Intervention de Daniel Soulage

Réunion du 7 décembre 2004 à 15h00
Loi de finances pour 2005 — État b

Photo de Daniel SoulageDaniel Soulage :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, étant d'un département qui a beaucoup souffert des aléas climatiques, qu'il s'agisse des orages, des inondations ou du gel, je me bats, depuis que je suis parlementaire, pour que soit mis en place, au niveau national, un système d'assurance efficace.

Bien entendu, je suis ravi que ce budget prévoie l'amorce d'un tel dispositif, et je vous en félicite, monsieur le ministre. C'est une nécessité pour rassurer les agriculteurs et encourager les plus jeunes d'entre eux. Le Gouvernement a fait un pas important et j'espère qu'il poursuivra sur cette lancée.

Toutefois, nous n'en sommes qu'aux préliminaires sur ce sujet. Au moment où, avec l'évolution de la PAC, les aléas économiques s'ajoutent aux aléas climatiques, il me semble que le dispositif proposé manque un peu d'ambition. Je suis persuadé que l'assurance récolte doit pouvoir évoluer vers une assurance chiffre d'affaires, voire vers une assurance revenu.

Dans cette perspective, je souhaite formuler quelques remarques et soumettre certaines idées à vos réflexions.

Premièrement, il me semble primordial que, avant d'avoir estimé les limites de l'assurance récolte, nous ne touchions pas aux crédits du Fonds national de garantie des calamités agricoles. En effet, plusieurs questions restent en suspens : quel sera le rythme d'assurance ? Comment seront indemnisés les risques « non assurables », comme les inondations, le gel, les pertes de fonds ?

A mon sens, les deux systèmes doivent cohabiter quelques années, afin qu'aucun agriculteur ne soit brutalement marginalisé.

Deuxièmement, le dispositif envisagé concerne les cultures de vente. Les contrats d'assurance peuvent porter sur une exploitation ou sur une culture.

Pour les contrats d'exploitation, il est prévu, pour 2005, une aide de l'État à hauteur de 40 %, et de 45 % pour les jeunes, avec un système de franchise de 20 %.

Pour les contrats de culture, les aides seront, en 2005, respectivement de 30 % et 35 %, avec une franchise de 25 %.

Le système proposé, en pourcentage et en montant, me semble tout à fait correct. Mais les aides prévues pour la suite baissent en trop grande proportion et rendent le dispositif peu attractif.

Troisièmement, alors que l'assurance récolte représente une priorité du budget, seulement 10 millions d'euros sont prévus pour la financer. De plus, les interventions publiques seront plafonnées à 130 millions d'euros à l'horizon 2010. C'est moitié moins que nos voisins espagnols !

Enfin, il me semble indispensable de prévoir une réassurance publique, et je regrette que l'examen de cette question soit renvoyé à plus tard.

M'étant longtemps battu pour que nous progressions sur ce sujet, j'espère que nous pourrons, par exemple à l'occasion de l'examen du projet de loi de modernisation et d'orientation agricole, réussir à mettre en place un système attractif et efficace pour les agriculteurs, ce qui n'est pas le cas actuellement.

Aujourd'hui, l'agriculture se trouve à un nouveau virage. Les pouvoirs publics se doivent, comme cela a été fait en 1992 et en 1993, d'accompagner l'ouverture de l'Europe. Ils doivent aussi prendre en compte les nouvelles règles de commerce international qui seront bientôt décidées.

Demain, il ne sera plus possible de soutenir les exportations, et de nombreuses aides devront être supprimées parce qu'elles entraînent des distorsions de concurrence. Seules les aides considérées comme neutres sur ce plan et classées « boîte verte » pourront être attribuées.

Dans ce cadre, le soutien d'une assurance revenu classée « boîte verte » et susceptible de redonner confiance à de nombreux agriculteurs me paraît une piste intéressante à étudier pour l'avenir.

A leur manière, les Etats-Unis l'ont fait avec les marketing loans. L'Espagne est en train de mettre en place une assurance chiffre d'affaires à partir de son assurance récolte. Pourquoi ne prendrions-nous pas ce chemin ?

Pour avoir participé à la conférence de Cancùn et rencontré plus récemment à Bruxelles des parlementaires de 148 pays, je me suis bien rendu compte que notre agriculture, comme, d'ailleurs, celle des Etats-Unis, est vue comme un eldorado.

Soyons conscients que chacune des aides sera étudiée à la loupe par l'OMC et que nombre d'entre elles disparaîtront, vraisemblablement parce qu'elles ne seront pas classées « boîte verte ». Si nous voulons conserver notre agriculture, l'Etat et l'Europe devront l'aider, conformément au règlement mondial. Nous avons, avec l'assurance revenu, un outil qui, si nous le voulons, pourra s'avérer très efficace.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion