Intervention de Marie-France Beaufils

Réunion du 19 novembre 2010 à 14h30
Loi de finances pour 2011 — Article 5

Photo de Marie-France BeaufilsMarie-France Beaufils :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la série de mesures relatives à la fiscalité du patrimoine pose la question suivante : quels sont ceux qui seront épargnés, ou quelles seront les victimes du surcroît d'imposition découlant de ces dispositions ? En quelques mots, s'attaque-t-on réellement, avec le présent projet de loi de finances, à l'inégalité de traitement devant l'impôt, qui s’exerce au détriment des revenus d'activité et au profit des revenus financiers ?

Mes chers collègues, concernant la loi de finances pour 2011 telle qu'elle est conçue à ce stade, vous me permettrez de penser que l'ensemble des mesures gouvernementales relatives à la taxation des patrimoines vise singulièrement les petits épargnants. Qu’on se rassure : elle ne touchera pas ceux qui réalisent près de 25 000 euros de plus-values financières ou boursières par an, mais bien plutôt le reste de la population française !

On a pu s’apercevoir que la suppression du crédit d'impôt sur les dividendes concernait plusieurs millions de personnes pour un rendement certes loin d'être négligeable – 600 millions d’euros –, mais dont la portée unitaire est, dans la majorité des cas, inférieure à 50 euros par foyer fiscal.

On est loin, par exemple, du rendement du régime séparé d'imposition sur les plus-values, qui peut être estimé entre 1, 5 milliard et 2 milliards d'euros pour les 300 000 ménages qui en déclarent chaque année. Cela représente à un bonus fiscal de plus de 5 000 euros par article…

Prenons un autre exemple : le Gouvernement souhaite supprimer le traitement fiscal particulier accordé aux jeunes mariés, ce qui rapportera a priori 500 millions d’euros sur le dos de plusieurs centaines de milliers de foyers en 2012. Il laisse cependant perdurer un dispositif, issu de la loi TEPA, qui permet à certaines familles de transmettre sans paiement du moindre droit de mutation plus de 300 000 euros de patrimoine à l'un de leurs enfants !

Ainsi, on ne baissera plus ses impôts en se mariant, mais les parents et beaux-parents les plus fortunés pourront continuer à baisser les leurs en alimentant généreusement la dot des jeunes époux !

Cela augure mal du sens de la réforme que le Gouvernement prévoit de faire sur la fiscalité du patrimoine.

On va frapper le revenu des petits épargnants – les « petits revenus financiers » – et l’on va largement épargner les détenteurs des plus gros patrimoines capitalistiques !

Si nous pouvons partager le principe de l’imposition au premier euro des plus-values, nous sommes aussi obligés de rappeler quelle est notre position de fond : il faut tendre à la disparition du dispositif dérogatoire et imposer les plus-values selon le barème de l’impôt progressif.

C’est d’ailleurs là le seul moyen de rendre justice à ceux qui ont juste un peu d’argent de côté au Crédit Mutuel ou au Crédit Agricole de leur chef-lieu de canton, par rapport à ceux qui possèdent des stock-options en nombre ou des plans d’épargne en actions au siège parisien de leur banque de dépôt ou d’affaires.

Si l’article 5 reste en l’état, nous n’irons pas au bout de la réforme équitable dont notre fiscalité de l’épargne a besoin.

Pourquoi, en effet, laisser perdurer un mode spécifique d’imposition des plus-values, qui n’intéresse réellement que ceux qui peuvent en tirer profit, c’est-à-dire moins de 1 % des contribuables de l’impôt sur le revenu ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion