Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 19 novembre 2010 à 14h30
Loi de finances pour 2011 — Articles additionnels après l'article 3

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Voilà un moment important. Le grand soir fiscal promis par le Président de la République et la majorité pour le mois de juin prochain, ou en tout cas avant l’été, ne saurait être remis à plus tard, alors que nous pouvons agir dès aujourd’hui.

Notre proposition est fondamentalement différente de celles qui nous sont régulièrement faites par MM. Marini et Arthuis avec leur fameuse trilogie.

Pour nous, je l’ai indiqué lors de la discussion générale, la suppression du bouclier fiscal n’est pas une monnaie d’échange, ni une contrepartie à l’ISF ; c’est un préalable à toute réforme fiscale de fond.

Même si je vous suis sur votre terrain et si je prends en compte, pour la combattre, l’argumentation que vous développez, votre trilogie ne fonctionne pas car, en refusant de vous attaquer aux revenus du capital et même au capital, vous savez très bien que vous êtes loin du compte !

Il faut, dites-vous, augmenter la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu. Faites une grande réforme de l’impôt sur le revenu, affichez les taux réels et appliquez l’effort contributif à toutes les tranches, et particulièrement à celles du haut ; vous avez largement de quoi faire ! Mais comme vous ne voulez pas vous attaquer au prélèvement libératoire, proportionnel et non progressif, vos marges de manœuvre sont bien évidemment très limitées. Aucun des subterfuges que vous pourrez trouver ne permettra jamais de combler ce que représente l’impôt sur la fortune. Par conséquent, même en vous suivant sur votre terrain, je peux être d’autant moins d’accord avec vous que vous mélangez patrimoine et revenu du travail. Vous « larguez » une recette de 4, 1 milliards d’euros pour l’année écoulée contre un produit dont le coût devrait être de 665 millions d’euros. Le compte n’y est pas !

Je voudrais également revenir sur vos justifications d’un bouclier fiscal à 50 % dans le cadre de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, appellation fallacieuse d’encouragement au travail, car on a vu ce qu’il en était...

Tous les chiffres de 2008 et de 2009 le montrent, il faut avoir un patrimoine très important, de 15 millions d’euros, pour bénéficier de l’effet maximal du bouclier fiscal. Cela signifie que vous n’encouragez absolument pas le travail. Vous favorisez la rente et la thésaurisation. Mieux vaut être rentier, y compris rentier retraité, que créateur d’entreprise. Alors ne venez pas nous faire la leçon par rapport à vos objectifs de 2007 !

De plus, vous avez justifié le bouclier fiscal en disant que, dans un contexte de compétition internationale, cette mesure empêcherait les départs – ce qui n’a pas été constaté – et favoriserait les retours. Mais le petit mouvement de retour qui a eu lieu en 2008 était dû à l’effet de la crise plutôt qu’au bouclier fiscal ! Par conséquent, même sur l’argumentation liée à l’efficacité, vous n’êtes pas au rendez-vous.

Pour toutes ces raisons, permettez que l’on supprime le bouclier fiscal dès aujourd’hui.

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