécurité sociale pour 2009 — Article 65

Photo de Annie DavidAnnie David :

Nous en sommes arrivés aux dispositions relatives aux dépenses d’accidents du travail et de maladies professionnelles et, dans la défense de notre amendement, je veux, à la suite de Jean-Pierre Godefroy, insérer une protestation contre l’application qui est faite de l’article 40 de la Constitution.

En effet, cette section 3 a appelé de notre part un grand nombre d’amendements, qui tous ont été rejetés au motif qu’ils créaient des dépenses supplémentaires pour l’État !

Évidemment, ces amendements avaient pour objectif commun de permettre une prise en charge intégrale des dépenses de santé et des aides techniques dues à une maladie professionnelle ou à un accident du travail, qu’il s’agisse de la réparation après l’événement ou du remplacement indispensable des appareils.

Et si un nombre important de nos amendements allaient dans ce sens, c’est bien parce qu’il y a aujourd'hui une réalité inacceptable à laquelle nous souhaitions apporter une réponse de justice : le ou la salariée victime d’un accident ou atteint d’une maladie professionnelle pouvant résulter de l’inobservation par l’employeur d’une règle impérative de sécurité doit contribuer de sa poche aux soins qui en résultent !

Nous devons cette situation dérogatoire au droit commun à deux lois, l’une, d’avril 1898, sur les accidents du travail, l’autre d’octobre 1919, sur les maladies professionnelles, qui introduisent une responsabilité sans faute.

Ainsi, l’employeur échappe à la réparation intégrale au profit d’une réparation forfaitaire, la loi reconnaissant donc comme « légitime » le fait que le salarié et la société dans son ensemble aient à payer le prix des accidents et des maladies d’origine professionnelle.

Cette « légitimité », si tant est que l’on puisse l’appeler ainsi, est confirmée par l’existence d’une sous-déclaration et d’une sous-reconnaissance chroniques de ces symptômes, lesquelles ont pour conséquence de faire supporter au régime général une partie des dépenses qui devrait logiquement être prise en charge par la branche AT-MP.

Un rapport officiel, rédigé par une commission d’experts et remis à la fin du mois d’août à la direction de la sécurité sociale, évoque même un phénomène qui, s’il n’est pas récent, est « nouveau dans son ampleur apparente » !

Ainsi, des employeurs sont prêts à prendre en charge tout ou partie des frais liés aux soins sans signaler, bien sûr, à la caisse primaire d’assurance maladie que « l’incident » est d’origine professionnelle, alors qu’ils sont tenus de le faire. Par ailleurs, les « pressions » sur les salariés sont monnaies courantes, en particulier dans certains secteurs industriels, et nous connaissons toutes et tous ici ces réalités.

Se pose la question de savoir pourquoi un tel phénomène est si répandu dans l’industrie. Serait-ce parce que le taux de certaines cotisations augmente avec le nombre d’accidents ou parce que ces entreprises, peu soucieuses de la santé de leurs salariés, cherchent à sauvegarder leur image de marque ?

En tout état de cause, il nous faut réinviter tout notre système de protection sociale en la matière, et l’on peut légitiment considérer que la dispense faite au salarié de prouver la faute de l’employeur ne peut justifier à elle seule la réparation forfaitaire. Ce système d’allégement de la charge de la preuve n’est qu’une juste compensation pour les salariés en raison même du lien de subordination qui les unit à l’employeur.

Il faudra bien un jour que nous en discutions plus longuement, et j’émets le souhait, monsieur le président de la commission des affaires sociales, que nous puissions avoir un débat sur les accidents du travail et les maladies professionnelles à l’image de celui que nous avons eu sur l’hôpital dans le cadre de ce PLFSS.

Dans l’attente d’un tel débat, qui permettrait, je l’espère, d’établir une situation plus équitable pour les victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles, à qui il faudrait d’octroyer les mêmes droits qu’à toutes les autres victimes de dommages corporels en France, lesquelles bénéficient d’une prise en charge totale des frais de santé et autres aides techniques, je vous invite, mes chers collègues, à voter en faveur de cet amendement qui se limite, du fait de l’application stricte de l’article 40 de la Constitution, à la rédaction d’un rapport sur l’opportunité d’aller jusqu’à la prise en charge intégrale de ces sinistres.

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