Monsieur le président, permettez-moi d'émettre à nouveau le regret que, pour vouloir dynamiser la discussion budgétaire, nous aboutissions en fait à un débat tronqué, dans lequel nous n'avons pas la possibilité d'aborder l'ensemble des questions que soulève ce budget. Je vous rappelle, mes chers collègues, que notre groupe n'a disposé que de sept minutes lors des questions.
S'agissant du titre III, je reviendrai sur la situation des personnels, notamment des agents techniciens, ouvriers et de service, les TOS, qui sont préoccupés par leur très proche avenir puisqu'ils doivent, le 1er janvier prochain, changer d'employeur.
En effet, les agents TOS des lycées vont devenir des personnels régionaux, et ceux des collèges, des fonctionnaires départementaux.
Or, monsieur le ministre, vous avez vous-même déclaré devant l'Assemblée nationale qu'« il n'appartient pas au ministre de l'éducation nationale, pas plus qu'à une autre autorité de l'Etat, de demander aux collectivités territoriales de prendre un engagement solennel sur la préservation des missions de service public ».
Est-ce à dire que les personnels TOS ne sont pas assurés de poursuivre leur carrière au sein de l'éducation nationale ou des établissements publics locaux d'enseignement ?
Ce serait faire peu de cas du rôle au sein des établissements de ces agents, qui font partie intégrante de la communauté éducative. C'est pourquoi les sénatrices et les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen demandent la suspension pure et simple du processus de décentralisation des personnels TOS et l'ouverture d'indispensables négociations entre l'Etat, les collectivités locales et les organisations syndicales représentatives de ces salariés afin de procéder à un réexamen de la situation de ces agents et de leur rôle dans la communauté éducative.
Par ailleurs, monsieur le ministre, adaptation et flexibilité s'imposent de plus en plus aux personnels de l'éducation nationale, selon la logique managériale de votre politique libérale qui vise à réduire l'école au rang de marchandise.
Ainsi, les chefs d'établissement deviennent des « managers », les enseignants des « techniciens de la pédagogie », et les personnels TOS sont décentralisés. Quant aux parents, ils ne sont plus que des « clients ». L'équipe éducative est chargée non plus d'une mission de service public, mais de la production et de la vente d'un service marchand. L'école n'a donc nul besoin de fonctionnaires ; elle nécessite simplement des « ressources humaines ».
C'est en tout cas la conviction de l'ensemble de la communauté éducative, conviction que je partage ! Les personnels ont d'ailleurs été nombreux, aujourd'hui, à la scander dans leur mouvement de grève.
Ce sentiment se trouve conforté par les propos tenus par le ministre de la fonction publique, qui affirme que les retraités de la fonction publique ne servent à rien et qu'ils pèsent lourdement sur les finances de l'Etat.
Ces propos augurent mal du contenu du futur projet de loi relatif à la fonction publique territoriale qui est en cours d'élaboration. Ce projet viserait à modifier principalement l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984. L'employeur public devrait désormais, au terme des CDD proposés par dérogation, présenter un CDI de droit privé et non plus une titularisation dans la fonction publique ! Encore un pas franchi vers la marchandisation de l'école !
Pour ce qui est de la précarité, ce gouvernement n'est pas en reste, s'armant sans cesse de nouveaux dispositifs pour permettre toujours et encore plus de flexibilité, au détriment de l'aspect humain. Et ce mouvement se fera aussi sentir dans l'éducation nationale, au détriment des élèves, vous le savez parfaitement, monsieur le ministre.
Cette absolue inhumanité comptable se traduit, à l'échelon national, par un vaste plan social dont le maître d'oeuvre n'est autre que l'Etat.
Lors de la dernière rentrée scolaire, des milliers de personnels non titulaires se sont retrouvés au chômage ou ont été sommés d'accepter des vacations. Il reste, aujourd'hui encore, 450 contractuels au chômage dans l'académie de Lille, et 178, contractuels ou vacataires, dans l'académie de Grenoble.
Cette situation a d'ailleurs mobilisé les personnels à travers de multiples initiatives. Aujourd'hui, ceux que l'on appelle les « précaires » étaient en tête de cortège pour dénoncer leur précarité.
Cette obsession de rentabilité et de diminution des coûts va non seulement creuser les inégalités, mais aussi sacrifier l'avenir. La précarisation et la prolétarisation du style de vie des enseignants en général, et celles des contractuels et vacataires en particulier, rendent la fonction moins attractive. Aussi, en raison de la croissance des effectifs scolaires dans l'enseignement primaire, de la succession des suppressions de postes que le Gouvernement a entrepris, du départ à la retraite de près de la moitié des enseignants dans les dix prochaines années et du déclin des conditions de travail de l'équipe éducative, nous devrons faire face à une pénurie d'enseignants. D'ailleurs, un récent rapport de l'OCDE a lancé une mise en garde contre ce phénomène.