... fermetures de classes sans attendre le gel préalable préconisé, options facultatives en voie d'extinction, fin de la deuxième langue vivante en filière technologique, regroupements pédagogiques intenables, remise en cause des seuils de dédoublement, insuffisance des dotations horaires, sont devenus courants.
Tous ces éléments conduisent à une baisse de qualité de l'enseignement public agricole, et la rédaction d'un livre noir sur le sujet serait en cours.
A l'appui de cette affirmation, je vous rappellerai simplement que si 500 emplois ont été créés dans l'enseignement public entre 2000 et 2002, 301 emplois ont été supprimés de 2003 à 2005, tandis que les effectifs des élèves sont restés stables.
Cette situation de rationnement de l'offre publique n'est pas admissible à une période où, en raison des enjeux et des mutations profondes, notre agriculture a besoin d'un enseignement public de qualité.
Pour clore ce sujet de l'enseignement, j'aborderai brièvement trois dossiers qui méritent une attention particulière de M. le ministre, et plus particulièrement de M. le secrétaire d'Etat, puisque c'est lui qui est en charge de ces questions.
Le premier dossier concerne le devenir des quatre établissements publics nationaux d'enseignement agricole : le centre d'enseignement zootechnique de Rambouillet, le centre d'expérimentation pédagogique de Florac, le centre d'étude du milieu et de pédagogie appliquée du ministère de l'agriculture de Fouesnant et le centre national de promotion rurale de Marmilhat.
Un récent rapport a bien mis en lumière qu'il était indispensable et urgent de clarifier les situations juridiques et administratives de ces établissements et de leurs personnels, de définir des objectifs clairs pour chacun et de prévoir les moyens nécessaires en fonction des réponses apportées.
Le deuxième dossier est relatif aux ATOSS. Nous connaissons tous les problèmes engendrés par le transfert de ces personnels aux collectivités territoriales, voulu par le Gouvernement dans le cadre de la décentralisation. Mais l'enseignement agricole rencontre des problèmes spécifiques en la matière. Que va-t-il se passer pour les ATOSS embauchés sur les budgets des établissements ? Les collectivités vont-elles les intégrer ? Les régions vont-elles entériner ou remettre en cause les iniquités constatées entre les établissements ? Comment va s'opérer le transfert des personnels, peu nombreux, gérant les ATOSS ?
Enfin, en matière de réduction de l'emploi précaire - il s'agit du troisième dossier - nous arrivons au terme du dispositif Sapin. Or des contractuels ont été recrutés depuis pour pallier aux besoins. Que vont-ils devenir ? Cela concerne près de 2000 personnes.
J'en viens au FFIPSA. Autrefois, le Parlement examinait en détail, grâce à ses rapporteurs spéciaux et à un débat spécifique, le budget annexe des prestations sociales agricoles, le BAPSA, dont les chapitres étaient très détaillés. Il concernait 4, 5 millions de bénéficiaires, dont 1, 9 million de retraités agricoles.
Désormais, la représentation nationale ne connaît que les grandes masses de dépenses et de recettes décrites dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le montant maximum de l'emprunt de la mutualité sociale agricole. La protection sociale agricole ne fait même pas l'objet d'un programme. Une telle évolution constitue une régression.
L'an passé, à cette même époque, à l'occasion de mon intervention relative au budget consacré à l'agriculture pour 2004, je vous avais fait part de mon scepticisme. Je m'étais fait l'écho de nombreux parlementaires pour lesquels le mode de financement du FFIPSA retenu, à savoir la fiscalité sur le tabac, ne présentait pas de réelles garanties de pérennité ; certains de nos collègues l'ont évoqué ce matin.
Comment s'étonner que les prévisions relatives au FFIPSA pour 2005 fassent apparaître un déficit de près de 1, 5 milliard d'euros ? Cette situation était prévisible ! Répondre, comme vous le faites, que ce problème n'est pas spécifique aux prestations agricoles n'est pas admissible puisque, dès le départ, les recettes affectées étaient clairement insuffisantes.
