Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme vous vous en doutez, je m’apprêtais à interpeller le Gouvernement sur la question du coupage du vin blanc et du vin rouge pour fabriquer du vin rosé, qui était sur le point d’être autorisé par la Commission européenne. C’est donc avec une grande satisfaction que j’ai appris, lundi 8 juin, que celle-ci y renonçait.
Il est inutile d’insister sur le tollé que ce projet avait provoqué auprès des producteurs de vin rosé, des professionnels de la filière, des élus concernés et aussi de la population, qui le considéraient comme dangereux tant pour les professions viticoles que pour les valeurs de nos terroirs et notre identité. Selon un sondage IFOP publié dans Sud Ouest et Midi Libre, 87% des Français y étaient ainsi opposés.
Nous savons que c’est grâce à ces vins rosés, élaborés selon un mode de macération spécifique, que la France occupe la place de premier producteur mondial de vin rosé de qualité, cette production représentant dans notre pays 15 000 emplois directs et 70 0000 emplois indirects.
Grâce à une mobilisation sans faille et à l’implication admirable de Michel Barnier, ministre de l’agriculture et de la pêche, le dialogue engagé depuis plusieurs mois avec Mariann Fischer Boel, commissaire européen en charge de l’agriculture et du développement rural, a porté ses fruits, et je m’en réjouis.
Le Sénat a également joué un rôle de premier ordre dans ce combat, avec la mobilisation des sénateurs concernés et l’adoption, par la commission des affaires économiques, d’une proposition de résolution européenne sur le sujet.
J’ajoute que les producteurs du Languedoc-Roussillon, qui avaient déployé, ces dernières années, des efforts constants en matière de qualité et de saveur de leur produit, notamment eu égard aux règles entourant les appellations contrôlées, sont particulièrement soulagés du maintien de l’interdiction du coupage. La levée de celle-ci aurait été vécue comme une profonde injustice.
La décision de la Commission européenne est donc une excellente nouvelle. Au lendemain des élections européennes, cela prouve aussi que l’Europe sait écouter et protéger le savoir-faire des vignerons. Je reprendrai à mon compte les propos du ministre de l’agriculture italien : « La tradition l’a emporté ! C’est cette Europe que nous voulons, celle qui est fondée sur le respect de l’identité, de la sécurité alimentaire et de la tradition ».
Cependant, la plus grande vigilance doit rester de mise. À cet égard, il me semble utile d’obtenir des précisions sur le maintien de l’interdiction du coupage. Monsieur le secrétaire d’État, dispose-t-on de garanties sur le caractère total et irrévocable de cette interdiction ?
Vous n’êtes pas sans savoir que la composition de la Commission sera modifiée à l’automne prochain. II est donc utile de connaître les raisons de fond qui ont motivé le revirement de la Commission européenne, que j’applaudis une nouvelle fois, ainsi que la perspicacité du Gouvernement et du Parlement français.
Comme mon collègue Gérard César, j’ajouterai, pour terminer, qu’il faut rester extrêmement vigilant sur la négociation du volet agricole de l’OMC.