Je ferai deux remarques sur l'article 8.
Tout d'abord, personne n'est dupe. Le rappel à l'ordre est destiné essentiellement aux mineurs, tant la philosophie de ce texte est axée sur la délinquance de ces derniers. C'est si vrai que, dans l'exposé des motifs du projet de loi, pour décrire les dispositions de l'article 8, il n'est fait référence qu'aux mineurs, alors que le texte a une vocation générale. C'est d'ailleurs au début de l'exposé des motifs que nous trouvons le fondement d'un tel article : « Il convient d'apprendre aux enfants, dès le plus jeune âge, pourquoi il existe des règles indispensables à la vie en société et pourquoi il est impératif de les respecter. »
L'article 8 est très moralisateur. Non seulement il donne au maire un rôle de père fouettard peu approprié, mais encore il peut placer ce dernier dans une situation délicate au regard de la loi ou encore de la pression de la population de sa commune.
Par ailleurs, cet article organise une confusion des pouvoirs entre l'autorité judiciaire et l'autorité municipale. Ce rappel à l'ordre ressemble étrangement au rappel à la loi que peut prononcer le procureur. Cette nouvelle prérogative empiète donc sur les pouvoirs de l'autorité judiciaire et ce n'est malheureusement pas la première fois que cela se produit.
En effet, à l'article 51 de la loi sur l'égalité des chances, il est inséré dans le code pénal un article 44-1, qui précise entre autres que : « le maire peut, tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement, proposer au contrevenant une transaction consistant en la réparation de ce préjudice. » Mais le maire a-t-il vraiment vocation à se transformer en délégué du procureur ? La question mérite d'être posée au regard des multiples dispositions allant dans ce sens.
Un autre argument a toute son importance : ce n'est pas la même chose que de se faire rappeler à l'ordre dans le bureau du maire ou dans le bureau du procureur. Il existe une certaine solennité à se trouver face à un magistrat. Le rappel à l'ordre qui est prévu dans le texte n'aura pas ce caractère solennel. De plus, il tend même, me semble-t-il, à discréditer l'action de la justice.
Je suis d'accord avec le président de la commission des lois, M. Hyest : veillons à ce que le maire ne devienne pas le premier maillon de la chaîne judiciaire. Sans faire une montagne de cet article 8 - là n'est pas la question -, il me semble que, une fois encore, l'État se désengage de ses responsabilités régaliennes à l'échelon local, responsabilités qui vont, en l'occurrence, reposer sur le maire.
Telles sont les raisons pour lesquelles, logiquement, nous demandons la suppression de cet article.