Intervention de Philippe Marini

Réunion du 17 décembre 2004 à 15h00
Loi de finances rectificative pour 2004 — Article 32

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur général :

Il s'agit d'un sujet de droit très complexe, qui a fait l'objet d'une amicale controverse à l'Assemblée nationale entre la commission des finances, par la voix de son rapporteur général Gilles Carrez, et le ministre ici présent.

Rappelons ce dont il s'agit. L'article 44 septies du code général des impôts prévoyait un régime d'aide à la reprise d'entreprises en difficulté. La Commission européenne, alertée, a demandé une enquête et a considéré que ce régime devait être classé dans les aides d'Etat. Elle a pris une décision en ce sens en date du 16 décembre 2003. Depuis lors, pour ne pas laisser les entreprises bénéficiaires de ce régime dans le vide, pour assurer une continuité, le Gouvernement a tenté d'en définir un nouveau.

Le nouveau régime ne peut pas être aussi avantageux que l'ancien, car il entre dans la limite - nous en avons parlé à plusieurs reprises - du règlement communautaire de minimis : l'aide est plafonnée à 100 000 euros sur trois ans, sauf à ce que l'entreprise soit située dans une zone spécialement aidée, notamment au titre de l'aménagement du territoire, ou à ce qu'il s'agisse de petites et moyennes entreprises.

La question est de savoir quelle est la date d'effet du nouveau régime.

Elle est aussi de savoir quel est le sort des entreprises qui ont reçu des aides et auxquelles la Commission demande le reversement. Sur ce point, monsieur le ministre, il serait sans doute utile que vous nous apportiez, si vous le vouliez bien, quelques précisions complémentaires.

Le rapporteur général de l'Assemblée nationale, M. Carrez, a estimé que le nouveau régime qu'institue l'article dont nous sommes en train de débattre devait s'appliquer à compter du 4 mars 2004 parce c'est à cette date qu'a été publié le Journal officiel de l'Union européenne qui contient la décision de la Commission et que, selon les principes du droit français - or nous sommes encore en France -, une décision n'est opposable qu'à partir du moment où elle est publiée et portée à la connaissance du redevable de l'impôt.

C'est la raison pour laquelle l'Assemblée nationale a retenu la date du 4 mars 2004, ce qui signifie implicitement à mon sens que la décision de la Commission n'a pas à s'appliquer avant le 4 mars 2004.

La conception de l'Assemblée nationale est donc la suivante : application de l'ancien régime jusqu'au 4 mars 2004 et, à partir du 4 mars 2004, rétroactivement, application du nouveau régime fixé par le présent projet de loi de finances rectificative.

Le Gouvernement considère, lui, et il vient de nous le répéter à l'instant même, que la date du 4 mars 2004 n'est pas la bonne et qu'il faut retenir la date de la décision de la Commission, même si celle-ci n'a pas été portée à la connaissance des redevables.

Cette position nous choque comme elle choque les juristes français. Mais, bon ! le droit européen s'apparente parfois à un sabir assez étonnant et, en l'espèce, il ne reconnaît pas ce principe de publication ou de promulgation qui est une donnée intangible dans les raisonnements des publicistes français.

Monsieur le ministre, quel sort attend les entreprises qui ont bénéficié d'aides publiques au titre de l'article 44 septies du code général des impôts avant la date du 4 mars 2004 ? Sont-elles susceptibles de se voir réclamer le reversement de ces aides ? Quelle est la situation en droit ?

S'agissant de la période postérieure au 4 mars 2004, nous pouvons penser que c'est le régime qui est défini par le présent article qui s'appliquera, mais il faut savoir que ce nouveau régime sera, dans bien des cas, moins avantageux que l'ancien.

Cela étant, c'est une question de droit et, monsieur le ministre, nous ne pouvons pas ne pas prendre en compte votre argumentation. Vous nous dites que vous avez fait faire toutes les vérifications nécessaires. Sachant que vous avez les moyens de vous entourer des meilleurs avis, ...

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