La pérennité du régime de sécurité sociale des exploitants agricoles ne peut être assurée que par la solidarité nationale. Avez-vous fait examiner les différentes solutions possibles de financement et d'équilibrage du FFIPSA telles que la compensation démographique, la TVA, la reprise de la dette par la caisse d'amortissement de la dette sociale ou encore l'adossement au régime des indépendants ? Ou bien comptez-vous, une de fois de plus, renvoyer cette question à un groupe de travail ?
Par ailleurs, il est regrettable que, près d'un an après sa création par le Parlement, le mode de fonctionnement de ce fonds n'ait toujours pas été défini.
Lorsque nous évoquons la question des retraites agricoles, ne perdons jamais de vue que nous sommes face aux retraités les plus faibles de notre système : sur 2 millions de retraités, 430 000 seulement touchent une retraite supérieure à 75 % du SMIC. Plus d'un million de retraités non-salariés de l'agriculture n'ont bénéficié d'aucune revalorisation.
Le gouvernement précédent avait mis en place et respecté un plan quinquennal de revalorisation, amorcé d'ailleurs sous le précédent ministre, M. Philippe Vasseur. Le budget pour 2005, comme ceux de 2004 et de 2003, aurait dû être l'occasion de franchir une nouvelle étape et de répondre à une véritable exigence de justice sociale. Malheureusement, vous avez, une fois de plus, renvoyé l'examen de ce dossier à un groupe de travail.
La seule action notable du gouvernement actuel porte sur la mensualisation des retraites, qui est prévue par l'article 105 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites. Elle était nécessaire, je vous le concède bien volontiers. En revanche, contrairement à ce que votre majorité affirme trop souvent, la retraite complémentaire a été adoptée sous le gouvernement Jospin, grâce à la proposition de loi de mon collègue Germinal Peiro.
A défaut de plan programmé, comment comptez-vous atteindre l'objectif, si souvent annoncé, d'une retraite équivalente à 75 % voire 85 % du SMIC annuel pour une carrière complète, alors que près de 1, 5 million de retraites n'atteint que 30 % ou 40 % du SMIC ?
Par ailleurs, trop de problèmes restent en suspens : les nouvelles dispositions concernant les pensions de réversion qui en font une allocation différentielle soumise à condition de ressources et révisable chaque année, la pension des conjoints des chefs d'exploitation et des aides familiaux, l'extension de la retraite complémentaire obligatoire à ces mêmes conjoints et aides familiaux au prorata de leurs carrières - je vous rappelle, monsieur le ministre, que votre majorité réclamait avec véhémence cette mesure en 2001, lors du débat parlementaire - la révision du statut des polypensionnés pour prendre en compte le montant total de leurs diverses pensions, la réduction des taux de minoration en cas de carrière incomplète, enfin, les conditions exorbitantes de rachat des périodes accomplies en qualité d'aide familiale à partir de quatorze ans.
Ainsi, l'étude des crédits prévus pour 2005 en faveur de l'enseignement et de la retraite agricoles montre clairement que ce budget ne prépare pas suffisamment l'avenir. Il n'apporte pas une reconnaissance suffisante aux générations qui ont permis à notre agriculture d'être l'une des plus performantes.
Le débat que vous avez lancé en vue de l'adoption d'une loi de modernisation agricole ne peut ni masquer ni occulter ces insuffisances. Dans la note de présentation de ce débat, il est annoncé « qu'il semble nécessaire de redéfinir la place de l'agriculture dans notre société, en lui redonnant une ambition et des perspectives. » Malheureusement, ce budget pour 2005 consacré à l'agriculture manque cruellement d'ambition et de perspectives.
Malgré toutes ces critiques, monsieur le ministre, je vous souhaite bon vent dans vos nouvelles fonctions !